Transformer le réseau de production hydroélectrique norvégien en une immense « batterie verte » européenne : c’est le défi proposé par Kaspar Vereide, un ingénieur de l’Université des Sciences et de la Technologie de Trondheim (Norvège). Enjeux et perspectives.
Améliorer la flexibilité des centrales hydroélectriques existantes
Aujourd’hui, 95% de l’électricité produite en Norvège provient de 937 centrales hydroélectriques. La plupart de ces dernières ont été construites dans les années 1960 et 1970 à travers des tunnels de plusieurs kilomètres de long destinés à acheminer l’eau depuis les réservoirs jusqu’aux turbines situées en contrebas. « Les montagnes norvégiennes sont pleines de tunnels hydroélectriques. Nous avons plus de kilomètres de tunnels hydroélectriques que de tunnels routiers dans ce pays », explique Kaspar Vereide.
Mais les centrales hydroélectriques norvégiennes n’ont donc pas été conçues pour être allumées ou éteintes à la manière d’un interrupteur : les turbines ont besoin de temps pour se mettre en route en raison de la longueur des tunnels qui les alimentent. Difficile dans ces conditions d’obtenir un niveau de production constant : le débit qui parvient aux tunnels depuis ces interminables tunnels varie constamment en fonction des précipitations, de la fonte des neiges, et d’autres critères météorologiques.
La solution proposée par le chercheur norvégien consisterait à créer une sorte de sas (baptisé « surge chamber », en anglais) où l’on pourrait temporairement stocker l’eau et ainsi réduire la distance d’acheminement de l’eau vers les turbines de manière à gagner en flexibilité. Le surplus de production électrique, qu’il provienne des éoliennes ou des panneaux solaires du Nord de l’Europe, servirait à pomper de l’eau et de la stocker dans ce réservoir située en hauteur, selon le principe des STEP. Lorsque la production intermittente des EnR serait insuffisante pour répondre à la demande, les centrales norvégiennes auraient ainsi suffisamment d’eau en stock pour produire de l’électricité à la demande et manière constante.
Si la technologie est encore en cours de développement, Kaspar Vereide estime à 6 milliards d’euros les travaux d’adaptation des infrastructures existantes.
Stocker les surplus d’énergie renouvelable, une solution potentielle pour l’Europe
« Nous avons beaucoup à gagner à développer cette technologie, à la fois pour préserver la stabilité de notre système électrique et pour mieux exploiter nos centrales et ainsi desservir un marché plus large », indique le chercheur norvégien.
La Norvège, qui dispose déjà de la moitié des capacités de stockage hydroélectriques en Europe, affiche des ambitions énergétiques durables, à l’échelle nationale mais aussi communautaire. Pour Kaspar Vereide, il s’agit de « faire du réseau hydroélectrique norvégien une ressource à l’international ».
En d’autres termes, la Norvège pourrait devenir dans les années et les décennies à venir la « batterie verte » de l’Europe. Comment ? En accroissant ses capacités de stockage à hauteur de 20 GW – un objectif atteignable en sept ans selon les chercheurs – et en développant les interconnexions avec les réseaux électriques de ses voisins scandinaves et européens.
De la sorte, des centrales fossiles polluantes n’auraient pas à être mises en route lorsque le soleil, le vent disparaissent dans les pays voisins.
Crédit photo : Rehro
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