Ce mercredi 26 février 2020, la spécialiste de l’économie africaine Sylvie Rantrua a publié une enquête sur les bouleversements qui attendent le Mozambique suite à la mise en exploitation des considérables réserves de gaz naturel du pays. L’Etat devrait doubler ses revenus en une dizaine d’années, mais devra résoudre les problèmes de sécurité dans les zones d’exploitation.
Avec le gaz naturel, le Mozambique va devenu brutalement un « pays à revenu intermédiaire »
Le Mozambique va-t-il réussir à négocier le virage économique que lui promet l’exploitation gazière ? Voici une dizaine d’années que de considérables réserves de gaz naturel, les quatrièmes du monde après les Etats-Unis, le Qatar et l’Australie, ont été découvertes au Mozambique, en particulier dans la province de Cabo Delgado, l’une des plus pauvres et instables du pays.
Une enquête de la journaliste Sylvie Rantrua, pour Le Point, revient sur les enjeux et perspectives qu’ouvre la prochaine mise en exploitation de ce potentiel gazier. De nombreuses usines sont enfin en construction, après de considérables retards provoqués notamment par le manque d’expertise locale : « Côté État mozambicain, le processus menant aux décisions d’investissement a été extrêmement lent et parfois chaotique. (…) Le pays n’était pas préparé à de telles découvertes. Trois fois plus pauvre que la moyenne africaine, le Mozambique a dû faire face à un manque criant de cadres pétroliers dans la fonction publique », détaille Benjamin Augé, chercheur à l’Ifridans
La mise en service de ces puits devraient bouleverser le visage du Mozambique : « le pays accédera rapidement au rang de pays à revenu intermédiaire alors qu’il compte aujourd’hui parmi les plus pauvres au monde », pointent ainsi le Trésor français et le FMI. A partir de 2023, une croissance économique de 23% est attendue, avec 700 000 emplois, dont 15 000 directs et des recettes fiscales estimées, à terme, à 3 milliards de dollars. Soit un doublement des revenus pour l’Etat mozambicain !
Terrorisme islamiste dans la province gazière de Cabo Delgado
Au-delà des lenteurs de la mise en exploitation, d’autres défis attendent le Mozambique, notamment les problèmes endémiques de corruption. Mais c’est bien le terrorisme islamiste qui fait planer la plus grande menace sur l’exploitation du gaz. La province de Cabo Delgado est en effet la proie à des attaques régulières, qui sont passées en 2019 de une ou un par mois à une douzaine par mois. Elles ont provoqués plus de 500 morts et des dizaines de milliers de déplacés.
En février, un sous-traitant d’Anadarko a été tué dans une embuscade sur la route. Depuis, les chantiers sont protégés par l’armée. Dès lors, l’enjeu, pour le Mozambique, sera d’utiliser les revenus du gaz pour moderniser le pays et réduire la pauvreté et les tensions sociales, afin de pacifier le pays, en particulier cette province gazière.
Le 21 février 2020, Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires Etrangères français, s’était rendu au Mozambique pour négocier des contrats avec des sociétés françaises sur l’exploitation du gaz. Une visite épinglée par Reporterre, accusant le gouvernement de « double-jeu » sur les combustibles fossiles.
« Demain, Jean Yves Le Drian se déplace au Mozambique pour défendre les intérêts de l’industrie fossile française, soutenue par la puissance publique afin d’explorer des réserves de gaz et amorcer une nouvelle bombe climatique » https://t.co/f3TTNh3HfO
— Reporterre 🌍 | Le média de l'écologie (@Reporterre) February 20, 2020
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