Après le retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire civil iranien le 8 mai 2018, beaucoup d’incertitudes pèsent sur le secteur de l’énergie. En effet, les sanctions de Washington contre Téhéran risquent de durablement bouleverser les relations internationales. En première ligne, les énergéticiens sont particulièrement concernés par les soubresauts de la politique américaine… D’abord car l’Iran est un important producteur et exportateur de pétrole, mais aussi parce qu’un accord sur le nucléaire a été signé avec l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique !
Malgré la montée en puissance des énergies renouvelables et l’attrait de l’Afrique pour le nucléaire, le pétrole reste une énergie stratégique. Depuis le pacte de Quincy, rappelle Matthieu Auzanneau, l’acquisition de réserves de pétrole hors des frontières américaines est devenue une priorité vitale pour l’administration de la première puissance mondiale. Et il en va désormais de même pour l’Union européenne…
Avec le retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire civil iranien, Donald Trump se retrouve isolé. En effet, ni la Chine, ni la Russie, l’Allemagne, la Grande-Bretagne ou la France, n’ont souhaité imiter le locataire de la maison blanche. Pour autant, cela n’a pas empêché ce dernier d’établir des sanctions le 5 novembre 2018. Parmi les secteurs touchés, le pétrole iranien est expressément visé. L’administration américaine cherche ainsi à déstabiliser l’Iran sur le plan économique. Cependant, les objectifs américains ont également des répercussions sur de nombreux pays européens qui achètent du pétrole à l’Iran. A titre d’exemple, le lundi 20 août 2018, Total a annoncé son retrait du projet South Pars .
En 2017, les pays de l’Union européenne ont acheté 20 % du pétrole iranien produit. Aussi, le manque à gagner pour l’Iran est de l’ordre de 8 milliards d’euros. De leur côté, les pays européens doivent trouver de nouveaux fournisseurs avec le risque de voir les prix monter en raison de l’embargo décrété par les Etats-Unis. L’Union européenne travaille donc à une solution pour continuer à importer le pétrole iranien.
Invité à Bruxelles, le Vice-président iranien, Ali Akbar Salehi, se montre confiant : « Les Européens ont des difficultés, mais il sont en train de mettre en place un mécanisme qui va faciliter les transactions financières et les ventes de pétrole ». Le mécanisme devrait être présenté prochainement, mais il impliquera uniquement les pays qui en feront la demande. Concrètement, il s’agit de « créer une entreprise enregistrée dans un des Etats membres qui permettra les transactions. Il faut la doter de capital et préciser sa gouvernance » avait déclaré en septembre dernier Federica Mogherini, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.
Bruxelles ne veut pas couper tous les ponts avec Téhéran. Et les enjeux sont effectivement de taille ! En effet, le commissaire Européen, Miguel Arias Cañete, estime que l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien est crucial pour la sécurité de l’Union Européenne et le reste du monde. C’est pourquoi, il a réaffirmé l’intention européenne de poursuivre la collaboration dans le nucléaire civil avec l’Iran. Pour rappel, l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (IAEA) considère que jusqu’à présent l’Iran a toujours tenu ses obligations dans le cadre de l’accord…