Risque terroriste : les centrales nucléaires d'EDF sous haute surveillance

Risque terroriste : les centrales nucléaires d’EDF sous haute surveillance

Piscine-stockage-combustible-EDF

Des militants de l’ONG Greenpeace se sont introduits très tôt dans la matinée du jeudi 12 octobre 2017 sur le site de la centrale nucléaire de Cattenom en Moselle. Cette action qualifiée d’ “irresponsable” par EDF fait suite à un rapport de Greenpeace remis officiellement aux autorités deux jours auparavant. Des experts mandatés ont étudié différents scénarios d’attaque terroriste pouvant viser les centrales de l’Hexagone. Selon eux, des failles sécuritaires remettraient en cause la capacité de résistance des bâtiments combustible en cas d’attaque ou d’acte de malveillance. L’opérateur EDF s’en défend et détaille en réponse, les dessous des procédures de protection appliquées à ces sites industriels stratégiques.

Des bâtiments combustible à toute épreuve

C’est en 2015 que l’organisation de défense de l’environnement Greenpeace a commandé un rapport sur l’état des lieux de la sûreté des centrales nucléaires en France face à la menace terroriste. Deux ans plus tard, les sept experts indépendants internationaux mandatés par l’ONG, constatent “un déficit historique” en termes de protection des installations, matérialisé principalement sur la capacité de résistance des piscines d’entreposage des combustibles nucléaires.

Ces piscines de stockage, situées dans les bâtiments combustible de chaque centrale, accueillent les assemblages de combustibles usés et permettent leur refroidissement et leur confinement en toute sûreté en attendant leur transfert vers des centres de traitement spécialisés. Problème, ces piscines, qui peuvent contenir plusieurs centaines de tonnes de combustibles radioactifs, ne seraient pas suffisamment protégées et seraient, selon Greenpeace, “extrêmement fragiles face aux actes de malveillance”. Une démonstration vivement contestée par le directeur du parc nucléaire d’EDF. En réponse au journal Le Parisien, seul média à avoir pu consulter ce rapport, Philippe Sasseigne affirme que “tous les moyens sont mis en œuvre et de manière coordonnée, entre EDF et l’Etat” pour assurer la sécurité des centrales face aux nouvelles formes de menaces, et que les piscines de stockage bénéficient bel et bien d’un niveau de protection identique à celui des bâtiments réacteur.

Si les bâtiments combustible, situés à l’extérieur des bâtiments réacteur, ne disposent pas d’enceinte de confinement renforcée, ils n’en sont pas moins protégés contre les agressions naturelles (tempêtes, inondations, etc.) ou les actes de malveillance. “Si les structures du bâtiment combustibles ne sont pas aussi épaisses qu’autour du réacteur, c’est que la configuration géométrique ne le nécessite pas”, explique Philippe Sasseigne.
De par leur dimension, leur robustesse, l’épaisseur de leurs murs en béton internes et externes (conçus pour résister à l’impact d’un avion), les bâtiments forment un rempart tout aussi solide, renforcé qui plus est, par un dispositif de surveillance permanent, en vigueur sur tous les sites de production nucléaire. Quand aux toitures des bâtiments combustibles d’EDF, elles représentent une résistance suffisante pour éviter tout risque de perforation en cas de chute directe.

Un dispositif de surveillance et de sécurité renforcé

Les centrales nucléaires françaises, en tant que sites industriels stratégiques, sont soumises en effet à des procédures de contrôle et de surveillance très strictes orchestrées par le HCTISN (Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire) en collaboration avec l’énergéticien EDF. Outre la sûreté nucléaire et la radioprotection, ce volet sécurité prend en compte la prévention et la lutte contre les actes de malveillance ou de sabotage. La menace terroriste, est prise très au sérieux au sein de la filière et toutes les dispositions sont prévues pour faire face à de tels événements.

La résistance des installations nucléaires face à ces risques d’attaques extérieures est réévaluée en permanence et plusieurs centaines de millions d’euros ont déjà été dépensés ces trente dernières années pour améliorer la sécurité. Dans le cadre du plan de Grand Carénage, qui vise à prolonger la durée de vie des centrales d’une décennie supplémentaire, le groupe EDF prévoir par ailleurs d’investir plus de 700 millions d’euros d’ici à 2023, dans la formation des effectifs et l’installation de nouveaux matériels de haute sécurité (éclairage, clôtures, caméras, plots en béton contre les véhicules béliers…).

Tous les sites EDF ont toujours été ultrasécurisés filtrant les passages aux zones sensibles via un dispositif de sécurité très élaboré. Ils bénéficient par exemple d’un protocole d’accès extrêmement rigoureux qui impose le contrôle systématique des antécédents de chaque salarié ou prestataire souhaitant y travailler. Chaque année, quelque 100.000 enquêtes administratives sont ainsi réalisées auprès des 73.000 salariés (dont 23.000 chez les prestataires) travaillant dans les 19 centrales nucléaires.

Sur le terrain enfin, EDF dispose également de personnel dédié et formé à la protection des installations. Par ailleurs, il peut s’appuyer sur un peloton spécialisé de protection de la gendarmerie (PSPG) présent 24h/24 dans l’ensemble des centrales nucléaires françaises, ainsi que sur une surveillance quotidienne de l’espace aérien. C’est d’ailleurs cette unité de gendarmes qui a stoppé et interpellé 8 des 15 militants Greenpeace qui se sont introduits jeudi matin sur le site de la centrale de Cattenom, et ce avant qu’ils n’accèdent à la zone nucléaire. “Les militants de Greenpeace ont été détectés très tôt et ont été interceptés en moins de huit minutes par les gendarmes qui ont adapté leur intervention au fait que les personnes avaient les mains en l’air et portaient des panneaux Greenpeace” a souligné Olivier Lamarre, directeur adjoint du parc nucléaire d’EDF. Le groupe a part ailleurs décidé de porter plainte contre ces activistes afin de montrer sa fermeté face à ce genre d’ “opération de communication”.

© Photo : EDF – CHARFEDDINE Damien

Rédigé par : La Rédaction

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COMMENTAIRES

  • Le risque terroriste n’avait pas été initialement prévu au niveau qu’il a atteint aujourd’hui. Les centrales sont régulièrement survolées par des drones. Les gendarmes chargés de la sécurité sont en nombre dérisoire. Les militants de Greenpeace ont pu une fois encore rentrer dans une centrale et déclencher des feux d’artifices près des piscines. Bref çà pose manifestement problème et ce type de rapport est favorable pour souligner les failles et tenter de les faire améliorer :

    http://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/nucleaire-des-militants-de-greenpeace-declenchent-un-feu-d-artifice-a-l-interieur-de-la-centrale-de-cattenom_2415529.html

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    • Et si un gendarme avait tiré sur un militant de Greenpeace ? Facile de démontrer qu’un système est faillible lorsqu’on est sûr de son impunité couverte par le buzz médiatique organisé lors de l’intrusion.

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  • Tout le monde sait que cette argumentation sur la haute sécurité de nos centrales est fausse et que Greenpeace pointe bien le maillon faible de l’armure, dont l’invincibilité tant proclamée a déjà failli être prise en défaut. Pour ces piscines de refroidissement, quel serait le résultat d’un avion de tourisme piloté par un suicidaire, chargé avec plusieurs centaines de kilogrammes d’explosif militaire, volant à très basse altitude et à plus de 300 km/h et se jetant sur une piscine de déchets nucléaires ? Dans ce cas, les missiles ne marcheraient pas, l’avion ne serait pas détecté en amont, et les tirs des gendarmes ne pourraient guère modifier la trajectoire de l’avion en vol. Vous allez me dire que je suis dans la science-fiction, espérons que ce ne soit que cela.

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    • Le pire c’est que pour percer le mur de la piscine pa difficile il fait je crois 30cm d’épaisseur en béton et 10 cm en acier. Il est probable qu’avec un rpg7 engin presque aussi courant que la kalachnikov on ait déjà beaucoup de dégâts. il y a beaucoup de missile portable encore plus performant: le milan français vendu un peu partout peu percer 2.60m de béton!

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    • Vous portez des jugements de valeur en lieu et place d’arguments que vous n’avez pas. Il y a seulement 20 ans nul n’aurait pu prédire le contexte, les risques et les avancées actuels, alors il serait bon que le cercle des décideurs fassent preuve d’une imagination anticipatrice plus fertile, ce qui nous permettrait à coup sûr de réduire très fortement notre addiction mortifère au nucléaire.

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