Si l’établissement d’un habitat sur la Lune ou sur Mars reste encore aujourd’hui de la science-fiction compte tenu de la distance et des conditions de vie sur place, un tel projet pourrait néanmoins être réalisable sur le plan énergétique. Des scientifiques de la NASA, aux Etats-Unis, ont dévoilé mercredi 2 mai 2018, les contours d’un nouveau réacteur nucléaire miniature parfaitement adapté aux conditions extrêmes des voyages spatiaux lointains.
Freinée par le manque d’énergie et les quantités de carburant faramineuses qui sont nécessaires pour voyager et vivre dans l’espace, l’exploration spatiale pourraient bien repartir de l’avant si l’on en croit les avancés réalisées aux Etats-Unis, au sein du Glenn Research Center de la NASA. A l’occasion d’une conférence de presse organisée mercredi 2 mai 2018, l’équipe du projet Kilopower, mené en partenariat avec le ministère fédéral de l’énergie, a dévoilé les résultats d’un essai réalisé précédemment au Nevada dans le cadre du programme de recherche Kilopower Reactor Using Stirling Technology (KRUSTY). L’objectif ici était de tester un tout nouveau réacteur nucléaire « portatif » capable de produire de l’électricité de façon fiable en déplacement et de fournir ainsi une source d’énergie utilisable dans l’espace. « Nous devons penser aux ressources nécessaires pour rester et explorer. Au fur et à mesure que nous avançons dans le système solaire, il arrivera un moment où le transport de tous les matériaux nécessaires ou la tentative de réapprovisionnement deviendra dangereux. À ce stade, nos explorateurs devront être en mesure de générer leurs propres ressources, comme l’eau, l’oxygène et le carburant de fusée », explique Janet Kavandi, directrice du Glenn Research Center.
Entamée en novembre 2017, cette campagne expérimentale aura duré près de cinq mois pour s’achever en mars 2018 par un test de 20 heures à pleine puissance dans le but de confirmer les performances prévues. Le système utilisé dans ce cadre avait été conçu pour reproduire des conditions identiques à celles d’un voyage spatial et le succès a été au rendez-vous. Tout au long de l’essai, Kilopower a répondu ou dépassé les attentes des chercheurs, produisant plus d’énergie thermique à l’état d’équilibre que prévu et maintenant des températures stables dans des conditions plus extrêmes. L’unité d’essai a produit plus de 4 kilowatts de puissance à une température de fonctionnement de 800 degrés Celsius et un rendement de conversion de puissance de 35 %, et le fait de couper le refroidissement du système ou de l’amener à son niveau maximal n’a entraîné un changement de température à cœur d’à peine 15 degrés. Cette expérience a finalement démontré que le système Kilopower était capable de produire de l’électricité à partir de la fission de l’uranium de manière sûre et fiable, et cela même en cas de réductions de puissance, de pannes de moteur et de ruptures de caloducs.
Dans les faits, le noyau du réacteur à fission Kilopower est composé d’uranium 235. Il ne mesure que six pouces de diamètre, mais peut fonctionner pendant au moins dix ans, ce qui représente au minimum dix ans de puissance de 10 kilowatts, soit assez pour alimenter en énergie plusieurs ménages. Quatre ou cinq réacteurs Kilopower associés permettraient alors selon ces scientifiques de faciliter les missions d’exploration spatiale et d’alimenter des avant-postes situés sur d’autres planètes comme la Lune, Mars, voire même au-delà. « La taille compacte et la robustesse du réacteur Kilopower nous permettent de livrer plusieurs unités sur un seul atterrisseur à la surface qui fournit des dizaines de kilowatts de puissance », précise Steve Jurczyk, administrateur associé de la NASA.
Indépendant de l’énergie solaire, ce prototype pourrait même être utilisé sur des planètes moins ensoleillées que les nôtres, dans des régions ombragées ou pendant des tempêtes de poussière qui bloquent la lumière. Pour exemple, rien que sur la lune, les nuits durent généralement 14 jours empêchant un système électrique solaire de fonctionner en continue, tandis que sur Mars la luminosité est bien moindre que sur la Terre. « Cette technologie peut être utilisée pour explorer notre système solaire comme jamais auparavant », poursuit Janet Kavandi.
Si les essais réalisés jusqu’à présent ont déjà fourni des informations précieuses sur ses capacités, et notamment sa capacité à rester fonctionnel sans intervention humaine quotidienne, ce réacteur devra néanmoins être testé en vol avant une éventuelle utilisation par la NASA dans le cadre d’une mission spatiale de court terme, puis de long terme. Ces nouveaux essais devraient intervenir dans les 18 prochains mois, période durant laquelle les chercheurs du Glenn Research Center devront déterminer les conditions nécessaires pour pouvoir concevoir, construire, certifier et faire voler le réacteur Kilopower dans les plus brefs délais et à moindre coût.
Crédits photo : NASA