Egypte : la Russie construira sa première centrale nucléaire

Egypte : la Russie construira sa première centrale nucléaire

Vladimir Poutine en visite officielle au Caire, et son homologue égyptien, le président Abdel Fattah al-Sissi ont annoncé, lundi 11 décembre 2017, la signature finale d’un contrat de coopération relatif à la construction de la première centrale nucléaire égyptienne dans la région de Dabaa. Le gouvernement égyptien, confronté à une demande en électricité toujours plus forte, considérait depuis plusieurs années déjà l’énergie nucléaire comme l’alternative la plus efficiente pour sécuriser son approvisionnement énergétique et accompagner le développement progressif des énergies renouvelables dans les années à venir.

Egypte : problèmes d’approvisionnement et déséquilibre de la production

La situation énergétique égyptienne constitue aujourd’hui un des problèmes majeurs pour le gouvernement du Président Al-Sisi. Des régions entières du pays sont confrontées depuis plusieurs années à plus de six pannes par jour pouvant durer chacune plusieurs heures, et la forte pression démographique ne devrait rien arranger. Les fortes chaleurs à répétition durant les saisons estivales et l’utilisation de la climatisation qui en découle, ajoutées à une croissance significative de la population (plus d’un million en seulement six mois), ont entraîné une hausse progressive de la demande d’électricité, aujourd’hui largement supérieure aux capacités de production réelles dont dispose l’Egypte. La demande d’électricité dépasse régulièrement les 27 000 MW, lors des pics de consommation estivaux, soit environ 20 % de plus que la production électrique du pays.

L’Egypte est dans le même temps confrontée à un problème d’approvisionnement. Malgré la découverte d’importantes réserves gazières au large de ses côtes en 2015 (le champ gazier Zohr notamment), leur mise en production prend du temps et le pays peine encore à produire suffisamment de gaz pour alimenter ses centrales, en plus de ses contrats d’exportation vers la Jordanie et Israël. Le réseau électrique, déjà relativement vétuste, fonctionne donc en flux tendu, entraînant des saturations régulières du réseau et des coupures de courant fréquentes. Une situation qui pèse logiquement sur l’activité économique des entreprises mais également sur le moral de la population.

Pour y remédier, le gouvernement tente aujourd’hui de diversifier son mix énergétique, trop largement dépendant des énergies fossiles, via de nombreux programmes de développement des énergies éolienne et solaire, et le recours à l’énergie nucléaire.

Une première centrale nucléaire égyptienne avant 2025

Évoquées depuis le début des années 1980 et le régime du président Housni Moubarak, les velléités égyptiennes dans le domaine du nucléaire civil n’ont en effet rien de surprenantes. Le pays a multiplié les partenariats stratégiques ces dernières années, et étudiait depuis 2010 toutes les propositions reçues suite à son appel d’offres pour l’installation d’une première centrale nucléaire sur son territoire.

Un projet qui devrait bel et bien voir le jour. Le Président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et le Président russe Vladimir Poutine se sont en effet mis d’accord, lundi 11 décembre 2017, sur les termes d’un contrat final venant entériner l’accord préalable que les deux pays avaient trouvé en novembre 2015 pour bâtir dans la région de Dabaa, le désert Libyque à l’ouest d’Alexandrie, quatre réacteurs de 1.200 mégawatts chacun. Ce contrat a été signé par le ministre égyptien de l’Electricité, Mohamed Chaker, et le patron du géant nucléaire russe Rosatom Alexey Likhachev, devant les caméras de la télévision publique égyptienne. « Depuis plusieurs années, nous menons des études approfondies et recevons des propositions des entreprises et des Etats concernés », a déclaré le président égyptien Abdel-Fattah al-Sissi dans un communiqué à l’issue de la signature de l’accord. « C’est un programme nucléaire pacifique pour produire de l’électricité et l’Egypte est pleinement engagée dans le traité de non prolifération des armes nucléaires », a-t-il ajouté.

D’une puissance totale de 4.800 MW, cette nouvelle installation devrait entrer en service avant 2025 et largement contribuer à stabiliser l’approvisionnement électrique national tout en respectant la volonté de réduction des émissions de CO2 émise par le gouvernement dans le cadre de l’Accord de Paris pour le climat. Elle fera également de l’Egypte un leader régional en termes de technologie, et le seul pays dans la région à disposer d’une centrale nucléaire de génération 3+. De son côté, la Russie financera en partie cette centrale à l’aide d’un prêt accordé au Caire. Le remboursement de ce prêt s’étalera sur trente-cinq ans selon les autorités égyptiennes qui n’ont toutefois pas souhaité préciser le montant. De précédentes déclarations du ministre égyptien de l’Énergie évaluaient ce coût entre 1,5 et 2 milliards de dollars (1,4 à 1,87 milliards d’euros).

Crédits photo : Kremlin.ru

Rédigé par : La Rédaction

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COMMENTAIRES

  • “De précédentes déclarations du ministre égyptien de l’Énergie évaluaient ce coût entre 1,5 et 2 milliards de dollars (1,4 à 1,87 milliards d’euros).”

    Ces montants ont certainement été indiqués par réacteur. Sinon ça fait vraiment pas beaucoup.

    Pour comparaison, les tranches de notre parc actuellement en fonctionnement ont coûté entre 1,5 et 4,7 milliards d’euros de 2010 à construire (voir le rapport de la Cours des Comptes de janvier 2012, p22 et 23).

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  • Ce contrat est en cours de négociation depuis très longtemps et au prix du MWh fourni avec stockage il est désormais moins cher, sans dépendance, sans déchets ni importants coûts de démantèlements à terme et bien moins risqué d’utiliser par exemple du solaire CSP en Egypte

    http://www.solarpaces.org/solarreserve-breaks-csp-price-record-6-cent-contract/

    Prix pour la seule construction d’un réacteur WWER-1200 Rosatom : 6,32 milliards d’euros qui ne résout pas les problème de fiabilité du réseau qui est vétuste

    Prix de la seule centrale : 30 milliards de $ – 25,3 milliards d’euros – (la Russie accorde un prêt de 25 milliards de $ à l’Égypte sur plus de 30 ans couvrant 85 % de la centrale, l’Égypte finançant le reste. Délai accordé avant premier paiement 4 ans). Durée des travaux 7 ans pour la première unité.

    Non compris 3 autres contrats : fourniture du combustible + gestion du combustible + exploitation/maintenance sur 10 ans par Rosatom puis l’Egypte et contrôle ensuite tous les 4 ans

    Non compris non plus la sécurité coûteuse du site dans le contexte égyptien.

    Débit du fluide de refroidissement d’un seul réacteur WWER-1200 : 86 000 m3/h

    Défauts du WWR1200 selon l’Irsn :

    – manque de protection contre les surpressions à froid
    – manque de diversification des moyens de refroidissement des principales pompes, y compris celles de sauvegarde
    – autonomie insuffisante de la source de refroidissement ultime en cas d’accident

    Bref encore un exemple qui démontre que le nucléaire 3 /3+ ne se vend qu’avec appui et autres aspects contractuels et géopolitiques des Etats et non en fonction de la meilleure solution.

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    • Un tranche EPR de 1 600 MW est estimé à 10/12 Mds €. Soit sur 50 ans et environ 600 TWh , environ 20 €/ MWh pour l’investissement seul exprimé en € constants. Donc les prix que vous avez calculé pour Rosatom n’ont rien d’extravagant. Plus inquiétants me paraissent être les problèmes généraux de sûreté. L’autre remarque est celui de la vétusté du réseau et en tout état de cause, la construction des lignes HTB pour évacuer la production des tranches vers les différents postes-source. En France il faut entre 10 et 15 ans pour purger les différents recours . Peut-être qu’en Egypte il y a moins de virtuoses du droit administratif.
      Ceci dit, les énergies intermittentes sont elles aussi largement subventionnées et ne permettent pas d’assurer une permanence de fourniture. Quant aux batteries chimiques associées à certaines d’entre elles, ces dernières n’ont qu’un rôle de régulation durant la période de production et contribuent au renchérissement du coût de ces énergies.

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          • Ce que vous dites est faux, basé comme d’habitude sur cette comparaison idiote entre les ENR intermittentes et les énergies pilotables :

            Un panneau solaire ne remplace pas un réacteur nucléaire, il se construit en plus, puisqu’on ne peut pas compter sur le solaire et l’éolien pour produire au moment où on en a besoin.

            Un panneau solaire ou une éolienne permettent d’économiser du charbon ou de l’uranium, ils ne permettent pas de fermer la centrale au charbon ou nucléaire dont on aura besoin pour les épisodes sans vent et/ou sans soleil.

            Donc pour vraiment calculer la pertinence économique du solaire et de l’éolien, il faut comparer leur coût complet avec le coût marginal de l’énergie pilotable (charbon ou nucléaire).

          • @ Bachoubouzouc : de nombreuses universités, organismes et entreprises aussi divers et variés que Stanford, Caltech, Mines Paris Tech, Engie etc etc publient régulièrement des études très approfondies et détaillées sur la base des données le plus souvent les plus fines aux secondes près de consommation et production et démontrent qu’il est parfaitement possible de se passer de nucléaire dans tous les pays où les données sont disponibles (environ 150) sans avoir un % de stockage massif, sous toutes conditions climatiques même les plus extrêmes.

            Et ce pour un coût total avec la même sécurité de fourniture et même souvent plus fiable, inférieur au nucléaire même ancien et amorti.

            Je pense que vous ne connaissez pas suffisamment les technologies renouvelables et leur potentiel et raisonnez avec un modèle centralisé passé en pensant qu’il est définitivement irremplaçable.

            Comment voulez-vous lutter contre des technologies produites en immenses séries fabriqués par des robots et automatismes y compris les systèmes de stockage dont les coûts ne cessent de baisser déjà depuis plusieurs années. Et on commence à peine à les intégrer de manière courante.

            Le nucléaire n’a pas cet avantage en plus de ses gros inconvénients insolubles et c’est l’une des raisons pour lesquelles ce secteur décroche économiquement depuis des années et que beaucoup de spécialistes même du secteur nucléaire vous avertissent du changement.

            François Levêque par exemple est plutôt pro-nucléaire et pourtant lisez ses constats et conclusions régulières..

            Les modèles du CEA qui sont pourtant précis, intégrant de nombreux paramètres et mises à jour et qui donnaient l’avantage au nucléaire il y a encore quelques années ne le considèrent plus comme avantageux et on ne voit pas ce qui pourrait changer alors que l’écart en faveur des renouvelable se creuse.

            Pourquoi Engie s’investit complètement dans les renouvelables ?

            Pourquoi EDF s’investit massivement dans le solaire et par ailleurs l’éolien ?

            Pourquoi Total s’investit dans les renouvelables depuis le rachat de Sunpower et bien d’autres ?

            Et on peut continuer très longuement la liste au plan international. Et ne me dîtes pas que c’est à cause des subventions car il y en a de moins en moins et elles sont de plus en plus souvent absentes des appels d’offres.

            Observez les données historiques et vous verrez les changements.

          • @ Energie+

            “de nombreuses universités, organismes et entreprises aussi divers et variés que Stanford, Caltech, Mines Paris Tech, Engie etc etc publient régulièrement des études très approfondies et détaillées sur la base des données le plus souvent les plus fines aux secondes près de consommation et production et démontrent qu’il est parfaitement possible de se passer de nucléaire dans tous les pays où les données sont disponibles (environ 150) sans avoir un % de stockage massif, sous toutes conditions climatiques même les plus extrêmes.”

            Je vous mets au défi de citer une seule de ces études qui tienne la route.

          • @ Energie+ :

            Comme d’habitude, si ce que vous dites est possible, alors pourquoi personne ne le fait nul part (hors cas particuliers dotés de masse d’hydraulique et/ou de géothermie) ?

          • Plusieurs des nombreuses études en question (qui selon vous “ne tiendraient pas la route” !) sont pourtant amplement confirmées entre bien d’autres par RTE dans ses scénarii à 2035 (Ampère et Volt) qui juge de plus assurément “économiquement pertinent” de réduire la part de nucléaire (à 46% dans le scénario Ampère privilégié pour 2035).

            Et Entso-e dans son dernier rapport semestriel pour la saison hiver reproche à certains pays de ne pas déployer assez rapidement les renouvelables. Quel comble de demander plus d’énergies “intermittentes” pour des opérateurs de réseaux (41 opérateurs sur 34 pays), entièrement responsables de l’équilibrage et sécurité réseau !

            Pour les pays qui s’approchent des 100% renouvelables (hors îles, petits pays et régions et hors hydro et géothermie), un peu de patience çà progresse d’année en année mais une transition énergétique prend toujours du temps !

            Je re-publierai à l’occasion ici les évolutions dès que j’aurai un peu de temps.

            Parmi les pays qui avancent vite malgré leur taille l’Australie est intéressante à observer.

            Avec l’une des meilleures ressources énergétiques solaires et éoliennes au monde, elle fait une “priorité de devenir une superpuissance d’exportation d’énergies renouvelables”, tirant parti de la demande mondiale croissante d’énergie à faible intensité carbonique dans des pays comme le Japon, la Corée du Sud, la Chine etc

            L’hydrogène (H2), le méthane (CH4), le méthanol (cancérigène – CH3OH), l’éther diméthylique (DME – CH3OCH3), l’ammoniac (NH3) et des carburants de synthèse etc peuvent être produits via les énergies renouvelables pour le stockage, le transport et plus.

            Parmi eux l’ammoniac a l’avantage comme l’hydrogène de ne pas contenir de carbone mais d’être constitué, en plus d’1 atome d’azote, de 3 atomes d’hydrogène (plus que l’eau H20) et s’avère un support satisfaisant non seulement de stockage mais aussi de transport et d’exportation etc d’énergies renouvelables dont solaire CSP particulièrement adapté.

            Il y a ainsi plus d’hydrogène dans un litre d’ammoniac liquide qu’il n’y en a dans un litre d’hydrogène liquide (par ailleurs souvent moins simple à utiliser !)

            Parmi les nombreux pays disposant d’un potentiel solaire CSP important, l’Australie exporte 3/4 de son énergie (charbon/gaz) dont 1/3 au Japon, pays qui développe une économie hydrogène.

            Donc l’exportation d’énergies renouvelables décarbonées sous diverses formes possibles est l’un des autres facteurs de développement de ces dernières (en parallèle à la baisse des coûts) qui mérite d’être observé car çà va changer beaucoup de choses

            http://reneweconomy.com.au/arena-says-renewables-australias-next-great-export-70505/

  • Coût d’un stockage parmi d’autres de parc solaires ou éoliens, sans pertes de charge et d’une durée de plus de 20 ans : 33 euros le MWh et la baisse des prix n’est pas finie

    https://www.viznenergy.com/vizn-energy-systems-enables-247-solar-nights-at-lowest-ever-published-cost/

    Si le nucléaire était compétitif, EDF/Areva, Westinghouse, Toshiba etc n’auraient pas tant de difficultés et les centrales hors celles incluses dans des contrats globaux et opaques d’Etats (Chine, Russie) s’exporteraient.

    Contrairement à l’Egypte, l’Arménie pourtant sous forte influence russe et moins ensoleillée que l’Egypte opte pour le solaire, étrange !

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    • On en a déjà parlé : Si ce truc était vrai, pourquoi tous les fabriquants de téléphone et d’ordinateurs portables, de voitures électriques ne feraient pas appel à cette technologie qui serait, d’après vos chiffres, au moins 10 fois plus compétitive que le Li-ion ?

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      • @ Bachoubouzouc : en posant cette question vous démontrez une fois de plus votre méconnaissance des technologies. Vous devriez savoir que l’on utilise pas le même type de batterie selon les usages, les sollicitations etc. Il y a des solutions optimales à chaque cas, en plus des coûts. Une batterie de flux dans un véhicule c’est possible mais pose notamment un problème de volume plus important (la batterie est plus petite mais les réservoirs plus grands) Par contre dans un bâtiment c’est intéressant par l’absence de pertes. Idem pour un réseau, les capacités en série et les sollicitations.

        Quant à la technologie de VIZn elle est bel est bien opérationnelle et son prix intègre pour 33 euros le MWh : solaire + stockage et elle n’est pas la seule. Parmi les nombreuses technologies de stockage plusieurs ont des prix similaires et parfois même inférieurs suivant les pays et régions, c’est pareil pour les appels d’offres.

        Si vous suiviez attentivement ces sujets que j’essaie de présenter ici quand j’ai le temps, vous verriez qu’il y a de sérieuses avancées, ce qui se traduit d’ailleurs par une course aux rachats d’entreprises dans le stockage que vous auriez pu aisément observer.

        Il est triste que plusieurs personnes ici soient à la traîne alors qu’il y a dans le monde des équipes de R&D et des entreprises très innovantes qu’il est désormais pourtant très facile de suivre via les différents réseaux y compris twitter etc

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