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L’île du Prince Edouard au Canada rêve d’indépendance énergétique

Située sur la cote est du Canada, l’île du Prince Edouard a beau être la plus petite province du pays, elle est aussi la province où la densité de population est la plus élevée. Pour autant, l’île ne produit que très peu d’énergie et elle est largement dépendante de ses importations pour vivre. Sur un territoire insulaire qui laisse peu de possibilités, la question de l’avenir énergétique est au cœur de toutes les préoccupations, d’autant que pour les habitants, le coût très élevé de l’électricité est devenu un problème crucial. En mars 2017, le gouvernement de la province a donc décidé, pour la première fois de son histoire, de lancer un plan d’énergie avec des objectifs sur dix ans. Le but est clair : tenter d’atteindre enfin l’indépendance énergétique.

Un territoire isolé qui importe son énergie

Comme toute île, la province du Prince Edouard est confrontée à un problème d’approvisionnement pour son énergie. En 2015, 60% de l’électricité consommée sur l’île du Prince Edouard était importée de la province voisine du Nouveau-Brunswick. Afin de faciliter les importations, l’île a investi dans le développement d’autres câbles sous-marins passant par le détroit du Northumberland qui permettent d’augmenter la quantité d’électricité importée. L’ancienne installation sous-marine permet d’importer 200 mégawatts ; avec les nouveaux câbles, ce sont 360 mégawatts supplémentaires qui pourront être injectés dans le réseau de l’île.

Dans les faits, ce problème d’approvisionnement entraîne des répercussions considérables : les habitants de l’île du Prince Edouard sont ainsi ceux qui payent leur électricité le plus cher dans tout le Canada. De plus, les risques d’instabilité du réseau et de coupures sont élevés au moment des pics de consommation. Pour répondre aux besoins de la population, l’électricité est importée des territoires voisins grâce à un câble sous-marin. En complément, l’entreprise Maritime Energy a fait construire deux centrales thermiques qui fournissent de l’électricité en cas de pics de consommation ou de coupure d’alimentation. Mais avec leur puissance installée de seulement 104 mégawatts, les centrales de Borden-Carleton et Charlottetown ne suffisent pas à couvrir tous les besoins. Au fil du temps, l’île a tenté de développer d’autres ressources : elle dispose de deux parcs éoliens qui sont situés au cap Nord et à Eastern Kings. Mais la capacité de production reste limitée, et l’île du Prince Edouard ne peut guère produire plus de 54 mégawatts. Insuffisant pour couvrir ses besoins.

Parc éolien du Cap Nord.

L’objectif de l’indépendance énergétique

A terme, l’île du Prince Edouard préférerait atteindre l’indépendance énergétique et payer son électricité moins cher. D’autant que sa dépendance à l’électricité produite au Nouveau-Brunswick la place dans une situation très précaire : au Nouveau-Brunswick, la centrale nucléaire de Point Lepreau est vieillissante. Son entretien coûte cher et son avenir est incertain car le gouvernement de la province a peu de moyens à investir pour la moderniser. Or, c’est cette centrale qui produit l’essentiel de l’électricité qui est ensuite vendue à l’île du Prince Edouard. Il devient donc urgent pour l’île du Prince Edouard de trouver une solution.

Le gouvernement de l’île du Prince Edouard a rendu officiel, en mars dernier, un plan de dix ans pour faire évoluer en profondeur la stratégie énergétique de l’île. Trois objectifs sont ainsi établis : en priorité faire diminuer la consommation énergétique de l’île (une diminution de 2% en dix ans), ensuite établir des sources de production durables et locales, et enfin permettre une diminution du coût de l’énergie pour les habitants de l’île. La stratégie développée par les pouvoirs publics ne repose pas seulement sur le fait de développer l’approvisionnement énergétique, mais aussi, de façon plus originale, d’encourager la population à limiter au maximum ses dépenses énergétiques, notamment en ce qui concerne l’électricité et les énergies fossiles. Par exemple, le coût d’importation du mazout étant beaucoup trop élevé pour l’île, les habitants ont été très nombreux à abandonner le chauffage au mazout et à se diriger vers le chauffage à bois. Les forêts ne manquent pas sur l’île, et non seulement cet approvisionnement local évite tout risque de pénurie et de flambée des prix, mais il a aussi permis de développer une filière professionnelle qui emploie désormais 400 personnes.

La loi fédérale encourage aussi les habitants qui font construire leur logement à optimiser au maximum la performance énergétique de leur maison, notamment grâce à une meilleure isolation et l’installation de panneaux solaires. Le gouvernement de la province a d’ailleurs mis au point un programme de facturation nette pour les habitations qui produisent de l’électricité et qui acceptent d’injecter leur surplus de production dans le réseau : ils bénéficient alors d’un échange de crédits qui leur évite de payer lorsqu’ils se branchent eux-mêmes au réseau électrique pour couvrir leurs besoins (la nuit ou l’hiver).

Autre chantier d’envergure pour la mutation de l’île : les transports. Ils représentent l’un des principaux pôles de dépenses énergétiques. Pour limiter au maximum l’importation de carburant, la province veut passer à l’électrique : les véhicules gouvernementaux vont progressivement être remplacés par des voitures électriques ; même les bus scolaires et les transports en commun sont concernés. Pour les particuliers, le gouvernement prévoit la mise en place de primes incitatives pour les habitants qui choisissent d’acheter un véhicule électrique.

L’électricité éolienne : l’avenir énergétique de l’île du Prince Edouard

Mais le chantier le plus ambitieux concerne le développement de l’énergie éolienne sur l’île. Pour compenser l’augmentation de la demande en électricité liée à l’abandon des carburants fossiles, le gouvernement de l’île du Prince Edouard veut investir massivement dans la création de parcs éoliens sur la façade atlantique de l’île. Le territoire doit progressivement augmenter sa production d’électricité verte avec deux objectifs : atteindre 30 mégawatts d’énergie éolienne d’ici 2020, puis ajouter 40 mégawatts de production d’ici 2025.

Une unité de stockage de l’énergie éolienne est en test depuis 2016.

L’entreprise Maritime Electric, qui gère les deux parcs éoliens qui existent actuellement sur l’île, a même déjà commencé à envisager son avenir énergétique. En imaginant que la part de l’énergie éolienne progresse de manière à atteindre 50% du mix électrique de l’île d’ici 2025, il faudra compléter les installations de production avec des unités de stockage. Depuis 2016, Maritime Electric teste donc un site de stockage de l’énergie. Il a fallu investir 24 millions de dollars canadiens dans le projet, mais les résultats sont encourageants : l’unité de stockage installée, de la taille d’un conteneur, permet à elle seule d’alimenter 600 maisons sans risque de coupure d’électricité. Dans les années à venir, l’île du Prince Edouard compte augmenter sa capacité de stockage afin de consolider son réseau et, enfin, de se diriger vers l’indépendance énergétique.

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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