La flotte fantôme russe : le pétrole inquiète la Finlande

Chaque semaine, une trentaine de pétroliers de la flotte fantôme russe franchissent discrètement le golfe de Finlande, transportant du pétrole vers des destinations opaques. Ces navires vieillissants, hors de tout contrôle, font peser une menace grandissante sur l’environnement et sur la crédibilité des sanctions européennes contre la Russie.

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Des sanctions qui font des vagues : la flotte fantôme russe dans le viseur
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Le 27 octobre 2025, les médias finlandais et plusieurs agences de presse internationales ont révélé des données inédites : 31 pétroliers liés à la flotte fantôme russe ont été repérés dans le golfe de Finlande en une seule semaine. Malgré les sanctions imposées à la Russie depuis 2022, le pétrole continue de transiter à un rythme soutenu.

Une flotte fantôme sous haute surveillance

Les gardes-frontières finlandais confirment que les cargaisons russes observées dans le golfe de Finlande sont revenues à leur niveau d’avant-guerre. Selon Mikko Hirvi, responsable de la sécurité maritime, « les cargaisons russes dans le golfe de Finlande sont à leur niveau d’avant-guerre, ce qui signifie que ce trafic est en grande partie assuré par la flotte fantôme ».

Les navires impliqués transportent du pétrole brut, du diesel ou d’autres produits raffinés à destination des ports d’Oust-Louga et de Primorsk, sur la côte baltique russe. Ces ports servent désormais de plaques tournantes pour les cargaisons redirigées vers des marchés secondaires, souvent via des intermédiaires situés en Asie ou au Moyen-Orient. Ainsi, le pétrole russe continue d’alimenter le commerce mondial, en marge des mécanismes de surveillance imposés par l’Union européenne.

Les analyses de la chaîne publique Yle ont permis d’identifier précisément les 31 navires concernés. Sur ces bâtiments, seuls six ont moins de quinze ans, selon les relevés finlandais. Autrement dit, une large majorité de cette flotte fonctionne avec des tankers vétustes, parfois dépourvus d’assurance valide. Ce facteur accentue le risque d’accident ou de fuite d’hydrocarbures dans une mer intérieure aussi sensible que la Baltique, où les marées se renouvellent lentement et où la dispersion du pétrole reste quasi impossible à grande échelle.

Un risque environnemental majeur dans le golfe de Finlande

Le golfe de Finlande, corridor étroit reliant Saint-Pétersbourg à la mer Baltique, est considéré comme l’une des zones maritimes les plus fragiles d’Europe. D’après Mikko Hirvi, « le risque d’accidents environnementaux, en particulier dans la mer Baltique et dans le golfe de Finlande, est clairement à un niveau élevé », relaye le Journal de Montréal.

Le passage hebdomadaire de ces pétroliers chargés de pétrole soulève des questions cruciales. En cas de collision ou de rupture de coque, une marée noire dans ces eaux froides et peu profondes pourrait affecter durablement les écosystèmes marins, les côtes finlandaises et estoniennes, et même les réserves de pêche locales. Les autorités maritimes de Finlande estiment qu’une fuite de 100 000 tonnes de brut — volume correspondant à une seule semaine de trafic — suffirait à provoquer une catastrophe équivalente à plusieurs fois celle de l’« Erika ».

Le problème est aggravé par la nature même de cette flotte : de nombreux navires ont désactivé leurs transpondeurs AIS, rendant leur traçabilité quasi nulle. Les experts européens redoutent que ces pétroliers, souvent exploités par des sociétés-écrans, opèrent sans entretien suffisant. L’Agence européenne de sécurité maritime estime qu’entre 600 et 1 400 navires composent aujourd’hui la flotte fantôme russe. D’ici la fin de l’année, 562 navires devraient être placés sous sanctions européennes supplémentaires.

Une alerte énergétique et environnementale pour toute l’Europe

En Finlande, les services maritimes multiplient les inspections, mais les moyens demeurent limités face au volume des passages. Les données récentes évoquent 31 navires observés en une seule semaine, soit plusieurs centaines de milliers de barils de pétrole transitant sans garantie de conformité. Cette réalité met à mal les efforts européens pour freiner le financement de la guerre en Ukraine.

Les autorités finlandaises rappellent que le golfe de Finlande n’est pas conçu pour un trafic pétrolier aussi intense : ses fonds marins étroits, sa salinité faible et sa densité de glace en hiver en font une zone particulièrement dangereuse pour le transport d’hydrocarbures. Le gouvernement d’Helsinki a d’ailleurs évoqué la possibilité d’un moratoire temporaire sur les passages non assurés, mais une telle mesure nécessiterait une coordination à l’échelle de l’Union.

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