Eric Bataille : “Les annonces sur la RE2020 vont dans le bon sens"

Eric Bataille (AFPAC) : “Nous accueillons très favorablement les annonces du Gouvernement sur la RE 2020”

Afpac Eric Bataille RE 2020

L’Association française pour les pompes à chaleur a présenté ce jour des résultats 2019 “historiques” en termes de volume de marché. Alors que la future réglementation environnementale 2020 sera appliquée à compter du 1er janvier 2021, le Président de l’AFPAC réaffirme le rôle des pompes à chaleur pour atteindre les objectifs de décarbonation du bâtiment. Entretien.

  • Vous venez de dévoiler vos résultats d’activité pour l’année 2019. Quel bilan dressez-vous ?

En ce qui concerne les pompes à chaleur, nous avons obtenu des résultats exceptionnels en 2019. Ces résultats historiques sont liés à la politique de rénovation et aux politiques publiques qui ont été extrêmement volontaristes et fortes en 2019. L’AFPAC s’en est d’ailleurs félicité, tout en veillant à ce qu’elles ne produisent pas d’effets pervers en attirant des entreprises qui ne seraient là que pour des raisons financières. Nous mobilisons la filière sur ce point, en accord avec les pouvoirs publics, pour que les rénovations se passent dans l’intérêt du client, avec des solutions d’économie d’énergie pérennes dans le temps. Nous appelons de nos voeux la poursuite en 2020 de cette politique d’aide à la rénovation de solutions de chauffage énergivore.

Nous craignons que les plafonnements mis en place à partir du 1er janvier 2020 limitent les investissements, puisque la politique du gouvernement est essentiellement tournée à présent vers les ménages à revenus modestes. Pour des raisons budgétaires, le gouvernement a décidé que le reste à charge de ces foyers modestes devait être plus important en 2020 et a donc modifié les dispositions en fin d’année de façon un peu brutale. Quant aux ménages à revenus supérieurs, ils sont exclus de tout dispositif d’aide, ce qui nous inquiète.

La politique mise en place en 2019 a été extrêmement favorable et les résultats sont là. Nous comprenons les impératifs budgétaires, il faudrait néanmoins faire attention à ce que le nouveau système mis en place porte bien les mêmes effets. L’AFPAC continue ses efforts pour que l’ensemble de la filière accompagne cette politique de rénovation et ces aides publiques afin que les installations continuent de se faire dans de bonnes conditions de qualité et de pérennité de la performance.

  • Comment l’AFPAC a accueilli les annonces du gouvernement concernant les règles du jeu de la future réglementation environnementale 2020 ?

L’AFPAC a salué ces annonces positives pour le développement dans la construction neuve des solutions thermodynamiques, renouvelables et très bas carbone. Elles réaffirment la position française pour aller vers une énergie décarbonée et de sobriété énergétique, en ce sens, nous les accueillons très favorablement. Contrairement à d’autres associations ou organisations professionnelles, nous considérons que nous ne sommes pas compétents pour émettre un jugement de valeur sur le bon positionnement des valeurs de carbone de l’électricité ou du coefficient de transformation d’énergie primaire en énergie finale. Ce sont des débats qui nous dépassent largement. Il y a très certainement dans l’administration française des gens qui regardent ça de très près, qui ont fait beaucoup d’études préparatoires et consulté des parties prenantes pour fixer les valeurs. Pour nous, l’impact de ces décisions est positif.

Toutefois, cet impact ne sera pleinement positif que s’il est effectivement accompagné par une continuité dans la politique qui a été menée jusqu’à présent. En instaurant notamment une obligation de chaleur renouvelable et en veillant à maintenir les exigences de sobriété énergétique du bâtiment. C’est très important. La RT2012 a été mise en place avec une obligation d’énergie renouvelable effective sur les maisons individuelles, ce qui a permis notamment aux pompes à chaleur de s’y développer, pour chauffer ou produire de l’eau chaude sanitaire. Malheureusement, cette obligation d’un minimum d’énergie renouvelable n’a pas été retenue pour le logement collectif, et force est de constater que la part des pompes à chaleur y est aujourd’hui extrêmement marginale. S’agissant de solutions plus coûteuses que d’autres, et sont de fait peu utilisées sans levier réglementaire.

  • En quoi la pompe à chaleur a-t-elle sa place dans le bâtiment de demain ?

Les bâtiments neufs chauffés par pompe à chaleur sont très bas carbone. Le gouvernement a annoncé une baisse de l’impact climatique du kWh électrique utilisé pour le chauffage de 147 gCO2 (base carbone ADEME) à 79 gCO2 « afin d’être plus conforme à la réalité constatée ». Ceci va améliorer le bilan carbone des logements chauffés par pompe à chaleur qui étaient d’ores et déjà très bas carbone avec les conventions en vigueur. Les émissions d’un logement neuf chauffé par pompe à chaleur sont ainsi de l’ordre de 1 kgCO2/m²/an. L’utilisation d’une pompe à chaleur dans ces conditions est extrêmement intéressante pour l’atteinte des objectifs de décarbonation à horizon 2050. Compte tenu de la durée de vie des bâtiments, il est important qu’ils soient équipés dès maintenant de solutions très bas carbone, comme les pompes à chaleur, pour qu’en 2050, ces bâtiments qui existeront toujours puissent être conformes aux objectifs.

  • Est-ce que les pompes à chaleur sont aussi propices au confort d’été, volet réaffirmé dans le RE2020 ?

Les pompes à chaleur fonctionnent sur un principe thermodynamique qui repose sur l’échange des calories entre l’extérieur et l’intérieur. En hiver, on prend des calories à l’extérieur qu’on ramène à l’intérieur pour chauffer et en été, on fait l’inverse, on va prendre des calories à l’intérieur de la maison pour les évacuer à l’extérieur et donc de ce fait rafraîchir les logements. Les pompes à chaleur participent donc à la fois du confort d’hiver et du confort d’été.

  • En 2020, la France sera dotée d’une loi relative à la lutte contre le gaspillage et pour l’économie circulaire. Comment l’AFPAC anticipe cette échéance ?

L’AFPAC a élaboré un partenariat avec l’Institut national de l’économie circulaire il y a un peu plus de deux ans, donc très en amont de la loi qui paraîtra dans les semaines à venir. Nous avons confié une étude  à cet institut pour déterminer comment la filière pompe à chaleur pouvait s’inscrire dans un environnement d’économie circulaire, entendu que, dans la mesure où la pompe à chaleur récupère les calories extérieures pour les remettre à l’intérieur, elle s’inscrit déjà bien dans une démarche d’économie circulaire. L’enjeu porte aussi sur la conception des produits et leur utilisation pour avoir un meilleur bilan de cycle de vie, dans un cadre d’écoconception. Aujourd’hui, nous sommes dans la bonne direction, et les directives européennes nous y invitent. D’autre part, nous nous sommes lancés dans la caractérisation de l’empreinte environnementale des pompes à chaleur à travers les fiches PEP.

Nous travaillons aussi sur la fin de vie des produits. Nous participons à la filière de retraitement via nos éco-organismes. Aujourd’hui, la quasi totalité de nos pompes à chaleur sont ainsi traitées en fin de vie. En parallèle, différentes réglementations se sont succédé pour organiser la récupération des flux frigorigènes afin d’éviter leur largage dans l’atmosphère. La profession travaille d’arrache-pied pour réduire l’impact environnemental des gaz réfrigérants que nous utilisons dans les pompes à chaleur.

Enfin, il y a aussi tout un environnement plus complexe, que les spécialistes appellent “économie de fonctionnalités” qui tourne autour de concepts tels que la location longue durée et la vente de services pouvant faciliter la réparabilité et prolonger la durée de vie. Ce sont des concepts assez nouveaux qu’il convient de regarder et sur lesquels l’AFPAC va continuer à travailler.

Rédigé par : Eric Bataille

Eric Bataille
Président de l'AFPAC (Association française pour les pompes à chaleur)
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COMMENTAIRES

  • Sans parler des chauffages et chauffes-eau de type “grilles-pain”, pilotables ou pas, ou chaudière gaz que les réseaux bien installés continuent de vendre sans complexe malgré leurs déplorables performances, les pompes à chaleur telles qu’on nous les vend actuellement sont déjà une vieille technologie alors que l’on peut faire nettement mieux.

    Les réseaux de vente sont obsédés par le nombre de modules qu’ils vendent et de l’argent qu’ils vont encaisser mais pas par la performance globale de leurs procédés qui reste limitée.

    Sans parler des différentes méthodes de stockage solaire thermique inter-saisonnier qui s’appliquent au Nord de l’Europe ou du Canada, pourtant bien moins ensoleillés que la France, il est souvent possible de coupler solaire (thermique, PV et/ou hybride) avec du stockage longue durée comme le fait par exemple FHE Groupe avec Inélio en France.

    Suivant la surface solaire disponible en toiture, rapportée notamment au volume à chauffer ou refroidir, on peut couvrir les besoins à 100% tant d’une maison qu’un immeuble.

    Le Cop global grâce au solaire est évidemment bien meilleur que celui des seules pompes à chaleur nettement plus énergivores, donc nettement moins de consommation globale à l’année pour une durée de vie bien plus longue avec tous les avantages du solaire dont l’hybride (qui va permettre en plus par exemple de charger un véhicule électrique etc)

    Concernant des bâtiments importants, entre installer des pompes à chaleur à chaque appartement, ou une pompe à chaleur centrale au bâtiment ou relier le bâtiment à un réseau de chaleur fortement alimenté en solaire thermique, l’avantage d’efficacité comme à terme de coût va là aussi encore réseau de chaleur qui peut de plus utiliser toute source de chaleur ou froid perdue, différentes sources de géothermie locales, de stockage etc, mais surtout le solaire thermique y compris CSP dont les COP peuvent atteindre 80 (soit très au dessus des meilleurs Cop de pompe à chaleur)

    Dans les réseaux de chaleur 4e et 5e génération chaud et froid on obtient selon les études de terrain des Cop pratiques de 4,4 à plus de 7 contre moins de 3 pour ceux mesurés en pratique sur les pompes à chaleur individuelles et qui sont encore plus déplorables pour les chauffes-eau thermodynamiques qui coûtent cher comparé à leur bilan réel (Cop pratique souvent autour de 1,2)

    Exemple système Inélio (FHE Group) de couplage de tout type de solaire au stockage inter-saisonnier :

    https://full-home-energy.com/uploads/files/Inelio-energie_infiniment.pdf

    .

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  • Complément :

    Eurostat, a publié de nouveaux chiffres sur la consommation d’énergie pour 2018. Comme prévu, ces chiffres ne sont pas bons, l’UE dans son ensemble devant rater son objectif d’efficacité énergétique pour 2020 de 5 %. La mauvaise tendance générale est plus marquée dans les bâtiments et les transports, où la consommation finale d’énergie a augmenté de 8,3 % en 2014-2017 et de 5,8 % respectivement :

    La consommation d’énergie primaire dans l’UE était de 4,9 % supérieure à l’objectif d’efficacité pour 2020, tandis que la consommation d’énergie finale – au niveau du consommateur – était légèrement meilleure, avec 3,2 % de plus que le niveau de référence.

    Les chiffres ont à peine changé par rapport à l’année précédente. Alors que la consommation d’énergie primaire a diminué de 0,71%, la consommation d’énergie finale a légèrement augmenté, de 0,02% par rapport à 2017.

    Cela signifie que l’objectif d’efficacité énergétique de l’Europe est de plus en plus hors de portée.

    L’UE s’est fixé comme objectif de réduire la consommation d’énergie de 20 % d’ici 2020, mais elle n’a jamais réussi à atteindre cet objectif.

    La consommation d’énergie en Europe a augmenté pour la troisième année consécutive en 2017, éloignant l’UE de son objectif d’efficacité énergétique pour 2020.

    “L’Europe “consomme en fait plus d’énergie aujourd’hui que lorsque les objectifs d’efficacité ont été fixés pour la première fois en 2012”.

    La Pologne et l’Espagne sont les pires contrevenants, avec une augmentation de 13,7 % et 7,5 % respectivement par rapport à 2013.

    L’objectif d’efficacité fait partie d’un ensemble d’objectifs climatiques et énergétiques pour 2020 qui comprend également une réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre et un objectif de porter la part des énergies renouvelables à 20 % du bouquet énergétique de l’Union.

    La tendance générale inquiétante est plus marquée dans les bâtiments et les transports, où la consommation finale d’énergie a augmenté de 8,3 % en 2014-2017 et de 5,8 % respectivement.

    Et les projections pour 2030 ne semblent pas bonnes non plus. Selon la Commission européenne, les mesures d’efficacité énergétique actuellement prévues par les États membres de l’UE risquent de laisser un écart de 6,2 points de pourcentage par rapport à un objectif de référence de 32,5 % d’économies d’énergie pour 2030.

    Les plans nationaux en matière d’énergie et de climat ne permettront pas d’atteindre les objectifs, avertit l’UE

    Pour les défenseurs du climat, l’incapacité de l’Europe à atteindre l’objectif d’efficacité est le résultat d’une simple négligence politique.

    Lorsque la directive sur l’efficacité énergétique a été adoptée en 2012, les États membres de l’UE ont fermement résisté aux appels visant à faire de l’objectif de 2020 une obligation juridiquement contraignante.

    “Il y a toujours un manque évident de volonté politique dans l’UE bien que l’efficacité énergétique soit le fondement de la transition énergétique.

    La plupart des pays de l’UE étant sur le point de rater leur objectif d’efficacité énergétique pour 2020, certains ont même commencé à chercher des astuces statistiques pour gonfler leurs chiffres.

    Un nombre croissant d’États membres de l’UE prévoient d’utiliser des astuces comptables, notamment des modifications des taxes sur les carburants introduites dans le passé, pour prétendre à des économies d’énergie “supplémentaires” dans le cadre de leurs obligations climatiques européennes.

    A Bruxelles, la Commission européenne ne cache pas sa déception face aux chiffres.

    “Les États membres ont été invités à agir et à mettre en place de nouvelles mesures”. La Commission a mis en place “une task force dédiée” avec des représentants des gouvernements nationaux de l’UE afin de “mobiliser les efforts pour atteindre les objectifs de 2020”.

    Il est “essentiel” que les pays membres poursuivent leurs efforts dans le cadre des plans nationaux sur l’énergie et le climat où les gouvernements définissent des mesures politiques visant à atteindre les objectifs climatiques de l’Union pour 2030. Des mesures supplémentaires au niveau de l’UE seront envisagées si l’écart persiste.

    La Commission européenne a toujours de grandes ambitions dans le cadre de son “Green Deal” européen, qui vise à faire de l’Europe le premier continent neutre sur le plan climatique d’ici 2050.

    “L’efficacité énergétique d’abord” est un principe vital dans la transition vers une énergie propre”, a déclaré Kadri Simson, commissaire européen à l’énergie, aux législateurs du Parlement européen le mois dernier.

    L’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments sera “un point de départ évident”, le “Green Deal” européen visera à “tripler” le taux annuel de rénovation, qui s’élève actuellement à environ 1 à 2 % du parc immobilier.

    La consommation d’énergie de l’UE augmente malgré les objectifs de réduction de la demande dans toute l’Europe. Cela ne devrait pas être une surprise et s’explique principalement par la croissance du PIB.

    https://www.euractiv.com/section/energy/news/eu-way-off-the-mark-on-energy-savings-goal-latest-figures-show/

    .

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