Le pétrole de schiste américain au cœur d’une compétition féroce - L'EnerGeek

Le pétrole de schiste américain au cœur d’une compétition féroce

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Moins connu que son alter ego le gaz de schiste, le pétrole de schiste est pourtant devenu en l’espace de quelques années synonyme d’un nouvel eldorado pour l’industrie pétrolière. Très développé aux Etats-Unis, il fait l’objet d’une compétition féroce sur le territoire américain ainsi que dans quelques autres pays où des gisements ont été repérés. Cette source de pétrole non conventionnel ouvre des perspectives intéressantes : la production grandissante devrait offrir plus d’indépendance énergétique aux Etats-Unis et aussi influer sur le prix du baril de brut. Une expansion vertigineuse qui n’est pas saluée par tous les acteurs du secteur de l’énergie : l’OPEP pourrait se lancer dans un bras de fer contre les Etats-Unis au sujet du pétrole de schiste. Car avec cette nouvelle ressource, c’est la place de leader du marché pétrolier qui est en jeu.

Le pétrole de schiste : nouvel eldorado américain

Si l’exploitation du pétrole de schiste a commencé aux Etats-Unis dès 2006, ce n’est qu’à partir de 2013 qu’elle a vraiment pris de l’envergure. Les réserves de schistes sont devenues un véritable enjeu énergétique, en premier lieu avec l’exploitation du gaz de schiste, qui est autorisée et encouragée sur le territoire américain. Avec la chute du prix du baril de pétrole en 2013, les entreprises pétrolières ont décidé de réduire leurs investissements à long terme, et elles ont décidé de développer plutôt des projets en cycle court. Le pétrole de schiste, dont les réserves sont naturellement présentes en grande quantité, aux Etats-Unis s’est alors imposé comme une alternative attractive.

En effet, les Etats-Unis possèdent la deuxième réserve de pétrole de schiste la plus importante au monde, derrière la Russie. Les gisements les plus importants se trouvent au Texas, en particulier dans le bassin du Permian qui concentre l’attention de tous les pétroliers. Le potentiel de ce champ de pétrole de schiste est énorme, et grâce aux forages d’exploration les experts du département de l’énergie américain estiment qu’il s’agit tout simplement du plus grand champ de pétrole au monde, devant celui de Ghawar qui est situé en Arabie Saoudite.

Le pétrole de schiste est un pétrole non conventionnel qu’on trouve dans une roche mère, le schiste en l’occurrence. Il s’exploite de la même manière que le gaz de schiste : il faut avoir recours à la fracturation hydraulique pour le pomper. La fracturation implique le forage de puits puis l’injection de grandes quantités d’eau sous haute pression avec du sable et des produits chimiques. Cette opération permet de fissurer le schiste pour récupérer les hydrocarbures. Cette technologie est parfaitement maîtrisée et elle s’avère rapidement rentable pour les exploitants pétroliers. Contrairement à l’extraction du pétrole conventionnel qui peut nécessiter des années avant d’entrer en production effective, l’extraction du pétrole de schiste est beaucoup plus rapide à mettre en place : six mois peuvent suffire pour démarrer  la production.

Depuis le début de la production en 2014, le pétrole de schiste n’a fait que monter en puissance aux Etats-Unis. Depuis le début d’année 2017, le département de l’énergie enregistre une production journalière de 5 millions de barils de pétrole de schiste. Et ce chiffre pourrait encore augmenter de 500 000 barils par jour dans le courant de l’année grâce au déploiement de nouveaux puits. L’année 2017 s’annonce d’ores et déjà comme une année charnière pour la production de pétrole américain : pour la première fois la production s’équilibre parfaitement, à 50% de pétrole conventionnel et 50% de pétrole de schiste. Les experts prévoient déjà qu’en 2018, un basculement s’opérera et le pétrole de schiste devrait devenir majoritaire dans la production.

Une mutation profonde du secteur pétrolier

Dans les faits, cet emballement autour du pétrole de schiste américain se concrétise par d’énormes investissements de la part des compagnies pétrolières. Pour la seule année 2017, les géants ExxonMobil, Shell et Chevron comptent investir 10 milliards de dollars dans le déploiement de nouveaux puits, principalement dans le bassin de Permian mais aussi dans le nord des Etats-Unis où plusieurs gros gisements ont été identifiés dans le Dakota du nord.

Le schiste pèse fortement dans l’augmentation de la production de gaz et de pétrole non conventionnels.

Ces investissements sont très représentatifs d’une tendance de fond qui s’installe sur le marché pétrolier. Depuis que prix du baril de brut a baissé, on observe que les grandes compagnies sont devenues plus frileuses dans les grands investissements. Elles se détournent petit à petit des grands projets à long terme dont le retour sur investissement est peu élevé. Le pétrole de schiste est relativement facile et très rapide à exploiter. Il offre donc une alternative beaucoup plus séduisante que le pétrole canadien qu’il faut exploiter en l’extrayant des gisements de sables bitumeux. Même si les investissements consentis par les majors pétrolières pour exploiter le pétrole de schiste se chiffre en milliards de dollars, ce montant reste largement moins élevé que l’investissement nécessaire pour le déploiement d’une nouvelle plateforme de pétrole conventionnel. La conséquence est sans appel : avec un retour sur investissement d’environ 10%, le pétrole de schiste est plus profitable aux compagnies pétrolières.

Des opportunités à l’étranger aussi

La course au pétrole de schiste ne concerne pas seulement les entreprises américaines : elle s’étend au-delà des frontières dans un élan général. Du côté des producteurs, deux pays sont sur les rangs pour profiter à leur tour de la manne du pétrole de schiste : la Chine et l’Argentine. En Chine, deux compagnies pétrolières, la Sinopec et la PetroChina, comptent lancer courant 2017 des projets d’exploitation ambitieux afin d’atteindre l’objectif de 710 puits forés à l’horizon 2020. La montée en charge rapide du pétrole de schiste devrait permettre d’atteindre une part de 30% à 35% de pétrole non conventionnel sur le territoire chinois dans les prochaines années. De son côté, l’Argentine parie gros sur cette nouvelle ressource énergétique. Le pays a accordé des licences d’exploitation à plusieurs compagnies internationales. Plus de 700 puits sont déjà forés et exploités, et ils aident le gouvernement argentin à attirer les capitaux étrangers pour investir encore dans le développement du pétrole de schiste argentin. Pour cette année, le pays espère gagner 5 milliards de dollars grâce à cette seule ressource.

Côté français, c’est surtout l’industrie parapétrolière qui se frotte les mains, et plusieurs entreprises tricolores sont déjà bien placées pour profiter des retombées du pétrole de schiste. L’entreprise Vallourec, qui fabrique des tubes pour le pétrole, connaît un regain d’activité : alors que son usine de Yellowstone ne fonctionnait qu’à 20% de ses capacités en septembre 2016, elle tourne à plein régime depuis le début d’année 2017 et prévoit déjà une augmentation significative de son chiffre d’affaires cette année. Veolia n’est pas en reste : l’entreprise a mis au point en 2015 une nouvelle technique de récupération de l’eau utilisée pour la fracturation hydraulique dans l’exploitation du pétrole de schiste. Veolia va déployer cette technique pour Antero Resources, qui exploite plusieurs puits de pétrole de schiste en Virginie Occidentale, et d’autres accords de partenariat pourraient bientôt être signés avec d’autres entreprises.

L’avenir du pétrole de schiste semble donc serein. Pourtant l’OPEP pourrait venir jouer les trouble-fêtes. La grande famille du pétrole voit d’un mauvais œil cette augmentation impressionnante de la production du pétrole non conventionnel car elle pourrait avoir un impact négatif sur le prix du pétrole. Lors de la dernière réunion qui a eu lieu à Houston, au Texas, plusieurs membres, notamment l’Arabie Saoudite, ont exprimé leur volonté de ne plus réduire leur production afin de soutenir le cours du prix du pétrole. Ils attendent que les Etats-Unis prennent leurs responsabilités et proposent un meilleur encadrement de l’exploitation du pétrole de schiste. Le bras de fer ne fait donc que commencer.

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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