Plan climat : des objectifs ambitieux aux moyens très incertains... - L'EnerGeek

Plan climat : des objectifs ambitieux aux moyens très incertains…

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Largement salué ces derniers jours pour avoir dépassé les objectifs de la loi de transition énergétique et entériné la “neutralité carbone” en France dès 2050, le plan climat du ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot décline une série d’actions pour le quinquennat à venir. Energie, fiscalité, transports, tous les secteurs sont balayés dans leur ensemble pour, à terme, faire de l’Hexagone un chef de file de la lutte contre le changement climatique et un pays à la pointe des technologies propres. Problème, si les objectifs détaillés sont ambitieux, les moyens d’y parvenir sont peu évoqués et bien souvent renvoyés à plus tard. Explications. 

Un plan pour accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Paris

Préparé à la demande du Président de la République et du Premier ministre, le plan climat de Nicolas Hulot vise à mobiliser l’ensemble du gouvernement sur les mois et années à venir pour faire de l’Accord de Paris une réalité pour les Français et accélérer sa mise en œuvre aussi bien dans l’Hexagone qu’en Europe. A l’occasion de sa présentation à la presse, jeudi 6 juillet 2017, le ministre de la Transition écologique a tout d’abord souligné l’irréversibilité de cet accord et développé les six grands thèmes de son action à venir.

Ce plan climat aura donc pour objectifs prioritaires de “rendre irréversible l’Accord de Paris en France, d’améliorer le quotidien des Français, d’en finir avec les énergies fossiles et de s’engager dans la neutralité carbone, de faire de notre pays le n°1 de l’économie verte, d’encourager le potentiel des écosystèmes et de l’agriculture, et d’intensifier enfin la mobilisation internationale sur la diplomatie climatique”. Parmi les axes développés, autour desquels le ministre espère bien mobiliser l’ensemble du gouvernement, figurent notamment l’abandon par la France des énergies fossiles, l’arrêt des autorisations de permis d’exploration des gisements de pétrole, gaz ou charbon (y compris non conventionnels), la fin des voitures essence et diesel avant 2040, le développement de l’économie circulaire, la remise sur les trains du transport de marchandises, un plan de mobilités douces ou encore l’éradication de la précarité énergétique dans les dix ans. Des ambitions fortes donc qui laissent toutefois perplexes certains membres de l’opposition quant à la concrétisation de ces annonces dans les délais impartis.

Les objectifs du plan climat trop ambitieux ?

Le député européen d’Europe Ecologie-les Verts Yannick Jadot par exemple “reste sur sa faim” et s’interroge : “Qu’est-ce qui va vraiment être fait sous ce quinquennat ? C’est la responsabilité du gouvernement et il ne devrait plus être là dans cinq ans”. D’autres même, n’hésitent pas à parler de plans stratégiques irréalistes et d’orientations lourdes pour le futur qui émanent de “théoriciens de cabinet” et n’engagent que pour cinq ans ceux qui les professent. Clémentine Autain, députée de la Seine-Saint-Denis, qualifie quant à elle ces projets de “chantiers tout à fait sympathiques” mais s’inquiète du fond. “Si on regarde ce qu’il y a vraiment sur la table, il n’y a en réalité pas grand-chose”, souligne-t-elle sur Public Sénat.

Lire aussi : Rénovation énergétique : les obligations applicables aux bâtiments publics seraient-elles irréalistes ?

La rénovation thermique dans le bâtiment par exemple est élevée ici au rang de priorité nationale par le nouveau gouvernement qui prévoit d’éradiquer “les 7 millions de passoires thermiques” (logements peu efficaces sur le plan énergétique) dans la décennie à venir. Un objectif louable mais difficile à atteindre dans des délais si courts et qui imposera des investissements conséquents. Pour cela, le gouvernement s’est contenté de proposer pour le moment à tous les Français modestes, locataires ou propriétaires, un diagnostic de leur habitat, et mettra à disposition une enveloppe de 4 milliards d’euros, sans toutefois donner plus de précisions. Insuffisant pour l’opposition qui fustige les généralités d’un texte sans contenu et estime que “les propriétaires à revenus modestes de logements passoires auront besoin de bien plus que d’un diagnostic”.

Idem dans le secteur de la mobilité durable. En annonçant la fin des ventes de voitures thermiques à l’horizon 2040, le ministre s’est lancé un défi de taille et compte pour y parvenir sur la coopération technologique des constructeurs bien sûr, mais également sur un nouveau système de primes à l’achat applicable aussi bien aux véhicules neufs qu’aux véhicules d’occasion, et une fiscalité harmonisée entre le diesel et l’essence. Or, si les professionnels du secteur se sont montrés plutôt enthousiastes à cette idée, ils comptent également beaucoup sur l’Etat pour soutenir cette mutation, en aidant par exemple au déploiement de prises de recharge pour véhicules électriques, un point encore peu évoqué par le ministre.

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Il faut qu’on ait la capacité de recharger un véhicule électrique ou hybride rechargeable aussi bien qu’un véhicule essence ou diesel. Si la transition vers des véhicules propres ne réussit pas, ça ne sera pas un problème technique chez nous, mais un problème dans le soutien à l’infrastructure. Les gens n’achèteront pas d’électrique parce qu’il n’est pas possible de le recharger”, explique à l’AFP le directeur de la communication du Comité des constructeurs français d’automobiles (CCFA), François Roudier.

Un manque de précisions sur les moyens

De leur côté, si les ONG environnementales ont salué dans l’ensemble l’objectif ambitieux que la France s’est fixé pour 2050, elles sont restées prudentes quant à l’absence de moyens concrets pour y parvenir dans les secteurs des transports, des énergies renouvelables ou de l’aide internationale. “Sur le diagnostic, rien à redire. Mais où sont les mesures concrètes face à l’urgence climatique ? Nous restons sur notre faim quant à la manière d’atteindre les objectifs et tenir les promesses parfois ambitieuses : c’est le cas sur la voiture ou sur le développement des renouvelables“, explique à l’AFP Cyrille Cormier de Greenpeace. “L’objectif de la fin de la vente de véhicules thermiques d’ici 2040 envoie un signal utile mais on aimerait vraiment savoir quelles sont les premières étapes”, ajoute-t-il.

Le Réseau action climat (RAC) a relevé quant à lui des mesures “qui vont dans le bons sens” mais aussi de “grands absents“. L’objectif d’atteindre la “neutralité carbone” en 2050, plus ambitieux que celui actuel de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050, est salué, ainsi que “l’accélération prévue de la taxe carbone”, “la prise en compte des enjeux sociaux pour pouvoir fermer les dernières centrales à charbon” ou la rénovation des sept à huit millions de logements très mal isolés en dix ans. Mais le RAC, tout comme Greenpeace, déplore en revanche “le silence” sur les moyens qui seront mis en oeuvre pour y parvenir et craint logiquement l’effet d’annonce.

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L’absence de mention de la taxe européenne sur les transactions financières qu’Emmanuel Macron s’était engagé à défendre est également critiquée par tous. “Les belles promesses ne sont suivies d’aucune mesure concrète : alors que les populations les plus vulnérables attendaient bien plus qu’une communication bien huilée du président Emmanuel Macron, les financements climat et la taxe sur les transactions financières sont totalement absents du plan climat”, a réagi Armelle Le Comte, porte-parole d’Oxfam France. Pour rappel, cette taxe sur les transactions financières, en cours de négociation depuis plusieurs années au sein de l’Union européenne, pourrait rapporter quelque 20 milliards d’euros par an, dont une partie serait réservée au financement de l’action climatique en Europe et dans les pays les plus vulnérables.

Crédits photo : M. Bouquet/Terra

Rédigé par : La Rédaction

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COMMENTAIRES

  • Que d’effets d’annonce avec la dilapidation de l’argent public pour quel résultat ! Plus de CO2 émis en 2016. Décidément, l’idéologie est au pouvoir.

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