Métaux et minerais : le véritable coût environnemental de la transition énergétique - L'EnerGeek

Métaux et minerais : le véritable coût environnemental de la transition énergétique

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Louées pour leur caractère décarboné, les énergies renouvelables et l’ensemble des technologies vertes mises en avant dans le cadre de la transition énergétique paraissent aujourd’hui indispensables pour limiter le réchauffement climatique en dessous des 2°C comme le prescrit l’Accord de Paris. Ces moyens de production ne seraient pourtant pas aussi durables qu’ils en ont l’air si l’on regarde de plus près. Dans un rapport publié le 18 juillet 2017, et intitulé “The Growing Role of Minerals and Metals for a Low-Carbon Future”, la Banque Mondiale détaille les types de minerais et de métaux dont la demande est susceptible d’augmenter sous l’effet de la progression de l’énergie éolienne, de l’énergie solaire et des batteries de stockage. Un coût environnemental souvent ignoré mais pourtant bien réel. Explications.

Vers une hausse de la demande en métaux et minerais

Largement mises à contribution dans les différents scénarios permettant de contenir le réchauffement climatique, les technologies renouvelables pourraient d’ici plusieurs décennies devenir les premières sources d’énergies à l’échelle planétaire. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) anticipe par exemple qu’une part de 74% d’énergies vertes dans le mix énergétique mondial sera nécessaire d’ici 2060 (contre 24% en 2016 au monde) pour limiter l’augmentation des températures à 2°C par rapport au niveau de l’ère préindustrielle.

Différentes évolutions possibles de la production d’électricité solaire selon l’objectif de températures en 2050 (2DS = 2°C – 4DS = 4°C – 6DS = 6°C)

Une telle évolution, si elle a lieu (et tout porte à croire qu’elle aura lieu), ne sera cependant pas dénuée de conséquences et pourrait même engendrer un vrai bouleversement dans le secteur des matières premières. En effet, si ces technologies renouvelables offrent une production d’électricité totalement décarbonée, la fabrication des équipements nécessaires à cette production (panneaux photovoltaïques, pâles d’éoliennes, batteries de stockage, etc.), impliquera une hausse de la demande de certains minerais et métaux dont les processus d’extraction et d’exploitation sont loin eux, d’être décarbonés.

Demande moyenne de métaux et minerais nécessaires pour la production de panneaux photovoltaïques selon les objectifs de températures atteints en 2050

Selon le rapport de la Banque mondiale publié sur le sujet le 18 juillet 2017, il faudrait s’attendre dans ce cadre à une augmentation significative de la demande d’acier, d’aluminium, d’argent, de cuivre, de plomb, de lithium, de manganèse, de nickel et de zinc, ainsi que de certaines terres rares, telles que l’indium, le molybdène et le néodyme.

Lire aussi : Energies renouvelables : nouveau record d’installations dans le monde en 2016

Cette hausse pourrait d’ailleurs être particulièrement marquée sur le segment des accumulateurs électriques, où l’augmentation de la demande de métaux (aluminium, cobalt, fer, plomb, lithium, manganèse et nickel) pourrait être multipliée par 10 d’ici 2050 pour répondre à l’accroissement des véhicules électriques et des systèmes de stockage stationnaires. Les trois technologies évoquées dans ce rapport (les énergies solaires, éoliennes et les batteries), pourraient in fine consommer “significativement plus de ressources que les systèmes traditionnels basés sur les énergies fossiles”, estime la Banque mondiale.

Pour une production de matières premières plus vertueuse

Si l’ampleur et la nature des besoins en minerais et métaux dépendront du rythme de la transition énergétique mondiale ainsi que des choix des technologies utilisées par chaque filière (par exemple, entre le silicium cristallin, le tellurure de cadmium ou encore les couches fines pour les modules photovoltaïques, ou entre les batteries au lithium pour les voitures électriques, au plomb pour les voitures hybrides ou au platine pour les voitures à l’hydrogène), l’exemplarité et la “durabilité” de cette transition résidera quant à elle dans les conditions d’exploitation de ces minerais et métaux. Comme l’explique Riccardo Puliti, Directeur en charge de l’énergie et des industries extractives à la Banque mondiale, “toute l’ambiguïté de la transition bas-carbone, censée être vertueuse, réside dans le fait qu’elle exige que cette exploitation de minerais et de métaux soit effectuée de manière durable”. Or, on sait d’ores et déjà que l’augmentation des activités d’extraction est susceptible d’avoir un impact significatif sur les ressources en eau, les écosystèmes et les communautés environnantes.

Réserves mondiales et production de lithium en 2015

Cela étant, de nombreux pays en voie de développement d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique latine, voient déjà dans cette évolution une source d’opportunités économiques non négligeable. Ces pays riches en minéraux (comme le Chili et le Pérou pour le cuivre et le lithium, le Brésil pour la bauxite et le fer, le sud de l’Afrique et la Guinée pour le platine, le manganèse et le chrome, et la Chine pour la quasi-totalité de ces matières premières), pourraient en effet voir leurs revenus décupler dans l’avenir et s’assurer des débouchés à long terme pour leur production, à condition de faire de bons investissements et de garantir une exploitation durable de leur industrie minière.

Lire aussi : Lutte contre le changement climatique : les énergies renouvelables seront-elles suffisantes ?

Avec une meilleure planification, les pays riches en ressources naturelles peuvent bénéficier de la hausse de la demande pour leur croissance et de leur développement. S’ils développent leur secteur minier de façon durable, les pays qui disposent des capacités et des infrastructures pour fournir les minéraux et les métaux nécessaires aux technologies propres auront une occasion unique de dynamiser leur économie”, poursuit Riccardo Puliti.

Crédits photo : Banque Mondiale

Rédigé par : La Rédaction

La Rédaction
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COMMENTAIRES

  • Cà rappelle l’importance de faire les meilleurs choix technologiques et de toujours opter pour les solutions optimales et les plus efficientes possible.

    Cà impose plus que jamais des solutions le plus proche du 100% recyclable. Techniquement on y arrive de plus en plus souvent, économiquement et en matière de filières il a encore des failles dans divers secteurs et des abus.

    Il n’y a pas que le secteur des renouvelables concerné par ces ressources.

    Le rapport ne tient sans doute pas non plus assez compte des substitutions et évolutions technologiques non négligeables en cours car le paramètre ressources est le plus souvent intégré dans les calculs de plus en plus sophistiqués et on progresse pas mal également sur ce plan.

    Mais on se demande aussi pourquoi certains continuent par exemple de rouler seuls dans des véhicules de plus d’une tonne et pourquoi on fait la promotion de berlines très consommatrices en ressources partout dans le monde.

    Les sources de gaspillages sont multiples dans le monde et comparativement les renouvelables ont plutôt tendance à tenir compte de ces aspects plus que d’autres secteurs.

    C’est en avril que si tout le monde consommait comme des français la planète aurait épuisé ses ressources.

    Il est malgré tout à craindre que les ressources océaniques soient de plus en plus exploitées avec des conséquences négatives. Les hydrates de méthane sont un des exemples qu’il faudrait particulièrement éviter.

    La France est bien placée au plan du potentiel océanique même si elle n’a pas la capacité de surveiller tout son important territoire maritime et la pression risque de grandir.

    L’exploitation des ressources spatiales commence à être envisagée (voir cas du Luxembourg récemment qui se positionne parmi d’autres), malgré son coût initial et l’aspect juridique de la propriété de ces dernières qui nécessite un accord international qui ne sera sans doute pas simple à trouver.

    A noter qu’il y a des zones beaucoup plus productives par exemple en énergie solaire. Le projet Desertec a certes échoué mais le récent projet TunUr plus modeste et sans doute mieux appréhendé, à l’étude pour le moment par l’Europe peut avoir un intérêt pour plus de production avec moins de ressources et du stockage à très bas coût. Tout le monde peut y trouver un intérêt et un résultat plus optimal.

    La Tunisie exporte de l’énergie vers l’Europe depuis 1983, lorsque le premier gazoduc a été construit pour transporter du gaz de l’Algérie vers l’Italie. En mai 2015, elle a adopté et promulgué la loi n°12 sur la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, qui encadre également les conditions d’exportation et de transport pour l’exportation d’électricité produite à partir d’énergies renouvelables.

    https://www.euractiv.fr/section/energie/news/desert-solar-project-could-power-5-million-eu-homes/

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  • Il reste à chiffrer ce que le recyclage peut apporter car celui-ci est souvent gourmand en énergie et que de toute façon il faut fabriquer avant de recycler.

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