La Grande-Bretagne cherche à développer son parc nucléaire

La Grande-Bretagne cherche à développer son parc nucléaire

Hinkley-Point-centrale-nucleaire

Alors qu’en France et dans d’autres pays européens, la tendance est à la réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique, la Grande-Bretagne cherche au contraire à développer son parc nucléaire. La raison : le pays a besoin d’augmenter rapidement ses capacités énergétiques afin de couvrir ses besoins et gagner en autonomie énergétique. Mais pour développer ce parc nucléaire, le pays fait face à un obstacle de taille : celui de trouver des capitaux.

Un partenariat avec Hitachi ?

En mai 2018, l’agence de presse japonaise Kyodo News a dévoilé que le gouvernement britannique avait fait une proposition à Horizon Nuclear Power, l’une des filiales de Hitachi, afin de trouver un accord de financement pour construire plusieurs réacteurs nucléaires. Le gouvernement britannique aurait ainsi proposé une assistance financière d’un montant de 2 000 milliards de yens (soit 15,3 milliards d’euros) à Horizon Nuclear Power sous la forme de prêts et d’autres ressources financières. Cette assistance devrait permettre de couvrir une partie des frais pour la construction de nouveaux réacteurs nucléaires au Pays-de-Galles. Si pour l’instant les responsables de Hitachi n’ont pas commenté cette offre, la demande du gouvernement britannique démontre bien que la situation énergétique du pays est inquiétante, surtout s’agissant de l’avenir sensible du parc nucléaire britannique.

Un parc nucléaire en fin de vie en Grande-Bretagne

La raison pour laquelle la situation nucléaire britannique est préoccupante, c’est avant tout parce que le parc nucléaire du pays est en fin de vie. Les réacteurs nucléaires assurent 17% de la production électrique de l’île de Grande-Bretagne. Le pays compte huit centrales nucléaires, pour un total de seize réacteurs en activité et une production annuelle de 58 TWh. Mais la moitié des réacteurs actuellement en service devrait être mis à l’arrêt à l’horizon 2025 du fait de leur vétusté.

Pour les remplacer, le gouvernement britannique a annoncé en 2008 qu’il faudrait construire dix nouveaux réacteurs nucléaires d’ici 2025. A l’heure actuelle, les projets nucléaires de Wylfa Newydd, au Pays-de-Galles, et de Oldbury-on-Severn, en Angleterre, sont une priorité pour le gouvernement britannique. C’est pour ces deux sites que le gouvernement britannique tente de convaincre Horizon Nuclear Power d’accepter une offre de financement. Dans l’idéal, il souhaiterait que ces deux nouveaux réacteurs nucléaires soient construits dans les plus brefs délais afin de renforcer la production nucléaire domestique : en 2008, le gouvernement envisageait une inauguration de deux nouvelles centrales nucléaires pour 2020 ; une échéance aujourd’hui intenable. Mais pour concrétiser ces projets, il faut d’abord trouver des financements, une étape rendue difficile à cause du chantier de Hinkley Point, qui cumule retard (le premier réacteur pourrait être mis en service en 2025 d’après les estimations d’EDF) et dépassements de budget (en juillet 2017, EDF a annoncé que le surcoût serait de 1,7 milliard d’euros).

Le pari du secteur privé

Alors pourquoi, malgré sa volonté clairement affichée, le gouvernement britannique ne parvient-il pas à développer son parc nucléaire ? Au début des années 2000, le gouvernement britannique a pris la décision de se désengager de la construction des centrales nucléaires au profit du secteur privé. L’objectif principal était de limiter la participation financière de l’état dans le développement du parc nucléaire. Problème : les opérateurs privés ne se sont pas précipités sur les projets nucléaires. Pire encore : dans un article publié en mai 2008, le journal le Times révèle que le gouvernement britannique a largement sous-évalué le coût de construction de nouvelles centrales nucléaires dans le pays. Alors que l’estimation du gouvernement était de 2,8 milliards de livres sterling par nouveau réacteur, le journal rapporte que le coût réel serait en fait de 4,8 milliards de livres sterling.

Les coûts de construction pour les dix nouvelles centrales voulues par le gouvernement approcheraient donc les 50 milliards de livres, sans tenir compte des coûts de démantèlement des anciens réacteurs et du traitement des déchets nucléaires. Dans ces conditions, la viabilité commerciale du projet est remise en cause. En l’absence d’incitations pour séduire le secteur privé, aucun nouveau chantier de réacteur nucléaire n’a été lancé en Grande-Bretagne.

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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COMMENTAIRES

  • Aucune obligation, sauf à se baser sur de vieilles analyses de 2012 par quelqu’un comme JM Jancovici qui a un biais énergétique assez marqué et pas vraiment indépendant, analyses qui n’ont pas intégré les évolutions technologiques et de chute des prix, tout comme celles du stockage et qui remettent donc en cause l’approche objective que l’on doit avoir.

    Surtout quand le nucléaire (dont 8 réacteurs ont été fermés en Allemagne en 2011 et la totalité en 2022) coûte plus du double de l’éolien offshore et plus encore comparé à l’éolien terrestre au Royaume-Uni.

    Les États-Unis, le Canada et le Japon créent une coalition visant à promouvoir l’énergie nucléaire en tant que source d’énergie sans carbone dans le monde entier. Le Royaume-Uni participe également.

    Il est évidemment incohérent de soutenir d’un côté le charbon, le gaz et pétrole de schistes qui font des dégâts notoires, se soustraire des Accord de Paris sur le climat avec la Syrie et prétendre promouvoir le nucléaire pour des motifs de réduction du C02.

    C’est simplement une énergie centralisée qui représente dans la majorité des cas un pouvoir d’Etat, revenus et dépendance associés, alors que les renouvelables ou l’efficacité énergétique, par leur diversité sont un modèle très différent.

    On aimerait mieux une coalition qui soutient l’efficacité énergétique dont l’impact majeur est encore démontré par les scientifiques internationaux de l’IIASA (1)

    Pour mémoire : Pouvons-nous obtenir 100% de notre énergie à partir de sources renouvelables? Les scientifiques de l’Institut de technologie de Karlsruhe, du Conseil sud-africain pour la recherche scientifique et industrielle, de l’Université technologique de Lappeenranta, de l’Université de technologie de Delft et de l’Université d’Aalborg ont analysé des centaines d’études de à travers la littérature scientifique pour répondre à chacun des problèmes apparents. Ils démontrent qu’il n’y a aucun obstacle sur la voie d’un avenir 100% renouvelable.

    Revenons maintenant à la modélisation de scénarios à faible coût pour éliminer les combustibles fossiles de notre système énergétique, afin que nous puissions relever les défis climatiques et sanitaires qu’ils posent.

    https://www.lut.fi/web/en/news/-/asset_publisher/lGh4SAywhcPu/content/can-we-get-100-of-our-energy-from-renewable-sources-new-article-gathers-the-evidence-to-address-the-sceptics

    .

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  • (1) Selon une nouvelle étude d’une équipe internationale de scientifiques de l’IIASA et du Centre Tyndall pour la recherche sur le changement climatique à l’Université d’East Anglia au Royaume-Uni, publiée dans Nature Energy, le réchauffement planétaire pourrait être limité à 1,5° C grâce à des améliorations sans précédent de l’efficacité énergétique des activités quotidiennes.

    L’équipe a examiné un large éventail d’innovations en marge des marchés actuels, mais qui pourraient aider à réduire les émissions si elles devenaient monnaie courante. S’appuyant sur des études détaillées de l’énergie utilisée dans le transport, dans les maisons et les bureaux, et dans la fabrication de biens de consommation, ils ont constaté des réductions de 2 à 4 de la quantité d’énergie nécessaire pour déplacer les personnes et les biens et pour répondre aux besoins matériels de populations en croissance, en particulier dans les pays du Sud.

    http://www.iiasa.ac.at/web/home/about/news/180604-gruebler.html

    .

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  • Côté “renouvellement” à Tchernobyl pendant des siècles voire des milliers d’années et à Fukushima pendant quelques dizaines à centaines d’années, on n’a pas besoin d’y penser c’est automatique à chaque incendie, inondations etc ce n’est pas une énergie renouvelable mais une contamination renouvelable.

    Les sangliers (y compris jusqu’en Suède près de Stockholm) dépassent par exemple nettement les limites de Césium 137 fixées et ce pour bon nombre d’années encore compte tenu de la demi-vie de ce dernier (30 ans).

    Timothy Mousseau est professeur de sciences biologiques à l’Université de Caroline du Sud à Columbia. Il est l’un des principaux experts mondiaux sur les effets de la contamination par les radionucléides des accidents nucléaires sur les populations d’oiseaux sauvages, d’insectes, de rongeurs et de plantes :

    Les organismes vivant dans la nature sont beaucoup plus sensibles aux rayonnements que les animaux de laboratoire. Par exemple comparativement aux souris sauvages, exposées à des niveaux identiques de rayonnement ionisant, les souris sauvages présentent un taux de mortalité huit à dix fois supérieur à celui des souris de laboratoire. C’est parce que les animaux de laboratoire sont protégés de la plupart des facteurs de stress – comme le froid ou la faim.

    Là où les choses se compliquent, c’est quand les mutations nocives sont récessives, c’est-à-dire quand il faut deux copies [une pour chaque chromosome] pour l’expression de la mutation. De nombreuses mutations entrent dans cette catégorie. Ils peuvent s’accumuler dans les populations parce qu’ils ne sont pas exprimés jusqu’à ce que deux exemplaires entrent dans le même individu [un de la mère, l’autre du père].

    Pour cette raison, les populations peuvent être affectées par de telles mutations pendant de nombreuses générations, même après l’élimination du mutagène, et également, via la dispersion, dans des populations qui n’ont jamais été affectées par le mutagène.

    La forêt rouge près de Tchernobyl en Ukraine présente un risque élevé d’incendie, car un manque de bactéries empêche les arbres de se décomposer.

    La plus grande crainte à l’heure actuelle est liée à l’observation d’étés plus chauds et plus secs en Ukraine et à l’augmentation du nombre et de la taille des feux de forêt qui en résulte. En été 2015, il y a eu trois grands incendies et l’un d’eux a brûlé des zones très contaminées.

    Nous avons prédit que de tels événements pourraient constituer une menace importante pour les populations humaines et l’environnement par la remise en suspension et le dépôt de radionucléides dans la litière et la biomasse végétale.

    Combien de temps les zones contaminées autour de Tchernobyl et de Fukushima seront-elles mutagènes et dangereuses ?

    Tchernobyl était un feu nucléaire et une fission en cours depuis 10 jours, avec des isotopes de strontium, d’uranium et de plutonium éparpillés dans le paysage. Ils ont de longues demi-vies, tant de zones resteront dangereuses pendant des siècles, voire des milliers d’années.

    Fukushima était en grande partie un événement de césium, et les radionucléides de césium ont une demi-vie relativement courte. La zone se décontaminera naturellement en quelques décennies, au plus tard dans quelques centaines d’années.

    http://www.dw.com/en/nuclear-accidents-make-mutant-bugs-and-birds/a-19098683

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  • @Energy+

    La “Deutsche Welle” n’est en aucun cas un organisme scientifique. Informations à prendre avec précaution.

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  • @ Dan : le DW interroge les chercheurs qui ont déjà publié sur le sujet sur lequel ils travaillent, comme beaucoup d’autres, depuis de nombreuses années et avec les mêmes constats :

    Since 1999, Professor Mousseau and his collaborators (esp. Dr. Anders Pape Møller, CNRS, University of Paris-Sud) have explored the ecological and evolutionary consequences of the radioactive contaminants affecting populations of birds, insects and people inhabiting the Chernobyl region of Ukraine, and more recently, in Fukushima Prefecture, Japan. Their research suggests that many species of plants and animals experience direct toxicity and increased mutational loads as a result of exposure to radionuclides stemming from the Chernobyl and Fukushima disasters. In many species (e.g. the barn swallow, Hirundo rustica), data suggests that this mutational load has had dramatic consequences for development, reproduction and survival, and the effects observed at individual and population levels are having large impacts on the biological communities of these regions. Dr. Mousseau’s current research is aimed at elucidating the causes of variation among different species in their apparent sensitivity to radionuclide exposure.

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  • Pas de contestation dans le cas de contaminations fortes. Là, vous avez raison, mais pour les faibles (moins de 100 msv/an) c’est autre chose. Mais Tchernobyl était un accident exceptionnel, suite à des essais après suppression de toutes les sécurités.

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