En Europe, 6 % des émissions totales de CO2 sont liées aux véhicules lourds, soit 25 % des émissions globales du secteur routier. Une part que l’Union européenne souhaite réduire très fortement dans la décennie à venir. Pour tenter de décarboner leurs flottes, les acteurs du secteur fourbissent leurs armes et avancent leurs solutions. Parmi elles, le bio-GNL s’affirme comme une piste de plus en plus crédible, selon les conclusions d’une étude de l’Union internationale des transports routiers (IRU).
Car les perspectives de l’inaction sont glaçantes. De l’aveu même de Total, l’un des majors pétroliers, la hausse des émissions de CO2 liées au transport routier devrait être de 60 % d’ici 2050, si aucune initiative d’ampleur n’est prise. Les conséquences pour le climat seraient, sans aucun doute, intenables. Si les voitures individuelles sont bien évidemment la cible des autorités européennes et nationales, les véhicules lourds (bus, car, camions, etc.) représentent aussi un enjeu stratégique. Dans son règlement 2019/1242, publié le 25 juillet 2019, l’Union européenne aspire ainsi à réduire de 15 % les émissions de CO2 d’ici 2025, pour atteindre 30 % en 2030. Des objectifs ambitieux, qui reposent très fortement sur l’engagement des entreprises du secteur.
L’IRU plaide pour le Bio-GNL
L’Union internationale des transports routiers (IRU), organisme rassemblant l’ensemble de la profession routière, a fait de la décarbonation des véhicules lourds l’un de ses axes d’action privilégiés. Dans un rapport rendu public en mai 2019, l’IRU affirme que le bio-GNL, un mélange de GNL composé de 80 % de gaz naturel et de 20 % de biométhane, est le carburant alternatif au diesel le plus fiable pour les véhicules lourds. Pour parvenir à cette conclusion, l’IRU s’est fondée sur le modèle idéal d’un autocar parcourant une distance annuelle d’environ 60 000 kilomètres, dont uniquement 10 % en zone urbaine. L’IRU en a conclu que le bio-GNL demeurait l’approche la plus viable en termes d’émissions de gaz à effet de serre et de coûts : « le bio-GNL est le carburant de substitution pour lequel des solutions politiques et économiques pourraient être le plus facilement mises en œuvre à court et moyen terme (2023-2035) ». Une vision qui corrobore celle des pouvoirs publics qui, en 2018, dans le cadre du plan de libération des énergies renouvelables, ont acté le développement d’une filière biométhane dans le secteur des transports.
Au niveau environnemental, le cabinet de conseil en transition énergétique Enea Consulting avait rendu publics, en juillet 2019, les résultats d’une étude affirmant que le bio-GNL permettait une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 88 % par rapport au gazole routier. Tout en soulignant les éventuelles externalités positives, comme la création d’emplois pérennes non délocalisables ou des gains financiers notables pour la collectivité et le monde agricole, estimés entre 190 à 310 millions d’euros par an. Autre avantage environnemental possible, selon l’IRU, les émissions d’oxyde d’azote et de particules baissent d’environ 50 % à 90 % avec un autocar motorisé au bio-GNL, par rapport à un carburant classique. Le rapport souligne que pour les poids lourds longue-distance, la voie de l’électrification n’est malheureusement pas la plus évidente, le véhicule risquant de souffrir des contraintes d’une autonomie insuffisante de la batterie.
Des premières initiatives dans les territoires
Dans les territoires, les premières initiatives se dessinent. En France, la Région Poitou-Charentes a déployé seize cars motorisés au bio-GNL. De son côté, l’aéroport de Munich a annoncé mettre en œuvre un car électrique, mais doté d’un générateur servant à recharger la batterie alimentée au bio-GNL, signe que l’hybridation des sources d’énergie représente aussi des perspectives intéressantes.
Si les prémices d’une diffusion à plus grande échelle du bio-GNL semblent se confirmer , la filière subit encore les conséquences d’une structuration lacunaire. En Belgique, par exemple, « il n’y a pas de projet de site de bio-GNL physique », même «s’ il y a un intérêt des transporteurs et s’il est clair qu’à terme ce type de projet émergera » explique Didier Hendrikx, responsable des affaires publiques au sein de Gas.be, interrogé par gaz-mobilités.fr.
Plusieurs obstacles freinent encore le déploiement de ces solutions à plus grande échelle. L’acquisition de nouveaux véhicules représente des coûts élevés d’investissement et les infrastructures disponibles sont encore parcellaires, sinon embryonnaires. Ce que souligne d’ailleurs l’IRU, qui invite à une mobilisation plus dynamique des pouvoirs publics, en appelant à une « politique de taxation de l’énergie qui pourrait être un instrument puissant pour soutenir la décarbonation des transports ».
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