Le 14 octobre 2019, le Prix Nobel d’économie a été décerné à une équipe de trois économistes, dont la franco-américaine Esther Duflo. Ensemble, ils ont travaillé à l’émergence d’une nouvelle méthode d’analyse des théories économiques sur le terrain. Une méthode qui s’intéresse notamment à l’aide au développement, et qui pourrait s’avérer cruciale pour l’avenir des zones non interconnectées. Vainqueurs du Prix ONU pour l’Action Climatique, les Électriciens sans frontières se sont par exemple inspirés de ces travaux…
Mieux utiliser l’aide au développement
« Mieux nous comprendrons les relations microéconomiques, plus le modèle macroéconomique sera utile« . C’est par ses mots que l’économiste Esther Duflo résume son travail de recherche au sein du Massachussets Institute of Technology (MIT), en collaboration avec les deux américains Abhijit Banerjee et Michael Kremer. D’après le secrétaire général de l’Académie Royale des sciences de Stockholm, Göran Hansson, leurs travaux « ont introduit une nouvelle approche pour obtenir des réponses fiables sur la meilleure façon de réduire la pauvreté dans le monde« . Et cette méthode pourrait notamment avoir une incidence sur la stratégie de développement des zones non interconnectées.
La méthode de travail prônée par les trois économistes consiste à utiliser des expériences de terrain, en comparant un échantillon test avec un échantillon référence, pour évaluer l’efficacité de solutions. Cette économie du développement doit servir de levier pour lutter contre la précarité des populations, sous toutes ses formes, et notamment la précarité énergétique. Emmanuel Macron a d’ailleurs salué l’attribution du Prix Nobel d’économie : « Les recherches dans ce domaine peuvent avoir un impact concret sur le bien-être de l’humanité. »
Des applications concrètes pour le secteur de l’électricité
Le Prix Nobel d’économie 2019 a aussi été salué par de nombreuses ONG. Elles sont nombreuses à souligner les applications pratiques de ce nouveau modèle analytique. L’ONG Electriciens Sans Frontières par exemple cite ces travaux comme source d’inspiration.
Félicitations à Esther Duflo, Abhijit Banerjee et Michael Kremer pour le #PrixNobelEconomie ! Notre ONG s’est inspirée de leurs travaux pour évaluer l’impact de l’électrification de zones rurales isolées : l’étude est en cours avec notre partenaire @FondationFERDI #NobelPrize2019
— Electriciens sans frontières (@ESF_ONG) October 14, 2019
Et l’organisation a justement remporté le Prix ONU pour l’Action Climatique, au titre de ses réalisations conduites en 2018 dans l’île de la Dominique. Elle sera également invitée « à présenter leurs actions à la prochaine conférence internationale sur le climat, la « COP25 », qui se déroulera à Santiago du Chili« . De fait, les zones non interconnectées deviennent un enjeu social et environnemental crucial dans plusieurs endroits du globe, et notamment en Afrique, où une large partie de la population n’a pas encore accès à l’électricité. Mais les zones insulaires, qui sont souvent les plus vulnérables face au changement climatique, sont également concernées.
Premier enjeu pour le développement des ZNI : capter les financements ?
Ce Prix Nobel d’économie 2019 intervient aussi dans un contexte très morose. Le financement de la transition énergétique peine à trouver un modèle. Tant les initiatives privées que les fonds publics semblent insuffisants pour répondre aux objectifs affichés par les pays signataires de l’Accord de Paris. Au Sommet Action Climat qui a eu lieu à New-York, le 23 septembre 2019, les perspectives financières de la transition énergétique ont ainsi été largement abordées. Malgré une recapitalisation du Fonds vert pour le climat par la France et l’Allemagne (1,5 milliard de dollars supplémentaire pour chacun), l’objectif des 10,2 milliards de dollars fixé en 2009 est loin d’être atteint. Au total, le Fonds vert a péniblement atteint les 7 milliards de dollars. À l’instar de la promesse du Qatar de verser 100 millions de dollars pour venir en aide aux petits pays insulaires, les efforts consentis demeurent pour l’instant insuffisant.
Une situation qui n’est pas totalement nouvelle. Face aux doutes des décideurs sur l’attitude à adopter en réponse au réchauffement climatique, Esther Duflot résumait ses ambitions au Collège de France : « certains experts soutiennent que l’aide au développement peut faire disparaître la pauvreté, tandis que d’autres, plus sceptiques, répondent que l’aide apportée de l’extérieur par les pays occidentaux est vaine, car seule l’économie de marché peut éliminer la pauvreté. Des positions antagonistes aussi marquées font surtout ressentir le besoin d’un discours scientifique, qui propose des solutions fortes s’appuyant sur des évaluations rigoureuses ».
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