L’écologie sociale face aux "problèmes de fin de mois et de fin du monde"

L’écologie sociale pour “combiner les problèmes de fin de mois et de fin du monde”

ecologie sociale claire monod

L’écologie est un thème porté par les responsables politiques depuis plusieurs années avec plus ou moins d’enthousiasme et de succès. Désormais incontournable dans le débat public, elle possède différents visages parmi lesquels on trouve l’écologie sociale. Un concept forgé dans les années 1960 aux Etats-Unis et qui rencontre un intérêt grandissant avec la prise de conscience actuelle de la relation entre les questions sociale et environnementale. Mais qu’est-ce que l’écologie sociale et quels sont ses enjeux actuels ?

Quels liens entre écologie et le social ? 

Les idées sont des puissances à l’épreuve du temps. Cela se vérifie avec l’écologie sociale, une théorie issue de l’esprit de l’Américain Murray Bookchin (1921-2006) lequel a notamment écrit un ouvrage intitulé Qu’est-ce que l’écologie sociale ? Une question toujours d’actualité plusieurs décennies après avoir été posée par l’écologiste libertaire américain. Influencée par les socialistes du XIXe siècle, cette théorie est notamment fondée sur le concept de communalisme (libertaire). La commune est la cellule privilégiée des échanges entre personnes et participant de leur transformation sociale. En d’autres termes, le local plutôt que le global afin de mettre en place une société plus saine et solidaire.

Le formidable mouvement de mondialisation qui a marqué les dernières décennies rend ainsi la question de l’écologie sociale pertinente. Comment vivre selon des principes écologiques forts dans une société plus décentralisée où la démocratie directe est la règle ? En France, une partie du mouvement des gilets jaunes s’est inscrit dans cette problématique de manière plus ou moins consciente, car à l’origine, c’est bien la taxe sur les carburants qui été l’élément déclencheur du mouvement. Les gilets jaunes ont alors été décrits comme réfractaires à l’écologie, ce à quoi certains comme Nicolas Hulot ont répondu qu’il fallait « combiner les problèmes de fin de mois et de fin du monde ».

L’expression s’est très vite imposée, car elle vise juste et reprend ainsi l’idée d’écologie sociale. Le concept s’entend bien, mais il reste radical dans la mesure où l’écologie sociale part du principe que la relation homme-environnement ne fonctionne pas bien, car la relation entre les êtres humains dysfonctionne. Dans ce schéma, il est indispensable de revoir cette relation homme-homme et de s’attaquer ainsi aux problèmes sociaux qui sont à l’origine de la relation destructrice qu’entretient l’homme avec la nature. L’articulation entre problèmes sociaux et environnementaux est aujourd’hui un point de réflexion important pour la gauche française qui se cherche une matrice peut-être pas neuve, mais tout du moins efficace.

Quels débouchés politiques aujourd’hui ?

Il y a quelques jours, le député PS Boris Vallaud s’interrogeait dans une interview sur la manière de « réussir le mariage de l’écologie et du social ». Le parlementaire croit trouver la réponse, en cette veille d’élections municipales, dans la politique suivie par les maires de son bord à la tête de villes importantes. La politique de la ville « c’est l’écologie sociale en action en termes de politique de logement, de mobilité, de lutte contre le gaspillage alimentaire… ». Un positionnement que peuvent faire nombre de responsables politiques de gauche à l’image de Claire Monod, coordinatrice nationale de Génération-s, et conseillère régionale d’Ile-de-France.

Dans une tribune co-signée avec Guillaume Balas (ancien député européen), elle assure que « l’écologie doit être la matrice de la reformulation des enjeux sociaux et démocratiques, vitaux du siècle pour acter la communauté de destin de l’humain et la planète ». Le réchauffement climatique et ses effets de plus en plus visibles peuvent aujourd’hui être l’élément déclencheur d’une réflexion profonde sur cette relation entre social et écologie. Les cartes sont redistribuées, mais sur le terrain politique, rien n’est simple, car tous ceux qui partagent la conviction qu’il faut changer de paradigme sont réticents à s’allier. Les Verts – en position de force depuis les européennes de mars 2019 – font cavalier seul et chaque écurie politique veut garder son autonomie et sa visibilité politique.

Ces bisbilles illustrent la difficulté de passer de la théorie à la pratique malgré les événements qui poussent à un changement sans précédent. Toutefois, si l’écologie sociale est aujourd’hui plus facilement appréhendable sur le plan conceptuel, aura-t-elle un réel débouché politique ? C’est notamment la question qui se pose avec des parlementaires français qui votent un accord de libre-échange avec le Mercosur et qui déplorent dans le même temps les conséquences sociales et environnementales de la mondialisation.

L’écologie sociale aura peut-être vraiment droit au chapitre au plus haut sommet de l’Etat quand elle aura perdu de son aura de gauche. En effet, très marquée politiquement, le concept peut rebuter ceux qui ne se retrouvent pas dans des discours socialisants. Ce chemin est peut-être emprunté, car loin des grands noms de la gauche anarchiste et libertaire, l’Eglise catholique s’est également emparée de ce sujet notamment depuis l’encyclique Laudato Si’ publiée en juin 2015. Cette encyclique dont le sous-titre n’est autre que « sur la sauvegarde de la maison commune » est consacrée aux questions sociales et environnementales. On peut y lire qu’« après un temps de confiance irrationnelle dans le progrès et dans la capacité humaine, une partie de la société est en train d’entrer dans une phase de plus grande prise de conscience ». La conscience que les relations sociales doivent changer à l’aune des changements climatiques et que ces transformations doivent aussi accélérer les changements sur le plan des relations sociales.

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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