L’optimisation des capacités de stockage électrique constitue un des enjeux fondamentaux de la transition énergétique au regard des perspectives de développement des énergies renouvelables intermittentes. Un défi sur lequel s’est penché l’institut allemand Fraunhofer IWES dans le cadre du projet StEnSea. Aussi ambitieux qu’innovant, ce projet de recherche scientifique propose un nouveau dispositif de stockage de l’électricité constitué de sphères géantes immergées en mer.
Energies renouvelables intermittentes et stockage de l’électricité
La part croissante des énergies renouvelables dans le mix électrique en France comme à l’international nécessite un développement corrélatif de solutions de stockage adaptées. Comme le rappelle l’Irena, l’Agence internationale pour l’énergie renouvelable, un taux de pénétration hypothétique de 45 % des énergies renouvelables dans le mix électrique mondial d’ici 2030, imposerait le mise en place de capacités de stockage évaluées à 150 GW de stockage par batteries et à 325 GW de stockage par stations de pompage. Des proportions considérables au regard des capacités actuelles mais qu’il faudra pourtant garantir pour pallier l’intermittence des productions solaire et éolienne et démocratiser l’usage des véhicules électriques par exemple.
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Mais parmi la multitude de procédés de stockage existants (stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), batteries, hydrogène, etc.), aucun n’a encore apporté la preuve de son efficacité à grande échelle, et la recherche poursuit son cours. De nombreuses universités et instituts technologiques tentent d’innover et de mettre au point de nouveaux moyens de stockage. C’est notamment le cas de l’institut allemand Fraunhofer IWES qui expérimente depuis le mois de septembre un système de stockage électrique en eau profonde unique an monde, baptisé StEnSEA.
Des sphères de stockage soumises à la pression de l’eau
Après plusieurs années de recherche, le projet StEnSea (pour « Stored Energy in the Sea ») est entré en phase de tests au mois de septembre dernier. Conçu par les professeurs Horst Schmidt-Böcking de l’Université de Francfort et Gerhard Luther de l’Université de Sarrebruck, ce système a été développé au sein de l’institut IWES (Institut für Windenergie und Energiesystemtechnik) dédié aux technologies éoliennes, et propose un ingénieux dispositif de stockage d’énergie basé sur la pression marine.
D’un point du vue technique, le stockage de l’électricité est réalisé via de grandes sphères (d’un diamètre optimal de 30 mètres) immergées au fond de l’eau et soumises ainsi à la pression marine. Connectées à une installation de production renouvelable (qui peut être onshore ou offshore dans le cas des énergies marines), ces sphères utilisent le surplus d’électricité produite pour éjecter, par le biais de pompes, l’eau qu’elles contiennent. A l’inverse, lorsque que la production faiblit, les sphères peuvent alors laisser rentrer l’eau à l’intérieur, activant ainsi une turbine productrice d’électricité.
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Un premier prototype d’environ trois mètres de diamètre a été immergé à une profondeur de 100 mètres dans le lac de Constance à la frontière entre la Suisse et l’Allemagne pour une période de quatre semaines. « Ce projet pilote à l’échelle 1:10 nous a permis de prendre différentes mesures tests afin de vérifier en détails l’ensemble des paramètres de construction et d’installation de la cuve, sa résistance à la pression, la conception du train d’entraînement, le système électrique de gestion et de contrôle, la modélisation dynamique et la simulation de l’ensemble du système », explique Matthias Puchta, chef de projet à l’institut Fraunhofer IWES.
Profondeur et capacités de stockage
Si ces premiers tests sont concluants, un programme d’expérimentation grandeur nature pourrait être prochainement voir le jour. L’objectif de l’institut sera alors de rechercher les sites appropriés en Europe permettant la mise en place d’un démonstrateur de 30 mètres de diamètre à une profondeur comprise entre 600 et 800 mètres.
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« Installés sur les fonds marins, ces centrales de stockage électrique peuvent être utilisées en eau profonde à haute pression », explique Horst Schmidt-Böcking, professeur émérite à l’Université de Francfort. Or, plus la profondeur de l’installation est importante et plus la capacité de stockage augmentera. L’institut évalue à ce jour une capacité de stockage possible à 20 MW par sphère de 30 mètres de diamètre installée à une profondeur de 700 mètres.
Crédits photo : IWES
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