En novembre 2023, les Émirats arabes unis accueilleront à Dubaï la COP 28. Pourquoi Dubaï ? Car les Émirats sont un pays très actif dans la transition énergétique respectueuse, selon les préconisations du GIEC. Le pays s’est doté d’une stratégie de long terme dont les piliers sont les énergies nucléaire et renouvelable.
Depuis le début des années 2000, anticipant sur l’épuisement des énergies fossiles, les Émirats se sont engagés à réduire leurs émissions carbones. Dès 2006, les EAU deviennent le premier pays du golfe à adopter une politique de diversification des énergies via l’Abu Dhabi Economic Vision 2030[1]. En 2017, la stratégie énergétique 2050 va plus loin, en visant à décarboner 50% de son mix énergétique, dont 70% du mix électrique. Le pays vise une production composée de 6% d’énergie nucléaire, 44% d’énergies vertes, 12% de charbon propre (par le biais de systèmes de capture du carbone) et 38% de gaz naturel. Enfin, en 2021, lors de la COP26, le pays renouvelle son engagement climatique de réduction des émissions de carbone de 30% afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Cette politique a incité d’autres pays du golfe à emprunter la même voie. En 2009, le Koweït décide de lancer une réflexion sur le développement de l’énergie nucléaire avant de signer un accord de coopération avec le Royaume-Uni en 2011[2]. Toutefois, les Printemps arabes et le coût du projet
dissuadent, in fine, les autorités, qui abandonnent le projet en 2016[3].
Les Émirats, champion de l’énergie verte dans le golfe
Dopée par la croissance démographique, la croissance de la demande énergétique est de 9% par an aux Émirats : e à la désalinisation de l’eau. Ces besoins justifient une politique énergétique active et climato-responsable. Ainsi, le pays à la volonté de se positionner comme un leader mondial des énergies vertes.
Dans cette optique, les engagements politiques ont été suivis d’investissements conséquents. En 2022, six projets d’une valeur de 1,66 milliard de dollars étaient en cours de développement. Récemment, les États-Unis ont signé un accord d’investissement de 20 milliards de dollars avec les EAU pour financer 15 GW de projets d’énergie renouvelable dans les deux pays[4].
Ces investissements visent à soutenir des projets qui contribuent à la diversification énergétique du pays. Dans ce pays au climat désertique, l’énergie solaire représente une manne incontournable. Les Émirats arabes unis ont donc entrepris le développement de plusieurs grands parcs solaires de grande ampleur. Dernièrement, les Émirats ont lancé un appel d’offres pour le projet du parc solaire d’Al-Ajban, d’une capacité installée de 1,5 GW[5]. Encore plus ambitieuse, la centrale solaire Mohammed ben Rachid Al Maktoum, opérationnelle depuis 2013, vise à atteindre une puissance installée de 5 GW d’ici à 2030. Si l’Arabie saoudite se dirige également vers le développement des énergies renouvelables, elle n’a pas encore atteint l’ampleur des projets de son voisin.
Développer le nucléaire pour soutenir le renouvelable
Dans ce contexte, les Émirats arabes unis ont été les premiers dans le golfe à se tourner vers l’énergie nucléaire. Le développement de l’atome est considéré comme une solution pour compenser l’intermittence des énergies renouvelables. Cette approche est réaliste et conforme aux recommandations du rapport du GIEC, qui précisait en 2022 : « Il est peu probable que tous les systèmes électriques à faible émission de carbone dans le monde reposent exclusivement sur des sources d’énergie renouvelable »[6]. Bien qu’il soit recommandé de développer les énergies renouvelables telles que le solaire et l’éolien, le nucléaire joue un rôle essentiel en contribuant à la production d’eau et à la production d’électricité décarbonée ou bien d’hydrogène.
Dès 2009, le pays adopte un plan de développement durable qui inclue un volet nucléaire. La même année, un contrat est signé avec la société coréenne KEPCO pour la construction, à Barakah, de quatre réacteurs APR d’une capacité de 1,4 GW chacun[7]. Depuis 2021,trois réacteurs sur quatre ont été mis en service commercial. À terme, l’énergie nucléaire devra fournir 25% du mix électrique du pays.[8].
La diversification énergétique du pays est progressive. En 2023, le mix énergétique est composé à 90% de gaz fossile, de 7% d’énergie nucléaire, et de 3% d’énergie solaire [9]. En comparaison, le Koweït dépend entièrement des énergies fossiles, qui représentent 100% de son mix énergétique actuel[10].
Les Émirats arabes unis se positionnent aujourd’hui en tant que leaders de la région du golfe dans leur politique de diversification énergétique. Alors que le Koweït a abandonné son projet nucléaire, l’Arabie saoudite s’est lancée tardivement, en 2018, en prévoyant une mise en service pour 2036. Les Émirats arabes unis ont donc pris une longueur d’avance sur leurs voisins du golfe, mais aussi vis-vis de certains pays européens. En comparaison, la Suède, pays nucléarisé, et longtemps considéré comme exemplaire, n’a relancé une stratégie nucléaire que cette année. Le programme des Émirats s’appuie ainsi sur une volonté politique qui pourrait servir d’inspiration en Europe.
[1] https://www.actvet.gov.ae/en/Media/Lists/ELibraryLD/economic-vision-2030-full-versionEn.pdf
[3] https://gulfbusiness.com/kuwait-scraps-nuclear-power-plans/
[5] https://www.pv-magazine.com/2023/01/19/uae-utility-opens-bidding-for-1-5-gw-of-solar/
[6] Rapport du GIEC 2022, p1071
[8] https://www.enec.gov.ae/barakah-plant/
[9] BP Statistical Review of World Energy 2022
[10] Kuwait Energy Outlook 2019
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