Le groupe public tchèque d’énergie CEZ a annoncé, ce 27 février 2023, qu’il visait l’horizon 2032 pour l’exploitation commerciale de son premier petit réacteur nucléaire modulaire (small modular reactor, ou SMR). Alors que la Chine, les États-Unis et la Russie sont à la pointe du développement de cette technologie, la France accuse toujours un net retard, sans sembler vouloir réellement le combler.
Le groupe public tchèque CEZ vise 2032 pour la mise en service de son premier SMR
La Tchéquie veut se doter au plus vite de SMR, ces petits réacteurs nucléaires, plus simples, plus sûrs, fabriqués en usine et installable dans de nombreux environnements, notamment les anciennes centrales thermiques (ce qui leur permet de bénéficier des infrastructures électriques réseau présentes sur place).
Ce 27 févier 2023, le groupe public tchèque d’énergies CEZ a publiquement dévoilé ses ambitions : « Le premier sera lancé vers 2032 et les deux autres dans la seconde moitié des années 2030 », a déclaré son porte-parole, Ladislav Kriz. Le premier SMR sera construit à Temelin, près de l’une des deux centrales nucléaires tchèques de CEZ, qui couvrent environ un tiers de la production d’électricité du pays.
Les deux autres devraient prendre place dans deux anciennes centrales à charbon. « Les petits réacteurs modulaires ne sont pas destinés à remplacer les grandes unités nucléaires, ils complètent le mix énergétique tchèque en tant que substitut pratique des centrales électriques au charbon et des grandes centrales de chauffage », émettrices de CO2, affirme Tomas Pleskac, membre du conseil d’administration de la CEZ.
SMR : l’avenir du nucléaire, partout dans le monde
La technologie des SMR ne cesse de s’imposer dans le monde. La Russie a mis en service dès 2020 une centrale flottante disposant de quatre réacteurs de petite taille à Bilibino, produisant à la fois de l’électricité et de la chaleur. La Chine a relié au réseau son premier SMR, à Shidao Bay, en décembre 2021.
Les États-Unis disposent de plusieurs projets technologiquement très avancés et de plusieurs démonstrateurs, prêts pour l’industrialisation. Fin 2022, ils ont même annoncé leur volonté, via un projet baptisé « Phoenix », de fournir à l’Europe une technologie clé en main pour remplacer les centrales à charbon par des SMR.
Au Canada, GE Hitachi Nuclear a reçu le feu vert pour construire un SMR sur le site de Darlington, avec une mise en service prévue pour 2028. La Finlande envisage d’utiliser la cogénération électricité-chaleur de SMR pour alimenter les réseaux de chaleur urbains utilisant le charbon ou le gaz fossile.
Au Royaume-Uni, Rolls-Royce SMR vise la mise en service de son premier réacteur modulaire en 2029, et s’est donné pour objectif d’en construire une dizaine d’ici 2035. La France, de son coté, accuse un net retard, évalué technologiquement entre 5 et 10 ans.
La France doit-elle changer de rythme sur les SMR ?
La présentation du projet de SMR d’EDF, Nuward, ne date que d’avril 2021, et il ne s’agit même pas encore d’un prototype. Le plan d’investissement France 2030 octroie 1 milliard d’euros pour la filière nucléaire, notamment pour développer des SMR. Le béton du premier démonstrateur est annoncé pour 2030.
Ce 28 février 2023, dans une tribune pour Le Monde de l’Energie, Jean-Jacques Nieuviaert, président de la Société d’Etudes et de Prospective Energétique (SEPE), lance un vibrant plaidoyer pour accélérer au plus vite sur cette technologie, de lui accorder la priorité et de larges financements, au-delà de ce qui est actuellement prévu.
« Pour changer de stratégie, il faut augmenter massivement les montants des investissements prévus pour le développement de Nuward, afin d’obtenir un début de commercialisation au plus tard en 2028 / 2030. Il s’agit ici de gagner entre 3 et 5 ans sur les hypothèses actuelles, mais en utilisant des moyens beaucoup plus importants. La filière SMR permettrait de gagner entre cinq et dix ans par rapport à la mise en service des EPR », défend-il notamment.
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