La lutte contre les émissions de gaz à effet de serre n’a jamais été soutenue par un si grand consensus mondial. Elle peine pourtant à se mettre en place sur le terrain. Pire : les investissements sont loin d’être à la hauteur. A tel point qu’en France, la stratégie bas-carbone voulue par le gouvernement, risque de ne pas porter ses fruits.
2018 : retour en force des énergies fossiles
Le 5 novembre 2019, Capgemini a publié les résultats de son Observatoire Mondial des Marchés de l’énergie 2019. Et ces résultats ne sont pas optimistes. Premier constat : « Malgré la croissance continue et la baisse du coût des énergies renouvelables, le charbon, le pétrole et le gaz restent la pierre angulaire d’une consommation d’énergie en hausse. » De fait, la consommation énergétique mondiale a augmenté de 2,3% à l’échelle mondiale en 2018. Une hausse de la consommation qui se répercute au niveau des émissions de gaz à effet de serre : ils ont augmenté de 2% en 2018 ! C’est plus qu’en 2017 (1,6%). Si l’Europe fait figure de bon élève avec une croissance nulle pour les GES, d’autres zones ont en revanche des résultats catastrophiques. Les émissions de GES ont augmenté de 2,3% en Chine, de 3,4% aux Etats-Unis, et même de 6,4% en Inde.
D’après le rapport, « environ 75% de cette hausse résulte de la consommation de pétrole, de gaz et de charbon ». Ce dernier a même connu une hausse de sa consommation de 4% en 2018. Une mauvaise nouvelle pour le climat.
La Chine et l’Inde : 2 acteurs majeurs de la lutte contre les GES
Situation paradoxale : la Chine et l’Inde, qui sont deux des plus gros émetteurs de GES au monde, sont aussi deux pays particulièrement actifs dans le développement des énergies renouvelables. Ces deux acteurs peuvent influer sur la courbe de la pollution. Mais leurs efforts pour les ENR ont du mal à porter leurs fruits. Comme le souligne Capgemini : « Afin de répondre à la demande croissante d’énergie domestique, les deux pays demeureront hautement dépendants des centrales à charbon pendant au moins deux décennies et resteront de grands émetteurs de CO2. »
Pour la Chine comme pour l’Inde, le salut pourrait venir de l’atome. Les deux pays investissent massivement dans le développement d’une filière nucléaire. La construction de plusieurs centrales nucléaires sur leurs territoires pourrait ralentir la tendance, mais pas l’inverser.
La finance climatique mondiale en panne sèche
Si les GES progressent encore, c’est en premier lieu parce que les investissements en faveur des énergies renouvelables ont du mal à se mobiliser. La finance climatique mondiale a marqué le pas en 2018 : elle a péniblement atteint 546 milliards de dollars. En 2017, elle se montait à 612 milliards, soit une baisse impressionnante de 11% des capitaux dévolus à la transition énergétique.
Cette baisse des investissements se fait logiquement sentir sur les ENR. Au premier semestre 2019, leurs investissements mondiaux ont été de 217,6 milliards de dollars, soit une baisse de 14% par rapport à 2018. La situation est d’autant plus ironique que « les énergies renouvelables restent le segment dont la croissance est la plus rapide du secteur [de l’énergie], grâce à la décroissance de leurs coûts permise par les progrès technologiques. » En effet, les ENR ont connu une progression de 14,5% en 2018. Et le coût de production de l’électricité verte (solaire et éolienne) a baisse de 13% en un an.
Et en France ?
Au niveau mondial, l’Europe est la zone la plus avancée en matière de décarbonation. Les émissions de GES sont stables grâce à une stratégie de sobriété énergétique. La consommation d’énergie est jugulée, et les pays européens ont déjà pris des mesures pour limiter leur usage des fossiles. L’abandon du charbon est la décision la plus symbolique (dès 2022 pour la France). Malgré ces éléments, l’Europe a peu de chances d’atteindre ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre. La zone Europe devrait réduire de 640% ses émissions de GES à l’horizon 2030. Un « défi difficile à relever » d’après le rapport de Capgemini.
La situation de la France est d’ailleurs un bon exemple de la tendance mondiale. Malgré les ambitions portées par l’Accord de Paris, le gouvernement peine à mobiliser les fonds suffisants.Ce dernier a pourtant fixé un cap précis : 15 milliards d’investissements chaque année pour la transition énergétique ; puis 30 milliards chaque année dès 2024. Malgré cette ambition, le budget 2020 ne prévoit qu’une augmentation de 800 millions d’euros pour le ministère de l’écologie. Dans l’optique des réductions budgétaires, le ministère sera aussi amputé de 1.000 postes de fonctionnaires.
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