A priori, rien ne semble lier l’observation des papillons à la recherche dans le domaine des énergies renouvelables. Et pourtant, la façon dont un petit papillon blanc dispose ses ailes pour se réchauffer a inspiré une équipe de chercheurs britanniques, qui y ont vu un moyen d’améliorer l’efficacité des panneaux solaires. Une façon de s’inspirer de la nature qui n’est pas nouvelle dans le milieu industriel, puisque d’autres innovations basées sur l’observation des êtres vivants ont déjà vu le jour au cours de ces dernières années. Ce que l’on a appelé le biomimétisme est peut-être la clé du développement d’énergies renouvelables plus performantes.
Le secret d’une énergie solaire plus efficace dans la position des ailes d’un papillon
Une étude réalisée par des scientifiques de l’université d’Exeter, publiée récemment dans la revue Scientific Reports a démontré qu’en orientant les panneaux solaires sous un certain angle, de 17 degrés exactement, on pouvait améliorer leur efficacité énergétique.
Tout est parti de l’observation d’un papillon amateur de choux, le piéride de la rave, bien connu des fermiers car il peut parfois ruiner les récoltes de ces légumes. Il s’avère que ce papillon vaut peut-être plus qu’un simple parasite. Il détient en effet une faculté étonnante, celle de pouvoir, par temps nuageux, décoller plus vite que ses congénères. En effet, avant de pouvoir voler, un papillon se chauffe les muscles dorsaux en utilisant l’énergie du soleil, et la piéride du chou y parvient plus rapidement. Cela est du, selon les scientifiques, à la façon spécifique dont il positionne ses ailes en forme de V. Celles-ci forment un angle à 17 degrés, qui lui permet de concentrer de façon optimale la lumière du soleil sur son thorax.
Partant de cette observation du domaine biologique, les chercheurs ont utilisé cette découverte pour l’appliquer au domaine de l’énergie solaire. Ils découvrent que, en effet, en orientant les panneaux réflecteurs de la même manière que les ailes de ce petit papillon, on améliore le rendement énergétique des cellules photovoltaïques.
Vers un nouveau matériau réflecteur de lumière ?
Mieux encore, la structure en écailles de ses ailes permet de réfléchir efficacement la lumière. Ainsi, en reproduisant une couche de cellules des ailes de l’insecte, on pourrait amener les cellules photovoltaïques à produire plus efficacement de l’énergie. Le rapport puissance/masse des cellules photovoltaïques s’en trouverait multiplié par 17.
A l’heure actuelle, le prix des panneaux solaires est assez élevé, et cela est du en partie aux cellules photovoltaïques, qui en constituent l’élément le plus coûteux. Des moyens de refléter la lumière sont à l’étude afin de diminuer la surface de cellules et de permettre de faire baisser le coût de l’énergie solaire. Les lentilles et autres miroirs peuvent convenir à cet effet, toutefois, leur poids ainsi que leur volume rendent leur utilisation complexe. C’est pour cela qu’un matériau conçu en reproduisant les cellules des ailes d’un papillon serait le bienvenu, il permettrait en effet de réfléchir efficacement la lumière tout en étant léger et maniable.
Tapas Mallick, principal auteur de l’étude, se félicite de cette découverte : « le biomimétisme dans le domaine de l’ingénierie n’est pas une nouveauté. En revanche, ce véritable travail multidisciplinaire donne des pistes pour développer une énergie solaire à bas coût, ce qui n’a pas été fait auparavant. »
La nature, source d’inspiration pour les énergies renouvelables
Dans le domaine de l’énergie solaire, des éléments de la nature ont déjà mis les chercheurs sur la piste de la production des éléments des panneaux solaires en produisant moins d’énergie. Des scientifiques de l’université de Californie ont ainsi découvert qu’une éponge marine est capable de récolter le silicium (l’un des matériaux qui entrent le plus souvent dans la composition des cellules photovoltaïques) présent dans son environnement naturel et de le façonner pour recouvrir leur corps, et ce à température et pression ambiante. Or, l’homme n’y parvient qu’en mobilisant de grandes chaleurs, et donc une quantité importante d’énergie. En s’inspirant de ces éponges, on pourrait découvrir une technique plus économe et moins consommatrice en énergie pour réaliser des panneaux solaires.
D’autres énergies renouvelables sont concernées par le biomimétisme, et les scientifiques rivalisent d’imagination pour faire de propriétés observées dans la nature de véritables innovations technologiques. Dans le domaine des énergies marines renouvelables, c’est la queue des poissons qui a inspiré un nouveau modèle d’hydrolienne à l’entreprise australienne BioPower System (photo ci-contre). Celle-ci ne dispose pas d’hélice, mais d’une véritable nageoire, battue par le courant dans un mouvement oscillatoire. Cette hydrolienne peu commune baptisée BioStream est capable de générer une puissance de 250 kW. L’entreprise a également repéré le potentiel énergétique des vagues et a développé un autre système, BioWave, qui produit de l’électricité en imitant le mouvement des algues. Un prototype pouvant générer une puissance de 250 kW est actuellement en cours de développement.
Les chouettes, quand à elles, ont été remarquées pour leur faculté à se déplacer silencieusement et pourraient être les inspiratrices d’éoliennes moins bruyantes, alors même que les riverains se plaignent à l’heure actuelle des nuisances sonores des aérogénérateurs. Des chercheurs de l’université de Cambridge ont étudié la structure de leurs ailes pour créer un revêtement dernière génération sur les pales d’éoliennes. Les oiseaux, naturellement maîtres du vent, détiennent peut-être le secret d’une énergie éolienne efficace. C’est en tout cas ce dont est persuadé l’entreprise Festo, qui a développé un prototype d’éolienne qui imite leur mouvement dans les airs, Le Dual Wing Generator (photo).
La nature demeure la véritable muse des scientifiques. A l’heure où l’on cherche des moyens de produire de l’électricité sans épuiser nos ressources naturelles, elle nous montre qu’il est parfaitement possible d’allier une production d’énergie performante et le respect de l’environnement.
Crédit photo : Jamain, BioPower Systems, Festo
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