Traumatisé par l’accident nucléaire de Fukushima survenu en 2011, le Japon a passé ces sept dernières années à se chercher une nouvelle stratégie énergétique. Confronté à l’hostilité de la population, les gouvernements japonais successifs ont dû abandonner le nucléaire pour se tourner vers d’autres solutions. Désormais, c’est l’hydrogène qui a les faveurs de Tokyo. Le Japon a décidé d’investir massivement dans le développement de l’hydrogène comme solution énergétique pour couvrir les besoins électriques mais aussi pour rénover le parc automobile national.
La fin du nucléaire japonais
En 2010 le Japon voyait encore l’industrie nucléaire comme la clef de voûte de sa stratégie énergétique. Le gouvernement espérait alors atteindre 50% d’énergie nucléaire dans son mix électrique en 2030. Dans un pays où la part d’électricité nucléaire n’était encore que de 29%, la création de nouvelles centrales nucléaires était alors une priorité. Mais la situation a changé le 11 mars 2011, lorsqu’un séisme suivi d’un tsunami a provoqué un accident nucléaire dans la centrale de Fukushima. Dès lors, l’opinion publique japonaise s’est montrée hostile au programme nucléaire japonais, et l’arrêt de nombreux réacteurs a été décidé.
En 2012, le gouvernement japonais s’est engagé à sortir du nucléaire d’ici 2040. Après le coup d’arrêt que l’accident de Fukushima a représenté pour l’économie nationale, le Japon doit faire face à de grands besoins en électricité. Des besoins qui ne peuvent pas être couverts avec seulement trois réacteurs nucléaires encore en activité actuellement (sur les 42 qui existent dans le pays). Et même si le Japon compte faire progresser la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique, la faible superficie de son territoire limite drastiquement le potentiel solaire et éolien. La solution est donc ailleurs.
Devenir une « société hydrogène »
Pour faire face à ses gros besoins énergétiques, le Japon a décidé d’investir massivement dans le développement de l’hydrogène grâce à l’importation. Le premier ministre, Shinzo Abe, promet de faire du Japon une « société hydrogène » en déployant l’hydrogène à l’échelle globale. Pour certains Japonais, la société hydrogène est déjà une réalité. Dans plusieurs éco-quartiers de Tokyo, 200 000 habitations ont été équipées avec les ENE-farms, des unités de production d’énergie branchées sur le réseau Tokyo Gas. Grâce à l’hydrogène qui les alimente, elles produisent de l’électricité et de la chaleur pour couvrir les besoins des habitations. Mais le déploiement de cette nouvelle solution est assez lent, principalement à cause du coût élevé de l’installation : 13 000 euros pour une ferme ENE.
Le projet Kawasaki Hydrogen Road est le meilleur symbole de cette volonté. Elle reliera l’Australie au Japon et devrait être inaugurée en 2020. Cette future route permettra d’alimenter le Japon avec une grande quantité d’hydrogène produit à partir des mines de charbon australiennes. L’hydrogène sera acheminé grâce à un gazoduc sous-marin ; les autorités maritimes du Japon et de l’Australie ont déjà signé un accord pour le réaliser.
Tokyo croit dans les voitures à hydrogène
L’hydrogène est également au coeur des préoccupations japonaises en ce qui concerne l’industrie automobile. En la matière, un duel à distance s’est installé entre la Chine, très intéressée par le développement des véhicules électriques, et le Japon, qui a fait le pari des véhicules à hydrogène. Le gouvernement japonais, qui ambitionne d’atteindre zéro émission de carbone, souhaite que les véhicules à hydrogène se démocratisent. Ces derniers sont de plus en plus nombreux en circulation dans l’archipel : ils devraient passer la barre des 40 000 immatriculations d’ici 2020, et le gouvernement espère passer les 800 000 véhicules en 2030. Le Japon a d’ailleurs lancé un programme pour développer le réseau des stations-service d’hydrogène : il en existe une centaine à l’heure actuelle, et 80 nouvelles stations devraient voir le jour d’ici 2021.
Mais plus largement, le Japon espère que son pari de l’hydrogène s’avèrera payant sur le marché automobile international. Honda, Toyota et Nissan, les trois constructeurs japonais, ont orienté leur stratégie de voitures vertes en misant sur l’hydrogène. En 2014, Toyota a été le premier constructeur à produire en série un véhicule à hydrogène avec sa Mirai. Mais le pari de l’hydrogène pourrait bien s’avérer très risqué : sur le marché mondial, ce sont les voitures électriques qui affichent, pour l’instant, les meilleures ventes.
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