Difficile à concevoir, mais c’est pourtant une bête réalité comptable. Au cours de l’année 2022, malgré la guerre en Ukraine, et les nombreux incidents techniques et géopolitiques qui ont impacté les livraisons de gaz russe… l’Europe a quand même importé 60 milliards de mètres cubes de gaz en provenance de l’Oural, peut-être même 70 milliards. Les données doivent encore être mises à jour pour savoir précisément quel volume de gaz russe est arrivé en Europe.
Ce volume semble impressionnant, et pourtant : en 2021, l’UE a consommé 400 milliards de mètres cubes de gaz, et sur le lot, plus de 40 % provenaient de Russie ! La dépendance au gaz russe a donc été considérablement diminuée, en un minimum de temps, essentiellement grâce aux importations massives de GNL, principalement en provenance d’Amérique du Nord.
Seulement voilà : les importations de GNL vont buter, courant 2023, sur plusieurs obstacles techniques insurmontables. Celui du nombre de méthaniers disponibles, celui du volume total de gaz qu’ils peuvent transporter, celui de la capacité des terminaux gaziers à les accueillir, et enfin, leur capacité à réinjecter le gaz dans les réserves. Et bien sûr, en amont, la limite technique de l’extraction et de la liquéfaction, imposent leur rythme à toute la chaîne derrière…
Résultat des comptes : l’Europe, même en fermant tous les robinets possibles, comme l’ont d’ailleurs déjà fait nombre d’industriels, en plus des particuliers, l’Europe donc, va manquer de gaz courant 2023. Non pas de gaz à consommer immédiatement, mais de gaz à stocker, pour passer l’hiver et le début de l’année 2024.
Quand saurons nous quel volume de gaz manquera à l’appel ? En réalité, il faut attendre que l’hiver s’achève : ce moment ou les flux s’inversent, et où le gaz retourne dans les réserves, plutôt que d’aller alimenter les chaudières des particuliers, des entreprises et les usines… C’est à cet instant précis que l’on pourra faire le point sur l’état des réserves, pays par pays. Ensuite, il sera possible de calculer assez finement, en fonction des différentes sources de gaz disponibles, à quel rythme les réserves pourront se remplir… pour atteindre quel niveau de remplissage. Pour l’instant, les prévisions tablent sur un trou de 30 milliards de mètres cubes en 2023, en tenant compte de toutes les mesures d’économies déjà activées, et de la destruction de demande anticipée.
Pour ajouter à ces prévisions un brin inquiétantes, comme toujours, il ne faut pas confondre stock et flux. Si l’Europe parvient, certainement en payant le prix fort, à acheter tout le GNL disponible de mars à septembre 2023, et même à atteindre des niveaux de remplissages de ses réserves honorables (au dessus de 80%), il lui faudra cependant… continuer à truster tous les méthaniers, et tirer à mort sur tous les gazoducs encore alimentés en octobre, novembre, décembre et après, afin de réussir à passer l’hiver 2023-2024. Sauf si, bien sûr, le général Hiver donne un nouveau coup de main l’an prochain, avec des températures anormalement clémentes… Et tant pis pour les amateurs de sports d’hiver !
COMMENTAIRES
A mon avis , il manquera bien plus que 30 milliards de M3.
La Russie, c’était 180 milliards de M3 en 2021.
si jamais ça tombe réellement à 0 en 2023.
Même avec une demande réduite par les faillites, les delocalisation, les plans d’économie et en substituant le gaz par le charbon et le nucléaire partout où c’est possible et même en recourant au GNL au maximum, il manquera au moins 100 milliards de M3.
Les réserves de gaz sont à 80 % en Allemagne à la fin janvier ( 25% de plus que la moyenne des 5 dernières années à la même époque, l’Europe n’aura aucun soucis à remplir ses réserves de gaz en 2024, l’Allemagne pourra dire merci aux PIGS qui vont faire passer énormément de gaz que ce soit du GNL ou via pipe ( ENI, repsol, total et autres boites, ils sont tous sur le pont )
Le gaz se traite actuellement à 56€ le MWh à deux jours de la fermeture du robinet Russe ( qui s’est déjà fortement refermé ce mois ci ), l’électricité à 100/150€, c’est très largement tenables …
Les catastrophistes en herbe sont en train de perdre et c’est tant mieux