L’aluminium face au défi du réchauffement climatique

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Écrit par :

Jacques Mirat

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Représentant plus de 1% des émissions mondiales de gaz à effet de serre selon les chiffres de l’Agence internationale de ...

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Représentant plus de 1% des émissions mondiales de gaz à effet de serre selon les chiffres de l’Agence internationale de l’énergie, la production d’aluminium jouera dans les années à venir un rôle significatif dans la lutte contre le changement climatique. Son processus de production très énergivore doit en effet s’adapter aux nouvelles exigences du réchauffement de la planète. Objectifs : réduire l’intensité énergétique de cette production, mais aussi et surtout orienter le mix énergétique nécessaire vers davantage d’énergies propres. Un défi pour lequel ne semble pas encore prête l’industrie chinoise, qui utilise toujours actuellement une électricité issue essentiellement du charbon dans sa production d’aluminium.

Un production d’aluminium abondante

Métal le plus consommé après le fer, l’aluminium est aujourd’hui utilisé dans de nombreux secteurs pour ses propriétés physicochimiques de légèreté, de conductibilité électrique et de résistance à la corrosion. L’aéronautique actuellement en pleine croissance, l’industrie des câbles, la conception des véhicules de transport routier, la construction d’habitations modernes et les divers modes de conditionnement assurent des débouchés à une production mondiale abondante.

Basé sur l’exploitation du bauxite, l’aluminium est l’élément métallique le plus abondant de la croûte terrestre, dont il représente environ 8 %. Près des trois quarts des réserves connues de ce minerai se situent dans 5 pays (Australie, Chine, Brésil, Inde, Guinée) et la production mondiale de bauxite a atteint en 2010 plus de  211 millions de tonnes. La Guinée détient à elle seule plus du quart des réserves mondiales de bauxite, estimées à 28 milliards de tonnes.

La production mondiale d’aluminium métallique s’est élevée quant à elle à 41,4 millions de tonnes en 2010, dont la Chine a réalisé 40,6 % avec 16,8 millions de tonnes, loin devant la Russie (9,3 %), le Canada (7,1 %) et le Portugal (5,2%). En 2014, la Chine a assuré 55% des approvisionnements mondiaux en aluminium, avec 27,5 millions de tonnes fournies.

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La Chine, premier producteur et premier pollueur

La Chine, qui représente aujourd’hui 54 % de l’offre mondiale d’aluminium d’après Goldman Sachs, a donc augmenté, rien que pour l’année 2015, sa production de plus de 10 %, ainsi que ses exportations de produits semi-manufacturés. Au total, la hausse de la production mondiale d’aluminium pourrait dépasser 7 % cette année sous l’impulsion du marché chinois.

Or, la production de ce métal requiert des quantités importantes d’électricité (2 fois plus que pour la production d’acier) dans le cadre du processus d’électrolyse nécessaire pour séparer l’aluminium métallique de l’oxygène au sein de l’alumine. Des quantités d’électricité considérables qui impliquent généralement dans l’industrie chinoise une forte consommation de charbon, combustible très polluant.

En effet, comme l’expliquent Yves Jégourel, professeur à l’Université de Bordeaux, et Philippe Chalmin, professeur à l’Université Paris-Dauphine, rassemblés au sein du groupe de travail Aluwatch consacré aux évolutions du marché de l’aluminium, « 90% de l’électricité utilisée dans le cadre de la production primaire d’aluminium en Chine provient du charbon ».

Dans un contexte de surproduction et de pression environnementale accrue, « il n’y a aucune logique pour la Chine de continuer à développer sa production d’aluminium », estime Philippe Chalmin dans L’Usine Nouvelle. « Chaque tonne en excédent se paie, d’un point de vue environnemental, au prix fort », souligne quant à lui Yves Jégourel. A l’échelle mondiale, la production d’une tonne d’aluminium entraîne en moyenne 16,5 tonnes d’émissions de gaz à effet de serre.

Une production d’aluminium à base d’énergies renouvelables

Face aux défis climatiques actuels, l’enjeu est donc d’essayer par des méthodes innovantes et les moins polluantes possibles de maintenir ou de développer des productions de ce métal compétitives (face à une industrie chinoise dénuée de toutes contraintes environnementales, au moins pour l’instant) afin de fournir l’aluminium nécessaire à la bonne marche de l’économie mondiale, tout en respectant l’environnement.

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La production d’aluminium est déjà alimentée dans certaines régions et avec succès via la production d’électricité hydraulique, une énergie bon marché, stable et renouvelable. Au Québec par exemple, le développement économique du Saguenay–Lac-Saint-Jean et le développement de l’industrie de l’aluminium sont intimement liés au potentiel hydroélectrique des différents bassins hydrographiques de la région. Au total, en Amérique du Nord, 83% de l’électricité nécessaire à la production d’aluminium primaire pour l’année 2015 a été générée par des moyens hydrauliques, contre 52% en 2014.

Principal producteur d’aluminium à l’échelle internationale, le groupe Rio Tinto Alcan a notamment aménagé de nombreux barrages et centrales hydroélectriques et construit des lignes de transport d’électricité afin de subvenir à ses propres besoins et répondre à la demande croissante d’aluminium. Il exploite aujourd’hui sept centrales hydroélectriques et devrait participer en collaboration avec le groupe français EDF au financement du barrage de Natchigal, au Cameroun, destiné à alimenter la nouvelle usine de la compagnie camerounaise d’aluminium Alucam. Des exemples que la COP21 serait avisée de mettre en valeur, afin qu’ils fassent des émules et que les industriels soient encouragés à se tourner vers un aluminium propre, même si plus cher, plutôt que vers un aluminium au charbon.

 

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Crédits photo : Dubal

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