Les délégations des 197 Parties à la Convention Climat de l’ONU se retrouvent dans le cadre d’une nouvelle session formelle de négociations, à Bonn, en Allemagne, du 8 au 18 mai 2017. Ce nouveau rendez-vous a pour objectif d’évoquer et de poser les bases de la mise en œuvre concrète et rapide de l’Accord de Paris par les pays signataires, dans un climat bercé d’incertitudes depuis l’élection du Président américain Donald Trump, climato-septique affirmé.
Pour une application concrète de l’Accord de Paris
Fin 2015 à Paris, 195 pays (auxquels s’est ajoutée depuis la Palestine) et l’Union européenne sont parvenus à sceller un accord pour lutter contre le changement climatique, dans le but de limiter la hausse de la température moyenne « bien en deçà de +2°C« , et « si possible à +1,5°C » par rapport à l’ère industrielle. Ce combat contre le réchauffement progressif implique notamment une transition énergétique radicale aux dépens des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz), gros émetteurs de gaz à effet de serre.
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Pour s’assurer de l’application concrète des engagements pris par chaque pays, de nouvelles réunions techniques sur les règles d’application de l’accord ont débuté lundi 8 mai à Bonn en Allemagne. Problème, si les enjeux des négociations sont ici considérables pour l’avenir de l’Accord de Paris et de la planète en général, alors que les effets du réchauffement climatique inquiètent de plus en plus, le principal sujet de conversation tourne, depuis l’ouverture du sommet, autour des Etats-Unis et de la nouvelle politique environnementale de Donald Trump. Le Président américain, en fonction depuis maintenant six mois, soutient sans aucune ambiguïté, l’exploitation des énergies fossiles, et prévoit de ne plus contribuer ni au Fonds vert pour le climat, ni au financement de la Convention climat de l’Onu (qui encadre les négociations), ni au Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec).
@ThoriqIbrahim: ‘Obviously, the speculation coming out of Washington is now at the top of our minds’ https://t.co/aR3XCT7Kxg #UNFCCC
— AOSIS (@AOSISChair) 6 mai 2017
Si le retrait des Etats-Unis de l’Accord de Paris n’est pas encore acté (Donald Trump doit annoncer sa décision d’ici la fin du mois de mai), nombreux s’inquiètent des répercussions d’une telle décision sur l’engagement des autres parties, et la concrétisation de l’accord à plus long terme. La réunion de Bonn (8-18 mai) « était supposée être très technique et apporter des précisions à l’Accord de Paris (…), mais la spéculation sur la position de Washington figure maintenant en haut de nos préoccupations », a déploré à l’AFP, Thoriq Ibrahim, le ministre de l’Environnement des Maldives, au nom des Petits états insulaires.
Les Etats-Unis, pas si indispensables que ça
D’autres se veulent toutefois moins alarmistes et remettent en cause pour cela le rôle moteur des Etats-Unis dans la lutte contre le changement climatique à l’échelle internationale. « Les Etats-Unis de Barack Obama nous ont beaucoup aidé pour construire l’Accord de Paris, mais l’avenir de la planète ne repose pas que sur leurs épaules », explique Laurence Tubiana, ex-négociatrice française et directrice générale de l’European climate foundation. Si l’ensemble de la communauté internationale attend avec intérêt, il est vrai, la prise de position des Etats-Unis, nombreux pays, émergents notamment, « analysent aussi les bénéfices d’une transition énergétique au regard d’autres éléments » comme la compétitivité de leurs entreprises, les ressources naturelles, ou l’impact sur la qualité de l’air.
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Cela crée effectivement « un contexte difficile », confirme Paula Caballero du World resources institute basé à Washington, mais « de nos jours, le leadership (pour l’action climatique) est très diffus », et d’autres pays sauraient prendre le relais si les Etats-Unis venaient à se retirer ou à ne pas respecter leurs promesses. En effet, outre le climato-scepticisme clairement affiché aux Etats-Unis et en Russie (la Russie est le seul gros pays pollueur à ne pas avoir encore ratifié l’Accord de Paris), certains grands émetteurs de gaz à effet de serre, comme la Chine ou l’Inde (respectivement 1er et 4e plus gros pollueurs), ont réaffirmé leurs engagements, dans le but de lutter contre la pollution de l’air et de réduire leur facture pétrolière. La transition vers une économie bas-carbone progresse de manière générale partout sur la planète, et près de 144 pays ont d’ores et déjà ratifié l’accord climatique, représentant plus de 80% des émissions de GES au niveau mondial. Un motif de satisfaction pour le gouvernement français qui considère, un an après sa signature officielle, le 22 avril 2016, l’Accord de Paris comme « irréversible ».
Pré-bilan en 2018 et manuel de l’Accord de Paris
Avec ou sans les Etats-Unis, les négociations se poursuivront donc jusqu’au 18 mai prochain afin de concrétiser dès 2020, les engagements pris à Paris. Pour cela, plusieurs dispositions doivent être approfondies dans le cadre de la rédaction commune d’un manuel (« rulebook ») du combat climatique spécifiant les informations à publier par chaque pays sur leur politique climatique, les types de projets inclus dans la comptabilisation des financements climats ou encore, la forme que prendra le bilan mondial des actions des pays prévu en 2023. Si la rédaction de ce manuel se fera progressivement jusqu’à la COP24 en Pologne, en 2018, les 1996 parties devront néanmoins décider durant cette session, quelle forme prendra le pré-bilan de 2018, prévu sur la base du volontariat et baptisé « dialogue facilitateur » (quelles informations fournir et quelle finalité ?).
Looking forward to May @UNFCCC meeting as opportunity to clearly advance implementation of #ParisAgreement https://t.co/GQewWfcx00 #SB46 pic.twitter.com/yY3rp4E7VL
— Patricia Espinosa C. (@PEspinosaC) 6 mai 2017
« Cette réunion va permettre aux gouvernements d’avancer clairement sur les règles pour mettre pleinement en oeuvre l’Accord de Paris« , a expliqué vendredi Patricia Espinosa, la responsable de la Convention climat de l’Onu. « Bonn n’est pas un moment de décision à proprement parler, mais un dialogue absolument nécessaire pour préparer la COP23″, a souligné de son côté Laurence Tubiana. La 23e conférence des parties (COP23) sera présidée par les Fidji et se déroulera à Bonn fin 2017.
Crédits photo : ONU Action Climat
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