Ce 15 novembre 2021, le débat sur le futur énergétique de la Belgique s’est encore complexifié. Alors que le pays n’est toujours pas parvenu à présenter un plan crédible pour respecter ses engagements de l’Accord de Paris, la ministre de l’environnement de la Flandre, Zuhal Demir, a refusé l’installation d’une centrale au gaz à Vilvorde, relançant ainsi le débat sur la sortie du nucléaire en Belgique.
Quelle politique énergétique et climatique pour la Belgique ?
Cette affaire illustre parfaitement la complexité et les paradoxes du système politique belge, et des impasses qu’il peut provoquer. Dans un mouvement européen de transition énergétique et de Green Deal, la Belgique tente de composer un avenir énergétique. Mais le pays bute encore sur les stratégies à mettre en place. Et n’est pas parvenu à présenter un accord sur ses objectifs climatiques durant la COP26.
L’épineuse question du nucléaire a même été relancée, et reste entière ce lundi 15 novembre 2021. Le pays a en effet tardé à se prononcer sur cette question, au point qu’Engie, opérateur des centrales nucléaires belges, avait fini par acter la sortie belge du nucléaire, sans aucune confirmation politique, mais en constatant qu’il était trop tard pour planifier une prolongation des centrales en activité.
Depuis, le gouvernement fédéral du premier ministre Alexander de Croo a confirmé ce choix de 2025 comme échéance d’une sortie du nucléaire. Or, Alexander de Croo, membre du parti libéral Open VLD, est à la tête d’une large coalition, comprenant des libéraux (Open VLD, flamands, MR, wallons), des écologistes (Groen, flamands, Ecolo, wallons), des socialistes (Vooruit, flamands, PS, wallons) et les sociaux-démocrates flamands du CD&V.
Les questions énergétiques sont certes de la compétence du gouvernement fédéral, mais les gouvernement régionaux peuvent aisément bloquer certaines décisions, et ainsi mettre la pression sur le pays.
La ministre flamande de l’environnement refuse la construction d’une centrale au gaz…
C’est exactement ce qui est en train de se passer en Flandre. La région est censée, elle aussi, sortir du nucléaire en 2025. Pour éviter le black-out à cette date, le pays doit augmenter sa capacité de production électrique par des centrales au gaz.
Or, la ministre de l’environnement de Flandre, Zuhal Demir, vient de refuser la construction d’une centrale au gaz à Vilvorde, d’une puissance de 875 MW, après avoir retoqué des projets du même type à Tessenderlo et Dilsen-Stokkem. La ministre a justifié sa décision par des émissions d’ammoniac et d’oxydes d’azote dépassant les seuils régionaux réglementaires.
En Wallonie, Engie a prévu de construire une centrale identique, aux Awirs (à proximité de Liège), et une autre, de plus petite taille, à Amercoeur, et le gouvernement wallon a validé ces deux projets, les estimant réglementaires.
Mais si le gouvernement wallon est dominé par une coalition entre le PS, le MR et Ecolo (tous au gouvernement), la Flandre est dirigée par une coalition menée par les nationalistes flamands du N-VA (absents du gouvernement), aux cotés des libéraux d’Open VLD et des sociaux-démocrates du CD&V (qui sont, eux, au gouvernement).
… une stratégie pour remettre en question la sortie du nucléaire de la Belgique en 2025 ?
Or, Zuhal Demir est membre du N-VA, un mouvement plutôt favorable, comme les libéraux et les sociaux-démocrates (MR, Open VLD, CD&V), au nucléaire, à l’inverse des socialistes et des écologistes, qui y sont fermement opposés.
Georges-Louis Bouchez, président du MR, a d’ailleurs fait un appel du pied très clair dans cette direction, s’opposant à la construction de nouvelles centrales au gaz dans le pays : «Je n’aime pas le nucléaire mais j’aime encore moins les émissions de CO2», expose-t-il. Du coté des écologistes, la présidente de Groen Meyrem Almaci a jugé que la décision de Zuhal Demir était une “politique de sabotage”.
Engie va probablement contester ce refus devant le Conseil des contentieux des permis, mais cette procédure peut durer des années, et la décision surviendra trop tard pour l’échéance de 2025. Dans l’urgence, la solution la plus probable est d’augmenter la capacité des centrales au gaz wallonnes, au risque, pour certain analyste, de faire de la Wallonie « la poubelle à CO2 du pays ».
Laisser un commentaire