Le fonctionnement des centrales nucléaires n’est que très peu affecté en cas de canicule. Et lorsque leur puissance est modulée à la baisse, c’est avant tout par souci de préservation de l’environnement. Explications.
C’est la plus grande centrale nucléaire des Etats-Unis. Palo Verde est exploitée par Arizona Public Service, au beau milieu du désert, non loin de la ville de Phoenix. Autre particularité, et non des moindres, c’est aussi la seule des Etats-Unis à ne pas avoir été installée à proximité d’un fleuve ou d’un littoral. Elle est équipée de trois tours aéroréfrigérantes à tirage mécanique par réacteur et utilise, pour son refroidissement, des eaux en provenance de Phoenix. Aux Émirats arabes unis aussi, on a fait le choix d’installer la première centrale nucléaire du monde arabe en plein désert, à Barakah.
Centrale nucléaire et canicule sont-elles incompatibles ?
Ces deux centrales sont installées au cœur du désert et pourtant, elles sont opérationnelles. Contrairement à une idée reçue, les centrales nucléaires peuvent tout à fait fonctionner sous de fortes chaleurs. Récemment, c’est Jean-Luc Mélenchon, leader de la Nupes, qui soutenait le contraire au micro de France Bleu. « Il se trouve que le nucléaire ne fonctionne pas quand il fait chaud. »
Derrière cette croyance se cache une crainte : que les fleuves asséchés par les canicules ne soient plus en mesure de refroidir les réacteurs et que la sécurité des centrales soit mise en péril. Le débit des fleuves diminuant en période de canicule, l’eau chauffera davantage. Et si les centrales prélèvent l’eau pour leur système de refroidissement, les rejets chauffés de plusieurs degrés par les condenseurs peuvent perturber les écosystèmes locaux. D’autant plus si le débit est plus faible et donc la dilution moins efficace. C’est pourquoi l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a fixé des seuils de température à ne pas dépasser, et ce, pour chaque centrale. Certaines, plus particulièrement dans le Sud, sont donc amenées à limiter leurs productions en cas de fortes chaleurs.C’est pourquoi EDF peut parfois prendre la décision de procéder à une réduction de la production de ces centrales, comme à Saint-Alban près de Lyon, il y a quelques jours, lorsque le débit du Rhône est descendu à 330 m3/seconde par endroit.
De nombreux articles de presse traitent en été de la mise à l’arrêt de certaines centrales, établissant un lien de corrélation direct entre la hausse des températures et la sûreté des installations. Pourtant, la vague de chaleur qui a frappé la France la semaine dernière n’a conduit à l’arrêt d’aucun des 56 réacteurs que compte le parc nucléaire français. Si 27 d’entre eux sont effectivement à l’arrêt, c’est pour d’autres raisons : 12 rencontrent des problèmes de corrosion ; 15 sont en maintenance.
Préserver la faune et la flore
Les centrales nucléaires sont toutes équipées d’une seconde prise d’eau pour refroidir le réacteur en cas de panne du système central. En cas de canicule, ce n’est pas leur sécurité qui est en jeu, mais le respect de mesures règlementaires visant à préserver la faune et de la flore. Quel est l’impact des baisses de puissance liées à la chaleur ? Le Point rapporte dans un article publié le 17 juin dernier que « les pertes de production liées à la chaleur ont représenté 0,3 % du total d’électricité nucléaire produite ces vingt dernières années. Lors de la canicule de 2003, ces pertes ont représenté 1,2 % de la production. »
Tout porte à croire que ces périodes à régimes réduits seront plus fréquentes dans les prochaines années, à mesure que le réchauffement climatique s’accélère. Mais les centrales nucléaires sont a priori équipées pour pallier tout risque, font valoir les acteurs du secteur. Les réacteurs en bord de mer ou proches des fleuves à large débit fonctionnent en circuit ouvert. L’eau qu’ils prélèvent est ensuite directement rejetée dans des volumes suffisamment importants pour que cette eau réchauffée par la centrale n’impacte pas la faune et la flore, et donc sans qu’il soit nécessaire de limiter le fonctionnement en cas de forte chaleur, sauf exception.
Pour les centrales nucléaires en bord de fleuve et de rivières à faible débit, c’est légèrement différent. Celles-ci fonctionnent en circuit fermé. De très petites quantités d’eau (généralement 2 m3) sont prélevées, car c’est principalement l’air qui est utilisé pour refroidir les tours aéroréfrigérantes. L’échauffement des fleuves est alors de l’ordre de « quelques dixièmes de degrés », affirme Cécile Laugier, directrice de la production nucléaire en charge de l’environnement chez EDF, interrogée par Le Point.
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