Vers une grande refonte de la filière nucléaire française ?

Vers une refonte de la filière nucléaire française ?

La reconduction de Jean-Bernard Lévy annoncée jeudi 14 février 2019 conforte EDF dans sa stratégie. L’électricien va effectivement suivre une feuille de route qui reste ambitieuse pour le nucléaire, tout en développant les EnR électriques. Qui plus est, l’Etat souhaiterait procéder à un changement de structure d’EDF. Selon certaines sources proches du dossier, le nucléaire et les grands barrages pourraient repasser à 100 % sous contrôle public….

Une filière nucléaire à 100 % étatique ?

Le renouvellement du mandat de Jean-Bernard Lévy pour quatre ans à la tête d’EDF renforce l’entreprise. Il va maintenant pouvoir proposer une réorganisation du groupe. Parmi les pistes qui reviennent avec insistance, une restructuration de la filière atomique serait au cœur du projet souhaité par le gouvernement. L’idée serait de retirer le groupe des cotations boursières. L’Etat est aujourd’hui actionnaire à hauteur de 83,66 %. Il lui faudrait donc racheter les 16,34 % d’actions restantes pour revenir à une situation antérieure à 2005.

Un retour aux sources, mais seulement en partie, car si les centrales et grands barrages seraient contrôlés à 100 % par l’Etat, les autres énergies seraient regroupées au sein d’une structure dont l’Etat serait majoritaire, mais où une partie du capital serait placé en Bourse. Cette seconde structure abriterait également les activités de distribution et de commercialisation. Pour Jean-Bernard Lévy : ces “actifs (…) sont d’une toute autre nature d’investissement“. Il s’agirait ainsi d’une restructuration en profondeur, qui nécessiterait le rachat de 6 à 7 milliards d’euros d’actions. D’ailleurs, la décision de l’Etat de renoncer à son dividende en cash jusqu’en 2020 (cela était déjà vrai pour la période 2015-2017) peut être comprise comme une stratégie visant à récupérer une partie des actions qui lui font défaut. La journaliste en charge de l’économie au Figaro, Bertille Bayart, évoque une “recapitalisation silencieuse [qui] continue“.

Des obstacles lourds à lever

L’option d’une filière nucléaire à 100 % sous le contrôle de l’Etat est évoquée depuis plusieurs mois dans les coulisses du pouvoir. Cependant, la CGT redoute un « démantèlement » tandis que FO assure que « les agents sont attachés à une entreprise intégrée telle qu’elle existe aujourd’hui ». Pourtant, reprendre la main sur 100 % des actifs est avant tout une question de souveraineté. D’ailleurs, la gestion de ces actifs, qui s’inscrivent dans la très longue durée, nécessite des besoins importants en financements (51 milliards d’euros pour le grand carénage entre 2014 et 2025).

Le projet – si d’aventure il venait à être confirmé – ne va pas manquer de susciter certaines difficultés… Des remous pourraient également avoir lieu à Bruxelles où la Commission européenne veille au grain en matière de concurrence. 80 % de l’énergie produite en France serait alors issue d’actifs régulés. L’option paraît encore improbable aujourd’hui. Cependant, dans le grand tournant de la transition énergétique, rien ne doit être écarté. Les conclusions de Jean-Bernard Lévy devraient être présentées avant la fin de l’année 2019.

Rédigé par : La Rédaction

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COMMENTAIRES

  • Cette obligation d’adosser totalement le nucléaire aux Etats est un aveu de faiblesse économique face aux augmentations des coûts, pertes de compétitivité et risques à venir, comme entre autres pour Rosatom fondé par Vladimir Poutine.

    Jean-Bernard Lévy : “Certains actifs de production sont des actifs de souveraineté, des actifs qui s’inscrivent dans la très longue durée: quasiment un siècle entre la gestation d’un projet et le démantèlement des installations”.

    D’autres actifs sont “d’une toute autre nature d’investissement” en citant notamment les renouvelables, les services d’efficacité énergétique ou les réseaux.

    Cà rappelle d’une certaine manière l’histoire des Charbonnages de France ou “comment refiler la patate chaude” ! :

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Charbonnages_de_France

    .

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  • Au nom de quoi Bruxelles s’opposerait au projet français ?
    Il faut savoir qu’en Europe la plupart des parcs hydroélectriques sont sous contrôle de l’Etat.
    C’est en fait l’habillage juridique qui comptera le plus, et dans ce domaine nos experts semblent plutôt sous la ligne d’eau…

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