Cet été, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) scrute le ciel avec attention. Et pour cause, l’Institut s’inquiète des effets de la canicule sur les centrales nucléaires françaises. Fin juillet dernier, il a même publié une note d’information consacrée au sujet. D’après cette note, « La canicule peut avoir des conséquences sur la production d’électricité pour des raisons de protection environnementale mais, potentiellement aussi, sur la sûreté des centrales nucléaires. » Depuis plusieurs années déjà, l’IRSN suit de près les épisodes de canicule. Il a aussi mis en place un suivi de sécurité auprès des différentes centrales françaises.
Canicule et centrales nucléaires : quel impact ?
Quel est le lien entre la canicule et la sûreté des centrales nucléaires ? Les pics de chaleur peuvent affecter le fonctionnement d’une centrale à plusieurs niveaux. En période de canicule, la température risque aussi d’augmenter au sein des centrales nucléaires. Les exploitants doivent donc surveiller la température atteinte dans les locaux. C’est particulièrement le cas pour les mécanismes de refroidissement de la centrale.
Le refroidissement est crucial dans une centrale nucléaire. Les réacteurs nucléaires ainsi que les piscines d’entreposage du combustible usé font l’objet d’un contrôle minutieux des températures. Ils doivent être refroidis, et la température doit rester constante. Le plus souvent, les centrales nucléaires sont construites près de cours d’eau, et cette eau est utilisée pour refroidir les installations de la centrale. La centrale puise l’eau pour alimenter son circuit de refroidissement, puis rejette une eau plus chaud en bout de course.
En cas de canicule, trois problèmes se posent. La chaleur peut causer la propagation d’algues qui risquent d’obstruer l’entrée des tuyaux d’eau qui alimentent la centrale. L’IRSN souligne aussi que l’augmentation de la température de l’eau rejetée par la centrale peut mettre en péril la faune et la flore du cours d’eau. Il existe d’ailleurs des règles environnementales à ne pas dépasser. Mais le pire scénario pour une centrale nucléaire est la baisse du niveau du cours d’eau utilisé pour son refroidissement. Si le débit d’eau est trop faible, le refroidissement ne peut pas se faire normalement.
Un Plan Canicule pour les centrales nucléaires
En cas de prévision de canicule, l’IRSN et EDF ont mis en place des protocoles de contrôle pour assurer la sécurité des centrales nucléaires. Ce « Plan Canicule » vise aussi à garantir la continuité de la production électrique. Il consiste en priorité à surveiller la température au sein des installations nucléaires. EDF prévoit même des générateurs de secours, qui sont eux aussi régulièrement testés. Et si la température augmente, EDF doit procéder à « une interruption provisoire de la production d’électricité pour éviter l’échauffement de l’eau du fleuve ».
EDF : des centrales nucléaires à l’épreuve de la chaleur ?
Lorsque les centrales nucléaires ont été construites, le réchauffement climatique n’était pas encore d’actualité. De fait, les températures moyennes prises en compte pour la conception et l’exploitation des centrales nucléaires tricolores n’envisageait pas de scénarios où les épisodes de canicule deviendraient réguliers.
Pour parer au problème, EDF a initié une réflexion autour de l’adaptation des centrales nucléaires pour faire face à la canicule. L’énergéticien mène actuellement un chantier à grande échelle pour déterminer, au cas par cas, les modalités d’adaptation des centrales. Ce chantier, qui s’intègre dans le calendrier des visites décennales des réacteurs de 900 MW, a commencé en juin 2019 avec la centrale nucléaire de Tricastin.
Outre l’aspect sécuritaire, le chantier d’adaptation à la canicule représente aussi un enjeu économique pour EDF. A l’été 2018, la production d’électricité avait dû s’interrompre dans deux centrales nucléaires françaises. A l’été 2019, ce sont cinq centrales nucléaires qui avaient vu leur exploitation perturbée par les vagues de chaleur. Cette année, EDF a déjà dû intervenir sur la centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne) pour réduire sa production, et sur la centrale de Cattenom (Moselle) pour prélever de l’eau dans une retenue afin de refroidir la centrale. Si le manque à gagner reste négligeable, il pourrait croître dans les années à venir si les vagues de chaleur deviennent plus fortes.
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