Quand la concurrence déloyale parasite la libéralisation du marché de l’énergie

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Le 17 octobre 2019, le Médiateur de l’énergie, Jean Gaubert, organisait une table ronde afin de mettre en perspective la libéralisation du secteur de l’énergie. Cet événement, abrité dans les locaux de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), a été l’occasion de faire le point sur les effets de la concurrence sur les prix, les investissements, la couverture du réseau et la qualité de l’offre en électricité et en gaz. Autant de critères, qui permettent d’ébaucher une réponse à la question posée en introduction par le consultant Wavestone, Clément Le Roy : comment mesure-t-on le degré d’ouverture du marché de l’énergie ?

État des lieux de la concurrence  

Pour Jean Gaubert, « le degré d’ouverture se mesure d’abord en comptant les gens qui ont changé d’opérateur ». Et en attendant la publication du baromètre 2019 du Médiateur de l’énergie, que sait-on précisément du marché de l’énergie dans la France d’aujourd’hui ? Selon la Commission de régulation de l’énergie (CRE), « au 31 mars 2019, 74 % des sites résidentiels et non résidentiels sont au tarif réglementé de vente d’électricité et 26 % sont en offres de marché (23 % auprès d’un fournisseur alternatif) ». Par ailleurs, à la même date « 63 % des sites résidentiels et non résidentiels sont en offres de marché pour le gaz (31 % auprès d’un fournisseur alternatif) et 40 % au Tarif réglementé de vente (TRV) ».

Dans l’édition 2018 du baromètre du Médiateur de l’énergie, on apprend également que « deux tiers des Français savent qu’ils peuvent changer de fournisseur d’énergie ». Au total, 1 Français sur 5 déclare avoir changé de fournisseur. Parallèlement, « 56% des foyers déclarent avoir été sollicités pour souscrire à une offre de fourniture d’électricité ou de gaz naturel (contre 36% en 2017) ».

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La concurrence n’est pas un long fleuve tranquille…

Un succès finalement très relatif pour des offres qui affichent des prix jusqu’à 10% moins chers que le TRV. Sur ce point d’ailleurs, le délégué général de l’association CLCV, François Carlier, cité dans le rapport d’activité du Médiateur, prévient : « le rabais promis de 10% se limite en fait à environ 6,6% ». Invité ce 17 octobre 2019 pour évoquer les conséquences de la libéralisation pour les consommateurs, le président de l’UFC-Que Choisir, Alain Bazot, déplore quant à lui une forte agressivité commerciale dans cette jungle tarifaire.

Ainsi, 8% des litiges reçus par le Médiateur de l’énergie concernent des contestations de souscription ou des mauvaises pratiques commerciales. Le 18 octobre 2019, Engie a une nouvelle fois été condamné à 900.000 euros d’amende pour démarchage abusif et dans l’ensemble, les ¾ des litiges recensés par le Médiateur sont liés à deux opérateurs : « Engie arrive en tête avec 44% des cas, suivi d’ENI avec 28% ». Dans le secteur des transports aussi, la concurrence rime avec agressivité. À en croire, Jean Ghédira membre du comité exécutif de SNCF Réseau et ancien de Keolis, « les appels d’offres sont parfois violents » !

Quelles conséquences pour les réseaux ?

En comparant la situation du marché de l’énergie, avec celle des télécoms et des transports, les échanges ont mis en lumière les spécificités des activités de réseau. Au niveau des investissements et des infrastructures de production, ces secteurs présentent cependant chacun leurs particularités. Par exemple, à l’inverse de la situation décrite par le Directeur général de la Fédération Française des Télécoms, Michel Combot, Jean Gaubert se félicite que la maintenance, le développement et la modernisation du réseau, tant pour le gaz que pour l’électricité, soient intrinsèquement financés par le réseau.

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ARENH et TRV gaz, où en sommes-nous ?

De même, le directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Pierre-Jean Benghozi, souligne l’importance de la régulation qui s’applique aux acteurs. À ce titre justement, le mécanisme d’Accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) est particulièrement remarquable. En effet, selon Alain Bazot, ce dispositif est inflationniste. Dans la revue de l’énergie de juin 2019, Jacques Percebois rappelle que l’ARENH a été adopté en juillet 2011, après les travaux de la commission Champsaur. Désormais, explique-t-il : « le tarif régulé est obtenu par empilement de divers coûts, la « part ARENH », le « complément marché », et les péages d’accès aux réseaux de transport et de distribution ».

Sur le marché du gaz, la disparition des TRV envisagée dans la loi PACTE a finalement été retardée par le Conseil constitutionnel. Au demeurant, après un moratoire sur les prix de l’énergie, et la baisse de 2,4% des TRV gaz en octobre, la tendance haussière va reprendre à partir du 1er novembre 2019, avec une augmentation de 3%  des TRV gaz annoncée par la CRE.

« Il est certain que la libéralisation du marché de l’énergie a fait naître un démarchage effréné, une certaine augmentation des prix [notamment dans l’électricité] et une complexité dans la relation entre les opérateurs eux-mêmes » conclut Jean Gaubert lors de ce débat.

 

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