Gaz de schiste : quelle stratégie pour la Grande-Bretagne ? - L'EnerGeek

Gaz de schiste : quelle stratégie pour la Grande-Bretagne ?

gaz de schiste

Si le gaz de schiste fait débat dans le reste de l’Europe, la Grande-Bretagne a pour sa part décidé de mettre le cap sur cette nouvelle ressource. Et la présence massive de gaz de schiste dans son sous-sol n’est pas étrangère à cette nouvelle stratégie énergétique. Pourtant, malgré la volonté affichée des derniers gouvernements à tirer tout le potentiel de cet hydrocarbure, ce dernier rencontre de sérieuses oppositions sur le terrain. Mais les arguments en faveur de l’écologie ne suffisent pas à freiner le gouvernement. Du point de vue des autorités, le gaz de schiste représente la meilleure opportunité énergétique à moyen terme, et elles comptent bien l’inclure dans le mix énergétique national d’ici 2020. L’enjeu est de taille : assurer les besoins du pays sans être dépendant des approvisionnements étrangers, le tout en réduisant les émissions de CO2 du pays. Un pari judicieux étant donné le potentiel des gisements présents sur le territoire britannique. Et ce trésor énergétique attire toutes les convoitises : les entreprises pétrochimiques sont déjà nombreuses à faire pression pour décrocher la timbale du gaz de schiste anglais.

Le gaz de schiste : une nouvelle donne énergétique

Si la question du gaz de schiste est si présente en Grande-Bretagne, c’est que la situation énergétique du pays n’est pas aussi confortable que celles de ses voisins européens. Le nucléaire a été développé tardivement et à petite échelle. Résultat : en 2015, les principales sources d’électricité du pays étaient encore le gaz naturel (29,5 %) et le charbon (22,6 %). Pour assurer ses besoins énergétique, la Grande-Bretagne est dès lors contrainte d’importer : elle est le 9e pays importateur de gaz naturel (qui provient principalement de Russie) et le 8e pays importateur de charbon. Pour limiter la dépendance énergétique du pays, le gouvernement britannique doit donc trouver des alternatives valables. Bonne nouvelle : les ressources du pays en gaz de schiste sont très importantes.

Mix électrique en 2015 : 29,5 % gaz naturel, 24,7 % énergies renouvelables, 22,6 % charbon, 20,8 % nucléaire, 2,4 % pétrole

En 2014, un rapport du British Geological Survey a estimé que les ressources en gaz de schiste sur le territoire britannique pourraient couvrir les besoins énergétiques du pays pour 25 ans. Parmi les gisements repérés, le plus gros se situe dans le nord du pays, dans le bassin géologique du Bowland. Cette réserve contiendrait à elle seule 38 000 milliards de mètres cubes de gaz de schiste. Même en envisageant que les estimations ne soient pas fiables, 10 % de cette quantité suffiraient pour couvrir la consommation de gaz du pays entier pendant quatre ans. De quoi intéresser les grosses entreprises de pétrochimie ou les groupes spécialisés dans l’énergie qui ont déjà lancé des études préparatoires sur le terrain. Les français Total et GDF Suez en première ligne.

Une ressource très critiquée

Dès le début, l’ex-Premier Ministre David Cameron n’a pas caché son enthousiasme pour l’exploitation du gaz de schiste. Alors même que les études préparatoires n’étaient pas encore achevées, son sous-secrétaire d’Etat à l’énergie, Nicholas Bourne, annonçait déjà que le gaz de schiste deviendrait bientôt « une priorité nationale ». Dans la foulée, il avait annoncé en 2015 que l’exploitation du gaz de schiste bénéficierait d’un taux d’imposition très avantageux : 30 % contre les 62 % appliqués à l’exploitation du pétrole. Mais sur le terrain, les choses n’ont pas joué en la faveur du gouvernement. Même si depuis 2015 le gouvernement britannique a accordé près d’une centaine de licences d’exploration, aucune n’a jamais débouché.

La raison à cela : pour avoir le droit d’entreprendre un travail d’exploration, les compagnies doivent être détentrices d’autorisations délivrées au niveau local. Or, les élus locaux se montrent très réticents à l’exploration du gaz de schiste qui a mauvaise presse en Grande-Bretagne depuis l’incident de Blackpool survenu en 2011. L’entreprise Cuadrilla y avait débuté l’exploration d’un gisement de gaz de schiste mais la fracturation hydraulique avait rapidement entraîné une instabilité du sol. De faibles secousses sismiques avaient même été ressenties dans la région, ce qui avait poussé les autorités à suspendre l’autorisation de Cuadrilla. Cet incident reste dans la mémoire des britanniques qui sont désormais 43 % à s’opposer à l’extraction du gaz de schiste sur leur territoire. Sans compter que l’extraction du gaz de schiste requiert aussi l’infiltration de produits chimiques dans les sous sols. Des produits nocifs pour les nappes phréatiques, les cours d’eau et l’activité agricole. Récemment, la tension est encore montée d’un cran lorsqu’un projet d’exploitation de la forêt de Sherwood a été rendu public : la forêt de Robin des Bois couvrirait en effet un important gisement de gaz de schiste qui intéresserait plusieurs entreprises. La levée de boucliers a été immédiate et a démontré, une fois encore, l’étroitesse de la marge de manoeuvre du gouvernement sur ce sujet.

Gaz de schiste, nucléaire et énergies renouvelables

Malgré ces oppositions, le nouveau gouvernement de Theresa May est plus que jamais décidé à poursuivre l’œuvre de David Cameron. Selon les derniers communiqués publiés par les autorités, un début d’exploitation de plusieurs sites serait envisagé à l’horizon 2020. Et en attendant de pouvoir utiliser du gaz de schiste produit localement, le pays en a déjà commencé l’importation. En septembre 2016, la Grande-Bretagne a réceptionné sa première livraison de gaz de schiste américain.

Mais le pays voit plus loin et lance d’autres chantiers en parallèle pour assurer son mix énergétique futur. Dans cette vision de l’avenir, le gaz de schiste vient se substituer aux importations de gaz naturel russe, le nucléaire remplace le charbon et les énergies renouvelables se développent davantage.

Gisements recensés de gaz de schiste

Les énergies renouvelables occupent déjà une part plus importante que le nucléaire dans le mix électrique britannique : 24,7 % de renouvelables contre 20,8 % de nucléaire pour l’année 2015. Le bon score des énergies vertes est largement dû à l’impressionnant parc éolien offshore que possède la Grande-Bretagne. Le potentiel de cette ressource est considérable outre-Manche et de nouvelles installations permettraient d’augmenter la part des énergies renouvelables.

Malgré cette volonté de développer les énergies renouvelables, le pays compte bien, en parallèle, déployer un parc nucléaire plus important pour se donner un peu d’air. Pour le moment, la Grande-Bretagne compte quinze réacteurs nucléaires sur son sol ; douze autres réacteurs sont en projet pour les années à venir, dont le fameux réacteur EPR d’Hinkley Point.

Mais à moyen terme, l’objectif du pays est bien d’abord de s’assurer un approvisionnement énergétique fiable. Et pour couvrir ses besoins, la Grand-Bretagne considère le gaz de schiste comme la meilleure option. Sans cette ressource nationale, la Grande-Bretagne sera contrainte de maintenir ses importations de gaz et d’investir plus que prévu dans le nucléaire. Une perspective qui a peu de chance de séduire les écologistes britanniques et qui plus est s’avérera coûteuse pour les contribuables. Plus qu’une simple option, le gaz de schiste sera peut-être un atout décisif pour assurer l’avenir énergétique du pays.

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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COMMENTAIRES

  • Il ne faut pas oublier que l’extraction du gaz de schiste coûte de l’énergie, correspondant environ à 50% du gaz extrait; le prix de revient est donc à multiplier par 2.

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  • Finalement, le prix de revient serait bien moins cher que le gaz naturel conventionnel. C’est pour cela que de nombreux pays font déjà appel au gaz de schiste américain.

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