En forte croissance ces dernières années, le tourisme mondial n’est pas sans conséquence pour le changement climatique du fait de la multiplication des transports et des biens consommés qu’il implique. Selon une étude publiée lundi 7 mai 2018 dans la revue Nature Climate Change, ce secteur d’activité représenterait actuellement près de 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, soit beaucoup plus qu’envisagé jusqu’à présent.
Une démocratisation touristique défavorable à l’environnement
Alors que le nombre de touristes dans le monde ne cesse d’augmenter (1,3 milliard de touristes ont voyagé en 2017 selon les chiffres de l’Organisation Mondiale du Tourisme), la facture pour le climat est elle aussi de plus en plus élevée. Largement sous-estimé jusqu’à présent, le bilan carbone du tourisme mondial serait en réalité beaucoup plus important qu’escompté et représenterait même près du dixième des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Selon une étude publiée lundi 7 mai 2018 dans la revue Nature Climate Change, l’empreinte mondiale du secteur serait passée de 3,9 à 4,5 gigatonnes équivalent CO2 (GtCO2e) entre 2009 et 2013, en augmentation de 15%, et pourrait atteindre entre 5 GtCO2e et 6,5 GtCO2e à l’horizon 2025 si rien n’est fait. « Le tourisme, vu sa croissance et son intensité carbone, va représenter une part de plus en plus grande des émissions mondiales de gaz à effet de serre », explique Ya-Yen Sun, de l’Ecole de commerce de l’Université du Queensland en Australie, et co-auteur de l’étude.
Toujours entre 2009 et 2013, les dépenses touristiques à l’échelle internationale ont augmenté de 2.500 à 4.700 milliards de dollars, affaiblissant d’autant les efforts marginaux consentis dans le sens d’un tourisme plus responsable. L’impact du tourisme sur le climat, qui provient pour une large part des pays les plus riches (les Etats-Unis par exemple affichaient la plus forte empreinte carbone touristique en 2013) est également en forte augmentation dans les régions aux revenus moyens qui voient progressivement les voyages touristiques se démocratiser. « Nous voyons la demande touristique venue d’Inde et de Chine croître rapidement, et nous nous attendons à ce que la tendance se poursuive au cours de cette décennie », poursuit Ya-Yen Sun.
Le transport aérien au centre des préoccupations
Mais outre la taille de la population, « ce qui est préoccupant est que les gens tendent à voyager plus loin, plus fréquemment, et par avion, avec des revenus accrus », souligne l’universitaire, insistant de fait sur la nécessité de réduire les émissions des transports. En effet, si l’impact du tourisme sur le réchauffement climatique provient aussi des biens et services consommés (logement, alimentation, shopping, etc.), le transport reste le poste le plus néfaste en terme d’émissions de gaz à effet de serre et représente, rien que pour les transports aériens, près de 20% des émissions touristiques. Les voyages internationaux et notamment les vols long-courriers comptent parmi les secteurs les plus florissants (le nombre total de passagers devrait doubler d’ici 2036 pour atteindre 7,8 milliards par an, selon l’IATA, l’Association internationale du transport aérien), alors que les émissions de CO2 du secteur aérien, qui représentent toujours près de 2% des émissions globales, n’entrent pas dans l’accord de Paris (COP21).
Si les compagnies aériennes ont malgré tout entamé leur transition vers un transport plus durable en adoptant en octobre 2016, lors de la 39ème assemblée de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), le gel des émissions de carbone dans les vingt prochaines années, et cela malgré la hausse de trafic prévue, « les progrès restent lents » et « les améliorations technologiques » en terme d’efficacité énergétique sont toujours insuffisantes. Dans ce contexte, imposer une taxe carbone ou un système d’échanges de quotas d’émissions aux services aériens pourrait bien se révéler indispensable « pour accroître la pression », estime Arunima Malik, de l’Université de Sydney.
La nécessité d’un tourisme plus responsable
Même constat du côté des usagers dont les pratiques n’ont guère évolué malgré les incitations à « voyager responsable » et les nouvelles technologies. « Les changements de comportement de la part des voyageurs (voyager moins, plus près de chez soi, ou même régler une compensation carbone) s’avèrent lents et marginaux », souligne Ya-Yen Sun, alors même que des solutions existent. Il est aujourd’hui possible de passer des vacances plus écologiques en partant moins souvent mais plus longtemps, ou en privilégiant les hôtels et campings certifiés par l’Ecolabel européen.
Renoncer aux offres commerciales pour des escapades de quelques jours à l’étranger par exemple (qui s’effectuent presque toujours en avion) et privilégier les séjours plus longs, permet de profiter davantage du pays visité et de limiter ses émissions de gaz à effet de serre. En parallèle, l’Écolabel Européen permet à la clientèle d’identifier les structures touristiques qui prennent des mesures écologiques strictes et quantifiées comme l’utilisation et l’achat d’énergie renouvelable (au moins 50% de l’électricité achetée doit être produite à partir de sources d’énergies renouvelables), la diminution des consommations d’énergie (via l’utilisation d’ampoules électriques de classe A par exemple), la préservation de la ressource en eau, l’achat de produits éco-responsables, la valorisation des déchets et la lutte contre le gaspillage, ou encore la sensibilisation des employés et des clients aux éco-gestes. Pour rappel, la France comptait en 2017 près de 264 établissements (hôtels, villages vacances, centres de vacances, centres de plein air, auberges de jeunesse, chambres d’hôtes, gîtes…) et 78 campings titulaires de l’Ecolabel européen.
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