Un rapport du think tank The Shift Project, rendu public ce 23 juin 2020, expose comment la baisse mondiale de production de pétrole, conjuguée à une concurrence accrue entre les pays importateurs, pourrait conduire l’Europe, premier importateur mondial, à une pénurie dès 2030. De quoi transformer les politiques énergétiques du Vieux Continent ?
Le 23 juin 2020, le groupe de réflexion The Shift Project a publié un rapport sur les évolutions du marché pétrolier. Le texte s’appuie notamment sur les données (non publiques) du cabinet Rystad Energy, installé en Norvège, et reconnu comme l’une des sources les plus fiables sur le marché des hydrocarbures.
La conclusion la plus marquante du rapport est que l’Union Européenne, premier importateur mondial de pétrole (13 millions de barils par jour), pourrait entrer en pénurie dès 2030. L’Europe est en effet fortement dépendante de ses fournisseurs ; or, plus de la moitié d’entre eux devraient réduire leur production.
“La production de la Russe et celle de l’ensemble des pays d’ex-URSS, qui fournissent plus de 40% du pétrole de l’UE, semblent être entrées en 2019 dans un déclin systématique. La production pétrolière de l’Afrique (plus de 10% des approvisionnements de l’UE) paraît promise au déclin au moins jusqu’en 2030”, détaille à nos confrères du Monde Matthieu Auzanneau, directeur de The Shift Project.
Les découvertes de nouveaux puits sont en effet, depuis 30 ans, au plus bas, et les puits existants produisent de moins en moins. La plupart des compagnies pétrolières, engagées dans une diversification et un verdissement de leurs activités, vont continuer de réduire leurs investissements dans l’or noir. “C’est l’hiver du pétrole facile”, tonne le rapport du Shift Project.
La situation est d’autant plus problématique pour l’Europe que les besoins de pétrole en Afrique ou en Asie du Sud-Est sont en hausse : “Le gâteau à se partager va être plus petit, or, d’autres pays, comme la Chine, déploient une véritable géostratégie du pétrole pour sécuriser leur approvisionnements”, précise Matthieu Auzanneau.
L’Union Européenne réduit depuis 2010 sa consommation de pétrole et a entamé une transition énergétique d’ampleur. Ce rapport de The Shift Project impose un renforcement de ces politiques, selon l’analyste Alexandre Fontana, pour qui « l’écologie n’est pas une idéologie mais une nécessité ».
La fin de l’Or noir en Europe (1er cons. mondial). L’Ecologie n’est pas une idéologie, mais une nécessité: « le gâteau à se partager va être plus petit, or d’autres pays, comme la Chine, déploient une véritable géostratégie du pétrole pour sécuriser leurs approvisionnements » https://t.co/U4hNzT5e9E
— Alexandre Fontana (@AlexFontana78) June 24, 2020
Pour d’autres, comme le spécialiste de l’Afrique Fary Ndao, cette pénurie risque de provoquer une récession économique d’importance en Europe : « moins de pétrole, c’est moins de transport et moins de croissance économique. Aux Africains d’anticiper ce déclin chez un de leurs partenaires commerciaux majeurs ».
Plusieurs éudes le montrent : le PIB est lié à la quantité d’énergie utilisée. Or l’énergie primaire-étalon c’est le pétrole, et ce, depuis un siècle. Le transport (aérien, maritime, terrestre) et donc le commerce se fait à 98% avec du pétrole. Ça ne peut pas changer en 10-15 ans
— Fary Ndao 🇸🇳 🧡 (@ndaofary) June 24, 2020
En effet, « le PIB est lié à la quantité d’énergie utilisée. Or l’énergie primaire-étalon c’est le pétrole, et ce, depuis un siècle. Le transport (aérien, maritime, terrestre) et donc le commerce se fait à 98% avec du pétrole. Ça ne peut pas changer en 10-15 ans », conclue Fary Ndao.