Le Maroc envisage de dessaler l’eau de mer par la voie nucléaire - L'EnerGeek

Le Maroc envisage de dessaler l’eau de mer par la voie nucléaire

Maroc_dessalement_eau_de_mer_nucléaireLes récentes déclarations de la Ministre déléguée marocaine chargée de l’Eau ont relancé les débats sur une possible désalinisation de l’eau de mer par énergie nucléaire. Confronté à un problème majeur de « Stress Hydrique », le Maroc voit en effet ses besoins en eau augmenter considérablement sans avoir les ressources pour y faire face. Un enjeu de taille auquel sera confronté l’ensemble des pays du Maghreb.

En proie à de fortes pénuries d’eau douce, le Maroc souhaiterait donc s’engager pleinement dans les techniques de dessalement massif de l’eau de mer et privilégierait dans ce but la technologie nucléaire.  S’il ne s’agit pour l’instant que d’hypothèses, une première réunion avec les membres du Comité de réflexion sur l’électronucléaire et le dessalement de l’eau de mer par la voie nucléaire (CRED) a bien eu lieu la semaine passée sous l’impulsion du ministre marocain de l’Energie, des mines, de l’eau et de l’environnement, Abdelkader Amara. Preuve s’il en était besoin, que les enjeux sont considérables et les inquiétudes réelles.

[stextbox id=”info”]Les techniques actuelles de désalinisation de l’eau de mer[/stextbox]

Alors que l’eau douce représente seulement 3 % des réserves mondiales en eau, et que certaines parties du globe en manquent cruellement, en Afrique et au Moyen-Orient notamment, il est de plus en plus souvent envisagé de profiter des vastes réservoirs que constituent les mers et océans de notre planète. Pour cela, un principe simple consiste à dessaler l’eau de mer afin de la rendre consommable pour les humains. Considérées jusqu’à présent comme trop coûteuses, ces techniques de dessalement  de l’eau reviennent aujourd’hui au goût du jour. Voyons ici les deux procédés les plus communs.

La distillation tout d’abord, consiste à évaporer l’eau de mer en la faisant chauffer par le recours à une énergie extérieure. Lors de ce processus, les molécules d’eau s’échappent tandis que les sels dissous et autres substances présentes dans l’eau restent en dépôt. Il suffit alors de diriger la vapeur d’eau dans une colonne réfrigérante qui permettra de la condenser et de récupérer une eau douce consommable. Exigeant un apport conséquent d’énergie pour la phase d’évaporation, cette technique s’avère assez coûteuse.

L’osmose inverse nécessite quant à elle de traiter au préalable l’eau de mer en la filtrant et en la désinfectant afin de la purifier des éléments en suspension et des micro-organismes qu’elle contient. Ce procédé consiste ensuite à appliquer à cette eau salée une pression suffisante pour la faire traverser une membrane semi-perméable, par laquelle seules les molécules d’eau peuvent passer. On obtient alors une eau douce potable. Contrairement à la distillation, ce procédé se réalise à température ambiante et ne nécessite pas de modification de l’état de l’élément de base. Demandant moins d’énergie, il présente donc un coût sensiblement inférieur.

Dans les deux cas, le dessalement de l’eau entraîne la formation de saumure, solution concentrée regroupant l’ensemble des sels minéraux et des micro-organismes contenus précédemment dans l’eau traitée. Cette saumure doit être fortement diluée avant d’être rejeté en mer au risque de favoriser la prolifération des algues.

[stextbox id=”info”]Le choix du nucléaire dans le processus de désalinisation[/stextbox]

Malgré le coût prohibitif de ces dispositifs, le Maroc, au même titre que ces voisins du Maghreb que sont la Tunisie ou l’Algérie, ne semble plus avoir le choix. L’utilisation de l’eau de mer pour subvenir aux besoins de sa population apparaît aujourd’hui comme une évidence et une priorité de développement technologique. La ministre chargée de l’eau, Charafat Afilal, a d’ailleurs déjà mis au jour les prévisions du gouvernement selon lesquelles la demande en eau au Maroc atteindrait 16,7 milliards de m3 en 2030 contre 13,7 milliards actuellement. Une explosion de la demande qui pose dès à présent la question de l’approvisionnement et de la préservation des ressources hydriques du Royaume.

Dans cette optique, la réalisation d’unités de dessalement des eaux d’une capacité de 400 millions de m3 par an a déjà été envisagé par le gouvernement marocain qui n’hésiterait pas pour cela à développer son parc nucléaire d’autant plus que le pays fait également face à une hausse de la demande en électricité, à laquelle elle doit pour le moment répondre par de coûteuses importations d’énergies fossiles.

Le projet marocain est  encouragé par l’agence internationale d’énergie atomique (AIEA) qui n’hésite pas à affirmer que l’option nucléaire pour dessaler l’eau de mer est à ce jour la plus économique. L’AIEA aurait à ce titre réalisé une étude sur les possibilités d’utilisation de l’énergie nucléaire pour dessaler l’eau dans les pays du Maghreb et les conditions de ces pays s’avéreraient alors assez favorables à l’implantation de centrales nucléaires de moyens volumes.

Ces centrales, facilement intégrables aux réseaux électriques locaux, seraient en capacité de proposer un coût de production oscillant entre 0.7 et 1 dollars par m3 d’eau douce produite, soit le coût le plus bas comparé aux autres énergies envisageables. On retrouve d’ailleurs ce système au Japon qui possède à ce jour, près de 10 stations de dessalement associées à des réacteurs à eau pressurisée, prévus à la fois pour générer de l’électricité et produire de l’eau potable. Entre 1000 et 3000 m3 d’eau consommable sont produits chaque jour.

Si le Maroc tend à s’engager vers la filière nucléaire pour alimenter une future technologie de désalinisation de l’eau de mer, le nucléaire n’est  cependant pas la seule alternative. En effet, une chercheuse de la faculté d’ingénierie de l’Université Nationale Autonome du Mexique (UNAM) aurait mis au point une méthode permettant de dessaler l’eau de mer par le recours à la seule énergie solaire et agissant selon le principe d’évaporation. Si cette technique de purification reste encore inapplicable à des quantités d’eau industrielles, elle pourrait toutefois être développée pour une utilisation individuelle.

Crédits photo : Walter J. Pilsak

Rédigé par : La Rédaction

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COMMENTAIRES

  • La solution la plus économique pour le dessalement de l’eau de mer est l’osmose inverse, celle qui consomme aussi le moins d’énergie.

    Pour cela, pas besoin de chaleur, de l’électricité suffit.

    On voit alors que dans un pays comme le Maroc, le nucléaire ne fait pas l’affaire, hors de prix comparé au solaire.

    http://energeia.voila.net/electri2/nucle_pv_maghreb.htm

    Et puis, un réacteur nucléaire qui entrerait en service après 2020 ne serait pas assuré de disposer de l’uranium nécessaire à son fonctionnement pendant toute la durée de vie annoncée par son constructeur.

    Beaucoup d’éolien réalisable aussi, en particulier le long des côtes du Sahara et pour un coût très inférieur à celui du nucléaire. Inférieur même à celui du “nucléaire historique” en France. Alors, pour le nucléaire nouveau …

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