A l’occasion de son audition devant l’Assemblée Nationale en avril 2018, Jean-Bernard Levy, PDG d’EDF, est revenu sur les problèmes de production électrique rencontrés en 2017, au plus fort de la vague de froid. A cette occasion, il a notamment fait part des faiblesses rencontrées par le réseau électrique breton, où l’approvisionnement et l’adaptation du réseau restent problématiques. Il existe une vraie précarité énergétique au point qu’EDF et RTE ont fait de la Bretagne l’une des régions françaises à surveiller en cas de pic de consommation pour éviter tout black-out.
Une région complètement dépendante du réseau national
La Bretagne est l’une des régions de France où la consommation électrique brute est la plus faible : entre 10 et 20 Twh par an contre plus de 40 tWh en Aquitaine ou en Rhône-Alpes. Pourtant, depuis 2010, la consommation électrique de la Bretagne augmente chaque année. De 2010 à 2016, elle a progressé de 3,5%. Une évolution qui fait de l’approvisionnement électrique un problème encore plus urgent à résoudre.
Avec l’Île-de-France et la Bourgogne Franche-Comté, la Bretagne est l’une des trois régions françaises qui ne parvient pas à produire assez d’électricité pour couvrir ses besoins ; en 2017, elle a produit seulement 15% de son électricité consommée. Elle est donc largement dépendante des régions limitrophes pour son approvisionnement (les Pays de la Loire et la Normandie lui envoient une partie de leur production nucléaire). Mais ce mécanisme de capacité mis en place par RTE pour favoriser les échanges entre réseaux régionaux a une limite : en cas de pic de consommation, les régions dépendantes risquent le black-out. Un risque évité de peu en début d’année 2018, lorsque la vague de froid a touché la France…
Le réseau électrique breton a failli « tomber » en février 2018
Le mercredi 28 février 2018, à 19h16, la Bretagne n’est, en effet, pas passée loin du black-out. Selon Jean-Bernard Levy, lors de son audition devant l’Assemblée Nationale, c’est à cette heure précise que le réseau électrique français a enregistré son pic de consommation électrique le plus élevé depuis un an. La marge électrique n’était plus que de 400 MW, soit l’équivalent d’une centrale à gaz. Et face au risque de black-out, de l’aveu même du PDG d’EDF, le réseau électrique de Bretagne, le plus vulnérable de France, a bien failli « tomber ». Ironie du sort à l’heure de la transition énergétique, c’est grâce à la centrale à charbon de Cordemais, située à Nantes, que le réseau breton a tenu. Alors que de nombreux salariés étaient alors en grève, ils ont accepté de reprendre le travail pour maintenir la production de la centrale.
Aucune centrale nucléaire, mais un parc éolien en progression
Si la Bretagne a tant de mal à faire face à ses besoins électriques, c’est à cause d’une production locale très limitée. Par le passé, la région a compté une centrale nucléaire, à Brennilis, dans le Finistère, mais le site a été fermé en 1985 sans jamais être remplacé par une autre centrale nucléaire. Depuis 1966, une partie importante de l’électricité consommée par la Bretagne provient de l’usine marémotrice de la Rance : avec une puissance de 240 MW, elle assure 18% de ma production électrique annuelle.
Pour augmenter la production d’électricité, la Bretagne a fait le pari des énergies renouvelables, en investissement massivement dans la filière éolienne. Désormais, la région compte 505 éoliennes terrestres, pour une puissance totale de 826 MW. Ce pari de l’éolien s’est avéré payant. Le 28 février dernier, les éoliennes ont aidé le réseau électrique breton à tenir pendant le pic de consommation : elles ont fourni 10 000 MW à elles seules, soit l’équivalent de dix réacteurs nucléaires.
Un hiver 2019 incertain pour le réseau électrique breton
EDF et RTE ont déjà annoncé que pour l’hiver 2019, plusieurs pics de consommation étaient à attendre sur le réseau national. Mais le réseau électrique breton les supportera-t-il ? Pour lutter contre la vulnérabilité énergétique de la Bretagne, RTE a assuré la sécurisation du réseau électrique breton grâce à la création d’un « filet de sécurité » en 2017 : une liaison souterraine de 225 kV entre Lorient et Saint-Brieuc.
Par ailleurs, le gouvernement français a décidé, en 2011 de lancer la construction d’une nouvelle centrale à gaz en Bretagne, à Landivisiau, dans le Finistère. Mais le projet, confié à Direct Energie, n’avance pas, se heurtant à la forte opposition des habitants de la région. En avril dernier, le dossier a connu un nouveau rebondissement : Total serait sur le point d’acquérir 74,33% de Direct Energie, ce qui pourrait encore mettre en péril la construction de la centrale à gaz.
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