Ce jeudi 27 août, TerraPower, une société d’énergie nucléaire fondée par Bill Gates, a présenté, conjointement avec son partenaire GE Hitachi Nuclear Energy, un projet baptisé Natrium. Il s’agit de petites centrales nucléaires avancées de 345 MW, équipées d’un dispositif de stockage et destinées à répondre à l’intermittence de centrales renouvelables, notamment éoliennes et photovoltaïque. Un projet ambitieux, mais qui suscite de nombreuses critiques.
Natrium, des centrales nucléaires de 345 MW avec une unité de stockage, pour soutenir les renouvelables
« D’ici 2050, nous verrons des centaines de ces réacteurs dans le monde entier, répondant à de multiples besoins énergétiques différents ». Les mots de Colin Levesque, CEO de TerraPower, la compagnie d’énergie nucléaire fondée en 2006 par Bill Gates, sont forts. Ils accompagnent la présentation officielle, ce 27 août 2020, de Natrium, un projet de « petites » centrales nucléaires, piloté conjointement par TerraPower et GE Hitachi Nuclear Energy.
🚨 News Alert 🚨
We are proud to announce the launch of the Natrium™ reactor and energy system architecture in partnership with @gehnuclear.
Learn more at our website: https://t.co/mkfeYsi5u5
— TerraPower (@TerraPower) August 27, 2020
En effet, là où un réacteur « conventionnel » offre en moyenne une puissance de 900 MW, les centrales Natrium ont une puissance réduite de 345 MW. Refroidies au sodium liquide, utilisant le réacteur à neutrons rapides conçu par TerraPower, ces centrales avancées coûteraient chacune environ 1 milliard de dollars. Un tarif extrêmement attractif.
L’objectif de TerraPower est de proposer une source d’électricité pilotable, qui pourrait venir soutenir des réseaux électriques se fournissant essentiellement en énergie renouvelable, notamment intermittente (photovoltaïque et éolien).
Dans ce but, chaque centrale serait équipé d’une unité de stockage par sels fondus. Elle permettrait de stocker l’électricité produite par le réacteur quand les sources renouvelables produisent assez. Cette électricité serait ensuite injectée dans le réseau les jours où la production renouvelable serait faible. Ces centrales deviendrait ainsi une variable d’ajustement de la production électrique. Elles correspondent ainsi parfaitement aux évolutions prévisibles des réseaux électriques, tout en fournissant une électricité largement décarbonnée.
Un projet complexe et critiqué
Chris Levesque a d’ailleurs précisé que la conception même d’une centrale Natrium lui garantirait une température plus basse qu’une centrale nucléaire conventionnelle, assurant une usure moindre. Selon le président du conseil d’administration de TerraPower, Bill Gates, Natrium est une innovation « extrêmement complexe, mais mon équipe a l’expertise, l’expérience commerciale et les ressources nécessaires pour développer des réacteurs viables ».
Le projet est d’ailleurs soutenu par PacifiCorp, propriété du conglomérat Berkshire Hathaway dirigé par Warren Buffett, et par Energy Northwest et Duke Energy. TerraPower et GE Hitachi Nuclear Energy cherchent actuellement d’autres partenariats, ainsi que le soutien du ministère américain de l’énergie.
Natrium a cependant été assez fortement critiqué. Certains évoquent un prix du kWh qui risquerait d’être très élevé, plus qu’avec une centrale nucléaire conventionnelle. D’autres rappellent les dangers du nucléaire, en particulier avec cette technologie globalement moins stable et utilisant de l’uranium davantage enrichi. Cela en ferait des cibles privilégiés en cas d’attaque militaire.
Edwin Lyman, directeur de la sureté nucléaire à l’Union of Concerned Scientists de Washington, expert en développement sécurisé du nucléaire, a notamment eu des mots très durs : « La dernière chose dont le monde a besoin, c’est d’un parc de réacteurs rapides refroidis au sodium », a tweeté l’expert.
Oh brother. The last thing the world needs is a fleet of sodium-cooled fast reactors. What this story doesn't say is this is likely an admission by @TerraPower that the traveling wave reactor won't work and the company is only going to pursue a conventional fast reactor instead. https://t.co/NEyjb5NQKD
— Edwin Lyman (@NucSafetyUCS) August 27, 2020
Par ailleurs, si TerraPower envisage dans un premier temps de développer Natrium exclusivement aux Etats-Unis et dans les pays disposant déjà d’un programme nucléaire militaire, la société envisage ensuite d’en installer dans des pays sans équipement nucléaire. Un risque au regard de la non-prolifération du nucléaire.
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