Un collectif de 160 scientifiques a déclaré, lundi 13 octobre, que la planète avait franchi un premier point de bascule : le dépérissement généralisé des coraux d’eau chaude. Ce constat décrit une crise sans précédent pour les coraux, conséquence directe d’un réchauffement global estimé entre +1,3 et +1,4 °C et d’un seuil de vulnérabilité des récifs situé autour de +1,2 °C. Dans cette configuration, l’économie littorale se trouve exposée à des pertes rapides, tandis que l’environnement marin encaisse déjà les chocs.
Les coraux, premier « point de bascule » planétaire
La dynamique est désormais documentée. D’après le rapport, les coraux d’eau chaude subissent un « dépérissement généralisé » qui signe un point de bascule atteint. Cette bascule s’explique par une accumulation de vagues de chaleur marines, qui fragilise les coraux jusqu’au blanchissement, puis la mortalité. Or, le réseau économique qui dépend des coraux est immense, de la pêche artisanale au tourisme, en passant par la protection naturelle contre la houle.
Les récifs structurent environ un quart de la biodiversité marine, rappellent des chercheurs repris par The Guardian. Mais surtout, le point de bascule survient alors que le réchauffement global flirte avec +1,4 °C, au-delà du seuil médian de risque de dépérissement estimé à +1,2 °C. Les coraux entrent dans une zone où chaque dixième de degré compte et où la fréquence des épisodes de blanchissement s’emballe. « Nous ne pouvons plus parler des points de bascule comme d’un risque futur », a déclaré Tim Lenton, University of Exeter.
Coraux et économie : un choc d’offre écologique qui rebat les cartes
Le choc sur les coraux n’est pas qu’écologique ; il est économique. D’une part, les récifs soutiennent l’emploi local via la pêche et le tourisme. D’autre part, ils réduisent les coûts d’adaptation en jouant le rôle de brise-lames naturels. Or, si ce point de bascule perdure, les coraux offriront moins de services écosystémiques, ce qui renchérit l’assurance, les infrastructures grises, et les importations alimentaires dans des économies littorales fragiles. Des centaines de millions de personnes dépendent directement des coraux, ce qui inscrit la crise dans les bilans d’entreprises, les budgets publics et les prix des denrées.
La productivité halieutique liée aux coraux est sensible aux vagues de chaleur marines, qui ont touché jusqu’à 84 % des récifs récemment. Par conséquent, la raréfaction des poissons de récif, combinée à la dégradation des habitats, peut se traduire par des revenus en baisse et des coûts de substitution en hausse. Face à cette réalité, « le dépérissement généralisé des coraux d’eau chaude est déjà en cours », souligne encore Tim Lenton, selon ABC News. Ainsi, les marchés du littoral vont devoir intégrer ce point de bascule dans les scénarios de risque, y compris pour la dette souveraine des États insulaires.
Le basculement des coraux, signal d’un dérèglement global
Le rapport ne s’arrête pas aux coraux. En parallèle, les auteurs listent d’autres points de bascule qui se rapprochent : Amazonie, calottes polaires, grands courants océaniques. Parmi eux, l’AMOC, clé du climat européen, soulève des risques d’instabilité qui renverraient à des chocs économiques plus larges. Si les coraux tombent en premier, c’est aussi qu’ils sont devenus une vigie des limites du système Terre. La bascule des coraux fournit donc une métrique d’urgence : limiter le dépassement au-delà de +1,5 °C et réduire la durée d’exposition au-dessus de ce seuil.
Cependant, les coraux ne sont pas condamnés à court terme partout et de la même manière. Des scientifiques cités par ABC News évoquent des marges d’action : protection locale, restauration, réduction rapide des émissions, et « points de bascule positifs » dans les technologies bas-carbone. Néanmoins, la fenêtre se resserre. Les coraux, déjà affaiblis par deux années de blanchissements records rapportés par des médias français , exigent un sursaut coordonné.






