La revue scientifique américaine “ACS Sustainable Chemistry & Engineering” a publié, le 7 avril dernier, un rapport concernant un nouveau moyen de traiter l’urine des astronautes. Ce “déchet corporel” est actuellement une source d’eau potable non-négligeable pour les missions longues durée dans l’espace. Mais un groupe de chercheurs de l’Université de Porto Rico affirme que l’urine peut également servir comme source d’énergie grâce à l’ammoniac qu’il contient. Lumière sur des recherches qui transforment, pour les voyageurs de l’espace, l’urine en or.
[stextbox id=”info”]L’urine, une denrée précieuse dans l’espace[/stextbox]
L’envoi d’une navette de réapprovisionnement en direction d’une station spatiale est une opération extrêmement coûteuse. Voilà pourquoi de nombreuses denrées primordiales à la vie, comme l’eau, deviennent relativement rare, et donc précieuses, au cours d’une mission spatiale longue durée. Les astronautes sont habitués à recycler leur propre urine, une source essentielle d’eau potable. Et demain, peut-être, d’énergie.
Pour l’eau potable, on utilise l’osmose, un processus de traitement des matières organiques corporelles (urine, sueur…) par distillation. Le but de l’opération est de séparer l’urine de l’urée, un composé organique rejeté par le corps humain. Au terme de ce processus, 75% de l’eau que contient l’urine traitée peut être réutilisée comme eau potable.
Un procédé aujourd’hui opérationnel et fiable mais qui présente toutefois l’inconvénient de consommer de l’énergie, une autre denrée rare dans l’espace. Une problématique que les chercheurs de l’Université de Porto Rico souhaitent contourner grâce à l’ammoniac, une source d’énergie qui peut être obtenue en traitant l’urée.
[stextbox id=”info”]De l’urée à l’ammoniac : l’urine comme source énergétique[/stextbox]
Les travaux du groupe d’Eduardo Nicolau, chimiste analytique à l’Université de Porto Rico, portent sur la réutilisation de l’urée obtenue lors de l’osmose. Grâce à un processus de dégradation via un bioréacteur, ces scientifiques américains ont réussi à convertir 86% de l’urée en ammoniac.
Une ressource chimique qu’ils ont ensuite utilisé comme source énergétique en la convertissant en azote en en eau dans une pile à combustible. Les tests menés par M. Nicolau ont notamment permis d’obtenir du courant de 2 milliampères pour une tension de 0,2 volts. Une puissance de sortie pour l’instant faible mais que l’équipe espère améliorer prochainement.
“Les résultats ont montré que notre bioréacteur pouvait être utilisé dans des systèmes de traitement des eaux usées contenant de l’urée et de l’ammoniac”, précise Eduardo Nicolau qui estime que son processus est adapté pour des applications dans d’autres domaines que les missions spatiales.
Résidu du métabolisme de nombreux organismes vivants et présent à l’état naturel dans l’environnement, l’ammoniac est un vecteur énergétique qui peut être utilisé dans une pile à combustible ou comme carburant (dans des moteurs qui n’émettent pas de Co2 par exemple). Les recherches de ces scientifiques américains semblent indiquer qu’il est encore possible d’améliorer l’autonomie énergétique des missions spatiales. Mais elles ouvrent également la voie à de nouvelles techniques de valorisation énergétique, comme pour le traitement des eaux usées par exemple.
Crédit photo : DUCKofD3ATH