Le transport d’électricité renouvelable : un nouvel enjeu pour le réseau - L'EnerGeek

Le transport d’électricité renouvelable : un nouvel enjeu pour le réseau

La transition énergétique et l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix électrique français ne sont pas sans poser des problèmes. Contrairement à d’autres pays, la France n’a pas encore entamé les grands changements structurels pour améliorer son réseau d’électricité et le préparer à accueillir l’électricité verte. Car cette électricité issue des énergies renouvelables possède certaines particularités qui réclament une gestion de réseau nouvelle. Pour être en phase avec sa future production d’électricité, le réseau français va devoir s’adapter et entamer une mutation pour devenir une véritable smart grid.

Pourquoi le transport d’électricité renouvelable pose problème ?

En 2016, la part des énergies renouvelables en France a connu un vrai coup d’accélérateur et elle a atteint le cap des 35% de production installée. Une bonne nouvelle pour le virage énergétique du pays, mais ces nouvelles sources de production ne sont pas identiques aux sources traditionnelles (les centrales nucléaires notamment) et de fait, leur transport sur le réseau fonctionne d’une manière différente. Par le passé, lorsque la capacité de production de la France augmentait, la stratégie pour adapter le réseau consistait à construire des lignes électriques supplémentaires pour que la capacité de trafic du réseau soit en adéquation avec la capacité de production. Mais l’électricité verte et l’électricité « classique » ne répondent pas aux mêmes règles en ce qui concerne le stockage et l’acheminement.

Du point de vue de sa production, l’électricité verte est tributaire des sources d’énergies renouvelables… elles-mêmes tributaires des éléments, ce qui rend la production intermittente par définition. Ainsi, les panneaux solaires ne produisent pas d’énergie la nuit, l’éolien ne produit pas d’énergie quand il n’y a pas de vent… Autrement dit, le pic de production ne correspond pas au pic de consommation, ce qui entraîne donc des flux moins réguliers sur le réseau électrique. Dans le même temps, le modèle de production d’électricité a été complètement modifié par l’avènement des énergies renouvelables, non seulement dans la gestion du flux mais aussi dans la gestion des unités de production. Le modèle d’un petit nombre de très grosses centrales de production semble avoir vécu, et on se dirige désormais vers un modèle dans lequel un observe une démultiplication des unités de production électrique. Les sources d’énergie sont beaucoup plus nombreuses, également plus dispersées sur le territoire, et le réseau doit là encore s’adapter au nouveau cahier des charges. D’ailleurs, on observe aussi la naissance de nouveaux comportements de la part des usagers : l’autoconsommation et l’autoproduction tiennent une part grandissante dans les habitudes énergétiques des français.

En plus de devoir faire face à une mutation profonde du système de production de l’énergie, le réseau électrique français doit aussi monter en puissance pour répondre aux modes de consommation. Les besoins en électricité n’ont jamais été aussi élevés qu’à l’heure actuelle, et c’est un phénomène qui est encore appelé à augmenter dans les prochaines années. Objets connectés, maisons intelligentes, smart cities, routes solaires, voitures électriques : l’électricité est partout. En aval comme en amont, le réseau doit faire face à une démultiplication des points d’alimentation. Et pour éviter le black-out, il va falloir innover.

Un problème de réseau… et de stockage

Avec les nouvelles problématiques liées au transport de l’électricité renouvelable, le réseau français doit non seulement trouver des solutions pour aller vers une plus grande capillarité de ses lignes, mais il doit aussi résoudre le problème du stockage de l’énergie. Puisque la production de l’électricité verte ne correspond pas à un flux constant et facilement prévisible et qu’il est en décalage avec les besoins électriques de la population, la solution évidente est de stocker cette énergie.

Mais l’évidence n’en est pas vraiment une : à l’heure actuelle, les solutions de stockage de l’énergie ne sont pas encore assez avancées et surtout elles ne sont pas assez déployées sur le territoire français pour faire face aux besoins des consommateurs. Les fermes de batteries sont la meilleure solution pour stocker l’électricité produite par les sources d’énergies renouvelables. Ces sites sont composés de plusieurs unités de stockage de l’électricité, et leur capacité peut atteindre les 100 MW. C’est encore peu par rapport aux besoins, mais l’avantage de ces fermes de batteries, c’est qu’elles peuvent être construites n’importe où . On peut donc les placer à des points stratégiques du réseau pour être proches par exemple des plus gros bassins de consommation.

En 2016, Tesla a construit une ferme de batteries en Californie en 90 jours seulement.

Tant que les solutions de stockage de l’énergie verte ne sont pas mises au point et déployées sur l’ensemble du territoire français, le réseau ne dispose pas de leviers suffisants pour gérer convenablement le transport de l’électricité renouvelable. Seul un parc de stockage adapté peut permettre une souplesse suffisante pour faire face aux pics de consommation d’électricité.

Vers un réseau intelligent

D’après les experts, l’industrie énergétique mondiale connait actuellement une mutation sans précédent depuis sa création. Dans les cinq prochaines années, elle connaîtra plus de changements qu’en l’espace des cinquante ans passés. Après l’évolution des moyens de production, c’est maintenant au réseau d’engager son virage énergétique en adoptant une stratégie 2.0. Pour les experts en énergie, le réseau électrique a besoin de devenir plus intelligent, une « smart grid ». Cela signifie que les moyens de contrôle et d’analyse du réseau en temps réel doivent devenir meilleur et permettre une plus grande finesse dans sa gestion. Ce virage technologie est déjà amorcé. En France, les compteurs communicants ont commencé à être déployés en 2016. Ils permettent d’envoyer et de recevoir des données en temps réel sans avoir recours à un technicien. Cet apport d’infirmations est vital pour la gestion de la consommation domestique des consommateurs, mais aussi à plus grande échelle pour la gestion du réseau. Les nouvelles technologies d’information et de communication ont également été embarquées à l’intérieur du réseau électrique pour permettre une analyse plus détaillée et surtout une anticipation des pics de consommation, notamment en fonction de la saisonnalité.

Les Smart Grids commencent à se déployer en France.

Mais pour basculer véritablement en mode Smart Grid, le réseau va être contraint d’ajouter une nouvelle brique à son dispositif. Aux Etats-Unis, la mise au point des smarts grids est passée par la création d’agrégateurs d’effacement dont le rôle est de faire le lien entre le réseau électrique et les utilisateurs (particuliers comme professionnels). Cette interface dispose d’une vision à 360° du réseau, et elle complète les services énergétiques. Elle agit donc comme un intermédiaire chargé de régler le trafic du réseau en l’optimisant au maximum. Un agrégateur d’effacement peut ainsi décider du délestage d’une partie du réseau électrique ou d’aller puiser dans des réserves d’énergie en cas de pic de consommation. Ce pilotage se fait en temps réel et il garantit l’approvisionnement en électricité sans risque de coupures. Véritable gestionnaire du réseau intelligent, l’agrégateur d’effacement prend de plus en plus de place dans la logique énergétique américaine, et son rôle peut encore évoluer.

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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COMMENTAIRES

  • En France le réseau n’est pas si mal géré que vous le dites pour ce qui concerne l’arrivée des ENR d’un point de vue technique.
    Je ne parle pas des procédures de raccordements qui elles sont décriées par les producteurs.
    Par contre pour ce qui est de la gestion des flux d’énergie, il y a actuellement de grosses marges techniques dues aux coefficients de sécurité importants qui ont été appliqués il y a quelques années par les concepteurs de notre réseau actuel de sorte que techniquement les ENR s’intègrent sans problèmes là où il y a à la fois de la production et de la consommation.
    On pourrait dire qu’il y a problème si des énergies vertes produites ne pourraient pas être mises sur le réseau du fait de surabondance ou que l’arrivée en masse de ces énergies viendraient à faire disjoncter les réseaux ou à déstabiliser techniquement les réseaux de nos voisins étrangers ( comme c’est le cas entre l’Allemagne et ses voisins tchèques ou slovaques).
    L’Allemagne est dans ce cas et investit massivement sur les réseaux de transport car son réseau est fréquement au bord de la rupture entre autres du fait des ENR. Elle investit maintenant contrainte et forcée car elle n’a pas anticipé l’évolution normale de son réseau ni celle des ENR.
    Le morcellement de ses réseaux en plusieurs entités qui ont des intérêts divergents ( il n’est qu’à voir ce qui s’est passé lors du blackout européen en 2005) en est évidement la cause. principale.
    En France métropolitaine nous ne sommes pas dans le cas de l’Allemagne. Une des principales causes c’est que au lieu de faire porter la contrainte au seul réseau comme en Allemagne, Il a été instauré une régulation des flux entrants d’ENR via une politique tarifaire plus raisonnable qu’en Allemagne.
    Les agrégateurs ne sont pas une nouveauté. Depuis les années 70, EDF demande régulièrement à ses gros consommateurs de s’effacer en période de pointe moyennant une rénumération. La différence c’est qu’aujourd’hui on passe par Internet.
    Dire que les agrégateurs sont des régulateurs est stupide et dangereux. Ils doivent être utilisés pour ce qu’ils sont : de bons moyens d’action pour la gestion des pointes. Mais le régulateur doit être celui qui défend l’intérêt général c’est à dIre celui qui pilote le réseau et donc les agrégateurs. C’est plus sûr pour le réseau, plus efficace et aussi plus économique pour le consommateur final.
    Les capacités de stockages sont un autre moyen d’action contre les pointes et le caractère intermittent des ENR. Elles ne doivent pas être à la charge seule du réseau. Après tout celui qui génère la contrainte c’est celui qui produit des ENR intermittentes. Il est donc logique que ce producteur doive supporter une contrainte de stockage. Il n’est pas normal de favoriser un parc solaire sans stockage par rapport à un barrage hydrauélectrique alors que ce dernier ne génère que très peu d’intermitence et qu’au contraire il permet de palier de part sa capacité de stockage aux contraintes de l’intermittence ! Le kwh hydrauélectrique devrait être beaucoup mieux rémuméré que le kwh solaire. Il en va de même pour la biomasse !
    Si demain l’autoconsommation était mise en valeur, alors l’impact des ENR sur le réseau serait moindre qu’il ne l’est aujourd’hui.
    Un autre point n’est jamais mis en évidence : les ENR ont l’avantage ( le solaire et l’éolien ) de diminuer leur intermittence respectives si elles sont d’origine complémentaires comme l’éolien et le solaire.
    De plus le territoire français à l’avantage d’être assez grand et divers : le vent au nord le solaire au sud ce qui fait que les effet desurabondance se retrouve vite limités.
    Par ailleurs il y a foisonnement plus grand quand le nombre de priducteur est élevé ce qui mécaniquement réduit es effets de l’intermittence.
    Le vrai problème des ENR est lors des épisodes de grand froid où le temps est couvert donc pas de soleil et où il n’y a pas de vent tel qu’en janvier. Dans ces périodes seules des capacités de stockages très importantes peuvent palier au problème et marginalement les agrégateurs en période de pointe.
    Contrairement aux idées reçues et aux prévisions la consommation éléctrique a plutot tendance à stagner en France ces dernières années. Il faut y voir l’effet du ralentissement économique mais aussi celui des programmes d’isolation d’habitat des nouvelles technologies de construction liées à la R.T. Il n’est donc pas évident que le réseau doive fondamentalement se renforcer ni même se restructurer drastiquement dans les années à venir.
    Les seuls éléments qui feraient que cela change serait l’arrivée d’un nouvel usage come celui de la voiture électrique qui se développerait de manière importante ou alors d’un choc pétrolier avec report de consommations d’une énergie à base d’hydrocarbure vers d’autres, sources d’énergie. Au rythme actuel les nouvelles consommations liées à la voiture électrique sont globalement compensées par les baisses d’intensité énergétique liées à l’habitat et aux délocalisations d’industries.
    Le réseau de distribution lui par contre serait à revoir de manière très importante si la voiture électrique se dévellopperait de manière significative sur les bases actuelles. En effet il n’a pas été prévu pour des points de consommations intenses, nombreux et ponctuels.

    En résummé notre réseau électrique de France Métropolitaine est globalement satisfaisant aujourd’hui et le sera demain si l’on continue à être vigilant sur la gestion en amont des flux qui vont y arriver.

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