Et si l’avenir du nucléaire passait (aussi) par des petits réacteurs modulaires appelés « SMR » pour Small Modular Reactors ? Une technologie révélée au grand public par EDF, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), Naval Group et TechnicAtome à l’occasion de la conférence générale de l’AIEA le 18 septembre 2019. Une nouvelle technologie nucléaire qui interroge, mais destinée à trouver rapidement sa place pour répondre aux besoins croissants en électricité bas carbone.
La famille des centrales nucléaires s’élargit à ses deux extrémités. Du côté king size, il y a l’EPR (de plus de 1650 MW) dont le deuxième réacteur de ce type au monde est entré en exploitation commerciale à Taishan (sud de la Chine) en septembre 2019. De l’autre côté, on retrouve le nucléaire de petite puissance avec les SMR. Ces réacteurs d’une puissance généralement inférieure à 300 (MWe) fonctionnent grâce à la fission de l’uranium (235, 238) ou du thorium (232). Leur puissance réduite en comparaison d’une centrale nucléaire classique ( de 900 à 1450 MW en France) constitue une réponse adéquate pour des régions isolées qui ne disposent pas ou peu d’un réseau de distribution électrique bas carbone.
Les SMR : un axe important du développement du nucléaire
Ce 17 septembre 2019, EDF, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), Naval Group et TechnicAtome ont dévoilé leur projet commun de petit réacteur modulaire à l’occasion de la Conférence générale de l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique à Vienne. Le SMR qu’ils souhaitent développer aura une puissance de 300 à 400 MWe et sera basé sur la technologie bien connue de réacteur à eau pressurisée (REP). Ce projet intitulé Nuward (« nu » pour nucléaire et « ward » pour forward, soit la notion de futur) étudiera la possibilité d’allier l’expérience des leaders de l’industrie nucléaire française en matière de réacteur à eau sous pression à celle de Westinghouse concernant le design du futur SMR.
Jean-Bernard Lévy, le PDG d’EDF, a salué cette dynamique et déclaré qu’EDF était « déterminée à mettre à profit toute son expérience pour faire de NUWARD un succès. Avec nos partenaires, nous sommes persuadés que le projet dévoilé aujourd’hui est un début prometteur d’une technologie sûre et compétitive qui élargira utilement la gamme de solutions de production d’électricité bas carbone proposée par la filière nucléaire française ». Un accord considéré par François Jacq, le président du CEA, comme une « nouvelle voie de coopération internationale avec les principaux acteurs du développement du nucléaire ».
S’il existe différentes technologies permettant la production d’électricité d’origine nucléaire de faible puissance, les projets les plus aboutis sont ceux qui fonctionnent par réacteur à eau pressurisée (technologie du parc nucléaire actuellement en exploitation en France). Le SMR peut alors est comparé à une centrale nucléaire miniature avec pour principale différence son architecture intégrée où la cuve du réacteur rassemble le cœur, les générateurs de vapeur, le pressuriseur et les pompes primaires, supprimant ainsi les boucles primaires et donc présentant des avantages sur le plan de la sûreté.
Un fort potentiel à explorer
L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a recensé une cinquantaine de projets de petits réacteurs modulaires à travers le monde dont seulement trois sont opérationnels. Aujourd’hui, la France est bel et bien dans la course avec le soutien de l’Etat. Cette mobilisation s’explique par les avantages de cette technologie et du potentiel énorme qui en découle. Dans le contexte de lutte contre le réchauffement climatique et donc de réduction des gaz à effet de serre, le nucléaire, source d’énergie bas carbone, fait partie des solutions. Dans les pays isolés où le réseau électrique est limité ou dans les pays qui souhaitent progressivement fermer leurs centrales au charbon (comme l’objectif de fermeture de 48,3 GW de centrales au charbon en Inde d’ici 2027), le SMR peut constituer une solution complémentaire ou alternative. De plus, le SMR a aussi pour avantage de limiter les déchets nucléaires grâce à son design intégré.
Selon l’agence pour l’énergie nucléaire (agence spécialisée de l’OCDE), le marché mondial potentiel des SMR pourrait représenter une puissance installée de 20 GW à l’horizon 2035. Sur le plan économique, le coût d’un petit réacteur modulaire est aujourd’hui difficile à déterminer. Selon la Société française d’énergie nucléaire (SFEN), il faut compter sur un investissement de l’« ordre d’un milliard d’euros » pour la construction d’un SMR. Un investissement vraiment utile ? Le besoin de décentralisation de la production d’électricité (bas carbone) a tendance à apporter une réponse positive. D’ailleurs, tous les experts sont d’accord pour dire qu’une production en série permettra de faire baisser les coûts et rendre ainsi les SMR moins chers et d’autant plus attractifs.
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