Le Qatar a annoncé lundi 3 décembre 2018 qu’il quittait l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Un coup de tonnerre dans le monde de l’énergie dont les répercussions ne devraient pourtant être que marginales. En effet, le Qatar fait partie des plus petits producteurs de pétrole de l’OPEP. Il tire la majeure partie de ses richesses de l’exploitation et l’exportation de gaz naturel. Par ailleurs, cette décision qui se veut « stratégique », n’est pas dénuée d’arrière-pensées politiques…
Le nouveau ministre qatari de l’Energie, Saad Al-Kaabi a marqué les esprits à l’occasion d’une conférence de presse organisée à Doha. Le responsable politique a annoncé le retrait du Qatar de l’OPEP, « avec effet en janvier 2019 ». Cette décision est au moins un signe de défiance vis-à-vis d’une Organisation largement influencée par l’Arabie Saoudite. Une OPEP au sein de laquelle le Qatar pèse très peu puisqu’il n’est que le 11e producteur de pétrole parmi les 15 états membres.
Le Qatar n’est même que le 17e producteur de brut au niveau mondial. Il assure à l’heure actuelle une production moyenne de 600 000 barils/jour. Ce petit Etat de la péninsule arabique ne détiendrait qu’environ 2 % des réserves mondiales de pétrole loin derrière l’Arabie Saoudite dont les réserves estimées sont au moins dix fois plus importantes. La position du Qatar a donc débouché sur une décision « technique et stratégique ». Le ministre qatari de l’Energie a expliqué la rupture en ces termes : « investir des efforts, des ressources et du temps dans une organisation dans laquelle nous sommes un très petit acteur et dans laquelle je n’ai pas mon mot à dire sur ce qui se passe… cela ne fonctionne pratiquement pas, alors pour nous, il vaut mieux nous concentrer sur notre grand potentiel de croissance ».
Un « potentiel de croissance » qui n’est autre que le gaz naturel. Le Qatar est le premier exportateur de GNL avec 77 millions de tonnes par an. Un chiffre qui lui assure près d’un tiers du marché mondial. La stratégie de concentrer les efforts de développement dans ce secteur (sans toutefois arrêter sa production de pétrole) peut s’entendre. Mais cette inflexion est aussi et peut-être surtout le fruit d’une crise politique entre le Qatar et son voisin saoudien.
L’Arabie Saoudite voit d’un mauvais œil le rapprochement entre l’Iran et le Qatar. Aussi, elle accuse régulièrement le petit Etat du golfe persique de financer le terrorisme. Une accusation qui a amené Ryad a fermé ses frontières terrestre et maritime avec le Qatar. Le pays est sous embargo de la coalition menée par l’Arabie Saoudite et qui comprend Bahreïn, les Emirats arabes unis et l’Egypte. En quittant l’OPEP qu’elle avait rejoint en 1961, soit un an après sa création, le Qatar signifie également qu’il n’entend pas se plier aux décisions de l’Arabie Saoudite. Les autorités qataries démentent cette version plus géopolitique de la décision de ce retrait très symbolique.
Il est à noter que les cours du pétrole ne devraient pas évoluer sensiblement au cours des prochains jours sous l’effet de cette annonce. En revanche, l’accord en vue entre l’Arabie Saoudite et la Russie (pays non membre de l’OPEP) pour faire baisser la production de brut pourrait continuer à faire repartir à la hausse des cours qui ont connu leur plus forte chute depuis quatre ans lors du mois de novembre.