Dans une note, publiée le mardi 21 avril 2020, France Stratégie, un organe d’analyse rattaché au Premier Ministre, a détaillé les impacts de la crise du Covid-19 sur le secteur de l’électricité, en France et en Europe. Baisse de la consommation et forte production éolienne et photovoltaïque ont provoqué une chute des prix de gros spectaculaire. Elle induit une mise à l’arrêt prolongée des centrales pilotables, mettant en danger l’approvisionnement électrique.
La crise du Covid-19 provoque une baisse de la consommation et un effondrement des prix de l’électricité sur les marchés de gros
Ce mardi 21 avril 2020, Etienne Beeker et Marie Dégremont ont publié un « Point de vue » sur le site de France Stratégie, baptisé Impacts de la crise du Covid-19 sur le système électrique. Les deux auteurs y partent du constat d’une baisse de la consommation électrique journalière de l’ordre de 15 à 20%.
Dans le même temps, le mois de mars ayant été particulièrement venteux et ensoleillé, les productions éoliennes et photovoltaïques ont été fortes. Les auteurs rappellent qu’en temps normal, « pour répondre à la demande, les moyens de production sont appelés suivant des coûts marginaux croissants : d’abord les énergies renouvelables (hors hydraulique, géré pour optimiser le stockage et la flexibilité apportés au système), qui sont prioritaires sur le réseau, ensuite le nucléaire, enfin les centrales à gaz ou au charbon ».
Dès lors, depuis le début du mois de mars, le recours aux centrales thermiques a été particulièrement faible. Consommation faible, production renouvelable forte : l’autre conséquence est, tout naturellement, un effondrement des prix sur les marchés de gros : « les systèmes électriques des pays européens étant largement interconnectés et les marchés couplés, les baisses de prix se sont généralisées sur le continent au fil des ordres de confinement, y compris pour les contrats à terme en 2021 et 2022, preuve que le marché anticipe une crise assez longue », exposent les deux auteurs.
Une fragilisation des acteurs du secteur et de la sécurité de l’approvisionnement
Dès lors, tous les acteurs du système électrique français sont fragilisés. Les producteurs qui ne bénéficient pas de condition de rachat produisent moins, et donc vendent moins. Les fournisseurs vendent moins. Les gestionnaires des réseaux (RTE et Enedis), dont la rémunération est fixée par le Tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (Turpe), voient également leurs revenus chuter.
Ce qui risque d’avoir, selon les auteurs de la note, des conséquences sur le tarif de l’électricité en France : « leurs dépenses étant essentiellement constituées d’investissements, le Turpe devra nécessairement augmenter en 2021 pour couvrir ces dépenses, faisant augmenter le prix du kWh au consommateur final. Le réseau comptant pour moitié environ de ce prix HT, une diminution de 10 % de la consommation d’électricité induirait en première approximation une augmentation du tarif de 5 %. ».
Par ailleurs, cette situation met paradoxalement en danger la sécurité de l’approvisionnement électrique : en effet, à certains moments, la production non pilotable (solaire et éolien, mais aussi certaines tranches nucléaires et au gaz non flexibles) peut dépasser la consommation. « Dans ce cas, la priorité d’injection sur le réseau des énergies renouvelables conduit les gestionnaires de ce réseau à arrêter des centrales conventionnelles – au charbon, gaz ou nucléaire –, pourtant par nature flexibles et permettant d’assurer l’équilibre offre-demande à court terme. À cela s’ajoute le fait que de nombreuses installations industrielles sont à l’arrêt, privant le système d’un levier important d’ajustement de la consommation », affirment les auteurs de l’étude.
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